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François Grosdidier
Question N° 95647 au Ministère du Collectivités


Question soumise le 14 décembre 2010

M. François Grosdidier interroge M. le ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales, sur les restrictions que peut apporter un maire ou le directeur de la publication municipale à l'expression des groupes d'élus dans le bulletin municipal quand celle-ci comprend des allégations injurieuses et diffamatoires. Il souhaite aussi savoir si une telle publication, voulue par la loi, exonère le directeur de publication de sa responsabilité posée par la loi de 1881 sur la presse.

Réponse émise le 1er mars 2011

Le droit d'expression des élus n'appartenant pas à la majorité municipale dans les bulletins d'information générale diffusés par la commune est soumis aux règles fixées par la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse. L'article 42 de cette loi définit le directeur de publication comme auteur principal des crimes et délits commis par voie de presse, les auteurs de l'écrit étant considérés, en vertu de l'article 43 de cette loi, comme complices. Le directeur de publication étant pénalement responsable du contenu des articles qui y sont publiés, est fondé à exercer un contrôle sur le contenu des articles produits par les conseillers minoritaires, afin d'éviter tout propos injurieux ou diffamatoire. Il pourrait donc demander le cas échéant aux conseillers concernés de modifier leur rédaction, voire, en cas de refus de leur part, ne pas publier les mentions diffamatoires ou injurieuses. Une telle décision peut néanmoins faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Ainsi, la cour administrative d'appel de Versailles, dans sa décision du 8 mars 2007 n° 05VE02112, a considéré que le projet de tribune litigieux, rédigé en des termes polémiques et excessifs et faisant allusion à des actes commis par certaines personnes, « ne présentait toutefois pas un caractère outrageant de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération des personnes publiques dont le comportement était dénoncé ; que dès lors, le contenu des écrits en cause n'avait pas un caractère diffamatoire ou injurieux qui aurait été de nature à faire obstacle au droit d'expression des élus d'opposition consacré par les dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général de collectivités territoriales ; que dans ces conditions, le directeur de publication, qui avait au demeurant la possibilité d'assortir cette tribune d'un article rectificatif pour démentir les faits qu'il considérait comme inexacts, ne pouvait pas faire valoir l'éventuelle mise en jeu de sa responsabilité pénale sur le fondement de l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881 susvisée pour justifier un tel refus » de publier. La cour administrative d'appel de Versailles, dans une affaire similaire, avait pris une décision dans le même sens, le 27 septembre 2007 (n°  06VE02569). L'appréciation portée par le directeur de publication ne peut donc pas conduire à sanctionner des prises de position qui, bien que présentant un caractère polémique et agressif, ne sont pas pour autant réellement diffamatoires. S'agissant de l'hypothèse où un article présenté par des conseillers d'opposition paraît comporter des allégations injurieuses ou diffamatoires, il convient de remarquer que la Cour de cassation a justifié une décision juridictionnelle relaxant les directeurs de publication qui, sous la rubrique « annonces légales », avaient fait paraître une décision disciplinaire considérée par l'intéressé comme diffamatoire, alors que la publication de l'annonce litigieuse avait été faite sur une réquisition visant un article législatif du code de la sécurité sociale. La Cour a précisé que la décision attaquée « se trouve justifiée, dès lors que le directeur de publication d'un journal ne saurait encourir aucune responsabilité du fait de l'insertion d'une annonce dont il ne peut légalement se dispenser » (Cass. Crim., 17 octobre 1995, n° 93-85440). Ce précédent jurisprudentiel pourrait être invoqué, le cas échéant, si un directeur de publication devait être mis en cause pénalement pour des écrits produits par les conseillers minoritaires, malgré une demande de modification. En cas d'injure ou de diffamation, les poursuites peuvent ainsi être limitées à la personne qui a tenu de tels propos. La mention, dans le bulletin, de l'obligation légale de réserver une tribune d'expression aux conseillers minoritaires et de la responsabilité des auteurs des articles quant à leur contenu serait de nature à clarifier les obligations respectives du directeur de publication et des conseillers concernés.

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