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Jean-Claude Fruteau
Question N° 95468 au Ministère du Travail


Question soumise le 7 décembre 2010

M. Jean-Claude Fruteau attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les conséquences pour la santé humaine de la présence des phtalates dans de nombreux produits de consommation courante. Une récente étude, conduite par l'Institut de recherche sur la santé, l'environnement et le travail (Irest) de Rennes, vient de démontrer que les phtalates ont très certainement des conséquences sur la baisse de la fertilité chez l'homme. En effet, l'expérimentation menée met en exergue une baisse du niveau de testostérone qui peut aller jusqu'à 30 %. Produits à plus de trois millions de tonnes par an dans le monde, les phtalates sont employés depuis une cinquantaine d'années dans de nombreux produits de consommation courante (plastiques, emballages, cosmétiques, jouets...) et peuvent se transmettre à l'homme par voie cutanée, par ingestion ou encore par inhalation. Cette étude n'est pas la première à mettre en avant les conséquences pour la fertilité de l'homme de l'utilisation de ce produit. Aussi, il souhaite savoir s'il entend demander une vaste étude épidémiologique sur la population ainsi que les mesures qu'il pourrait d'ores et déjà mettre en oeuvre pour, d'une part, sensibiliser les consommateurs et, d'autre part, demander aux industriels de réduire au maximum le recours à ce produit.

Réponse émise le 19 avril 2011

Depuis une quarantaine d'années, des études épidémiologiques réalisées dans le monde industrialisé ont révélé une baisse de la fertilité masculine en partie liée à la baisse de la production de spermatozoïdes chez l'homme et une augmentation de certaines malformations congénitales chez le petit garçon. Ces évolutions sont souvent attribuées à des substances chimiques, parmi lesquelles certains phtalates, qui pourraient perturber le fonctionnement du système hormonal, en particulier celui de la reproduction et pourraient donc affecter l'adulte, le jeune enfant, ou l'embryon et le foetus lors de leur développement prénatal. La question des perturbations endocriniennes est un sujet préoccupant pour la santé publique que le ministère de la santé suit depuis plusieurs années. Il a, à ce sujet, demandé en janvier 2009 une expertise collective à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) sur les dangers des produits reprotoxiques et/ou perturbateurs endocriniens mis à la disposition du grand public, dont les phtalates, qui devrait paraître prochainement. Des études confirment des effets sur le système reproducteur chez l'animal induits par certains phtalates, déjà classés comme reprotoxiques au niveau européen, comme le bis (2-ethylhexyl) phtalate (DEHP), le benzyl butyl phtalate (BBP) et le dibutyl phtalate (DBP). En revanche, si certaines études épidémiologiques chez l'homme adulte indiquent un lien entre le DEHP et une altération des caractéristiques du sperme, les preuves restent très limitées pour conclure à l'existence d'un rôle de ces phtalates sur la survenue des anomalies génitales du petit garçon, et sur la santé reproductive des femmes. Les effets observés sur ces trois phtalates ne peuvent pas être extrapolés sans confirmation expérimentale aux autres phtalates. Face à ces effets reprotoxiques, un certain nombre de mesures réglementaires ont déjà été prises vis-à-vis de l'utilisation, dans les produits de consommation, des phtalates reprotoxiques. Les trois phtalates DEHP, BBP et DBP ont par ailleurs été récemment inscrits, par le règlement (UE) n° 143/2011 du 17 février 2011, à la première annexe XIV du règlement REACH comme substances très préoccupantes soumises à autorisation. Ils ne peuvent donc plus être fabriqués ou importés s'ils n'ont pas obtenu, pour un usage bien défini, une autorisation spécifique de la Commission européenne. Cette autorisation ne sera octroyée que si le fabricant, l'importateur ou l'utilisateur en aval peut prouver que le risque est valablement maîtrisé. Trois autres phtalates, le DHNUP, le DIHP et le DIBP, sont par ailleurs entrés dans ce processus d'autorisation REACH en étant inscrits sur la liste des substances candidates à l'annexe XIV, et seront donc soumis aux mêmes contraintes si l'inscription à l'annexe XIV est confirmée par la Commission européenne. Les phtalates représentent une large famille d'une quarantaine de substances qui sont utilisées comme agents plastifiants dans des applications variées en fonction de leur structure chimique. On les retrouve en effet dans de très nombreux produits tels les adhésifs, les emballages alimentaires, les huiles lubrifiantes, les câbles électriques, les équipements automobiles. Leur différence de structure chimique, outre des propriétés physiques différentes, implique aussi une différence dans leurs effets toxiques, ce qui fait qu'on ne peut pas attribuer les effets toxiques de certains de ces phtalates à l'ensemble des congénères de cette famille. Le ministère de la santé a par ailleurs saisi en janvier 2009, en parallèle avec la saisine de l'INSERM, les agences de sécurité sanitaire pour qu'elles évaluent le risque attribuable à ces substances dans les produits grand public et les produits cosmétiques. Ces études, dont les premiers résultats sont attendus en 2012, comporteront la détermination de l'ensemble des usages, l'évaluation des expositions et du risque, et enfin, l'évaluation des procédés ou substances de substitution, étape indispensable pour une gestion des risques adaptée. L'ensemble des données et conclusions recueillies par ces agences permettra d'engager une action, tant au niveau national qu'au niveau communautaire, pour améliorer et accélérer la prise de décisions quant aux usages et autorisations de certaines substances.

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