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Marie-Line Reynaud
Question N° 94959 au Ministère de la Santé


Question soumise le 7 décembre 2010

Mme Marie-Line Reynaud attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé, sur les risques que l'usage détourné de médicaments à visée d'amaigrissement peuvent avoir pour des consommateurs qui ne nécessitent pas un tel traitement. Elle lui demande de lui indiquer quelles mesures le Gouvernement entend prendre afin de lutter contre ces nouveaux modes de consommation.

Réponse émise le 30 août 2011

Depuis les années 1990, l'arsenal thérapeutique médicamenteux de lutte contre le surpoids et l'obésité a fortement diminué, l'autorisation de mise sur le marché (AMM) des différentes substances actives sur le système nerveux central ayant été retirée en raison d'un rapport bénéfice/risque qui s'est révélé défavorable de par une efficacité modeste et des effets indésirables graves cardio-vasculaires ou psychiatriques. Aussi, certains médicaments n'ayant pas d'indication dans le traitement du surpoids ou de l'obésité font-ils l'objet d'un usage détourné en raison de leurs effets indirects sur le poids liés à une activité diurétique, métabolique, laxative ou encore sur la satiété en agissant sur le système nerveux central. Ces médicaments sont le plus souvent soumis à prescription médicale. Ils ne sont pas dépourvus d'effets indésirables et n'ont pas démontré de rapport bénéfice/risque positif dans le traitement du surpoids ou de l'obésité. Ainsi, leur utilisation dans cette indication expose à des risques graves pour la santé, principalement d'ordre cardio-vasculaire ou psychiatrique. Plus précisément, la prise répétée de diurétiques peut entraîner une déshydratation, une chute de la tension pouvant conduire à un état de fatigue permanente, des vertiges et des syncopes. De plus, la fuite de potassium dans les urines peut également provoquer des troubles du rythme cardiaque pouvant aller jusqu'à menacer le pronostic vital. De même, la prise de laxatifs en quantité importante et régulière entraîne une perte d'eau et de sels minéraux, en particulier de potassium. Cette déshydratation peut provoquer des chutes de tension, une fatigue, des vertiges et des syncopes, ainsi que des troubles cardiaques qui peuvent aller jusqu'à menacer le pronostic vital. Par ailleurs, des prises plus faibles, outre qu'elles n'ont aucun effet sur le poids, rendent l'intestin paresseux et finissent par constiper. Concernant les préparations thyroïdiennes, celles-ci entraînent une perte de graisse, mais également une perte de tissus maigres et de muscles et peuvent entraîner des bouffées de chaleur, des sueurs, des palpitations, et des signes de nervosité, ainsi que des troubles cardiaques pouvant entraîner la mort. La prise de bupropion peut quant à elle exposer à un risque de crise convulsive et potentiellement à des troubles psychiatriques. Par ailleurs, il est à noter que ce médicament est contre-indiqué chez les patients ayant des troubles du comportement alimentaire. De la même manière, l'utilisation des antidépresseurs et des anxiolytiques dans le traitement de l'obésité expose notamment les patients ainsi traités à la survenue de troubles psychiatriques potentiellement graves. Concernant ensuite les risques liés à l'utilisation des médicaments du diabète, la prise de metformine peut exposer à un risque d'acidose lactique en cas d'accumulation. Il s'agit d'une complication métabolique rare mais grave pouvant entraîner la mort en l'absence de traitement précoce. Ce risque est majoré en présence de facteurs de risque tels qu'une insuffisance rénale, une cétose, un jeune prolongé, l'éthylisme, une insuffisance hépatocellulaire, ainsi que toute affection associée a une hypoxie. De même, l'utilisation de l'exénatide et du liraglutide dans le traitement du surpoids ou de l'obésité peut exposer à des risques de pancréatite aiguë et d'insuffisance rénale ainsi qu'à des troubles gastro-intestinaux (nausées dose-dépendantes, vomissement et diarrhées). Dans le même sens, la prise de topiramate, médicament antiépileptique, expose a un certain nombre d'effets indésirables tels que des risques d'idées et de comportements suicidaires, de troubles de l'humeur et de dépression, un risque accru de formation de calculs rénaux et de signes et symptômes associés. Dans certains cas, cet usage détourné a fait l'objet de signalements à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) par des médecins, des inspecteurs, des centres d'évaluation et d'information sur la pharmacodépendance (CEIP), des centres régionaux de pharmacovigilance ou des centres antipoison (Lipostabilr, clenbuterol, topiramate, bupropion), ou a été identifié lors d'enquêtes spéciales, notamment lors de l'enquête réalisée par l'AFSSAPS en 2006-2007 sur les pratiques de préparations magistrales (metformine, benfluorex, diurétiques, préparations thyroïdiennes, laxatifs, antidépresseurs, etc.). D'autres encore ont été signalés par les experts consultés (liraglutide, exenatide). Dans ce cadre, plusieurs spécialités ont ainsi vu leur AMM retirée. Il s'agit de la sibutramine, dont l'AMM a été suspendue en janvier 2010 en raison d'un risque de complications cardio-vasculaires, des anorexigènes dont la commercialisation a été interdite en France depuis 1999, en raison de risques importants notamment d'hypertension artérielle pulmonaire primitive, d'effets indésirables graves cardio-vasculaires, du rimonabant qui a été interdit en France en novembre 2008 en raison notamment du risque de troubles de l'humeur et de dépression, et enfin du benfluorex, interdit en novembre 2009 en raison de risque de valvulopathies. C'est pourquoi l'ensemble des autorités et instances de sécurité sanitaire, sous l'égide de la direction générale de la santé (DGS), sensibilisent et informent tant les professionnels de santé que les patients sur les risques d'une utilisation abusive, non contrôlée, de médicaments hors AMM et notamment sur les dangers potentiellement graves pour la santé tels que des troubles cardiaques ou psychiatriques, et leur rappellent que la balance bénéfice/risque d'un médicament n'est démontrée que dans le cadre du respect des conditions définies dans son AMM. De plus, les professionnels de santé sont alertés sur ces pratiques d'utilisation hors AMM afin de leur permettre d'alerter les patients sur les risques inhérents à ces pratiques, de les conduire à rechercher devant certains signes évocateurs la prise de médicaments utilisés hors AMM dans un contexte de recherche de perte de poids, et de leur rappeler, ainsi qu'aux pharmaciens, leur responsabilité en cas de prescription et de délivrance de médicaments hors AMM. Sous cet angle, en 2009, dans le cadre de la problématique liée à « l'image du corps », l'un des volets du Programme national nutrition santé 2006-2010, la DGS a sollicité l'AFSSAPS et l'Agence de française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) - devenue l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) - afin de réaliser une action commune sur l'évaluation des risques liés aux régimes et méthodes proposées pour répondre à la demande d'amaigrissement. Afin de répondre à cette demande, l'AFSSAPS a ainsi établi des recommandations qui ont été transmises à la DGS en avril 2011, visant à prévenir les risques pour la santé, liés à la pratique des divers régimes et la prise des produits dans un but d'amaigrissement. Enfin, suite à l'affaire Médiator, les missions parlementaires, les missions de l'inspection générale des affaires sanitaires et sociales ainsi que les différents groupes de travail constituant les « assises du médicament » dont les rapports ont été rendus publics en juin ont élaboré des propositions de réformes du système sanitaire des produits de santé dont notamment le renforcement du suivi et de l'utilisation des produits de santé. À cet égard, le ministre chargé de la santé a rappelé que les prescriptions hors AMM, bien qu'indispensables dans certains cas comme ceux des maladies orphelines, doivent rester des situations réellement exceptionnelles, devant être encadrées et leurs risques associés maîtrisés. C'est pourquoi l'usage hors AMM devra être détecté par la mention obligatoire sur les ordonnances du caractère « hors AMM » de la prescription, et par l'analyse des données de l'assurance maladie, de la pharmacovigilance, de la recherche clinique, ainsi que de la littérature, afin d'identifier les pratiques à risque et par le développement des logiciels d'aide à la prescription, permettant de répertorier les indications de l'AMM et hors AMM. Les mesures de lutte contre les prescriptions hors AMM non justifiées et l'encadrement de la prescription hors-AMM par le renforcement des dispositifs dérogatoires existants (protocole thérapeutique temporaire [PTT], et autorisation temporaire d'utilisation [ATU]) seront également renforcées. En outre, une obligation pour les industriels de contribuer au bon usage de leur produit sera introduite, en dotant le CEPS d'un pouvoir de sanction pour tout manquement à cette obligation. L'ensemble de ces mesures figure dans le projet de loi relatif à la réforme du système des produits de santé, présenté en conseil des ministres le 1er août 2011, qui sera soumis au Parlement dès l'automne prochain.

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