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Maxime Gremetz
Question N° 94484 au Ministère de la Justice


Question soumise le 30 novembre 2010

M. Maxime Gremetz attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur l'évolution de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, relative à la non-représentation d'enfant lors de l'exercice du droit de visite et d'hébergement accordé aux parents divorcés ou séparés. Dans un arrêt en date du 9 janvier 2007, la Cour européenne a condamné la République tchèque pour son refus de sanctionner le délit de non-représentation d'enfant. Refus constitutif d'une violation manifeste de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'Homme selon lequel "toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale". Ainsi la Cour reconnaît la responsabilité d'un État "dans les moyens et la diligence à faire respecter les droits de visite et d'hébergement et, par ailleurs, dans le fait de conforter un parent dans sa démarche d'exclusion de l'autre parent par impunité et laxisme". Il découle de cette jurisprudence l'obligation pour l'État français, en l'occurrence les procureurs de la République, de tout mettre en oeuvre afin de faire respecter les droits de visite et d'hébergement obtenus par ordonnances rendues par les juges aux affaires familiales. Force est de constater qu'à l'heure actuelle, les procureurs de la République adoptent une attitude laxiste lorsqu'ils sont confrontés à cette problématique. En effet, les très nombreuses plaintes déposées par les parents auprès du parquet et relatives aux non-représentations d'enfants sont systématiquement classées sans suite malgré l'ancienneté de cette jurisprudence. Ainsi les services de l'État accordent une impunité totale aux parents qui refusent de présenter les enfants malgré les modalités fixées par les ordonnances de jugements rendus. Cette impunité accordée malgré la jurisprudence citée plus haut représente de plus une violence psychologique importante tant à l'égard des enfants que des parents victimes de ces délits impunis. Il est à craindre que de nombreux parents, victimes de l'attitude laxiste des procureurs de la République en la matière, demandent la condamnation de l'État français auprès des juridictions compétentes, sur la base de cette jurisprudence de la Cour européenne. Il lui demande donc quelles mesures il entend prendre afin de mettre en conformité les pratiques du parquet, en matière de non-représentation d'enfants, avec le droit au respect de la vie privée et familiale, prévu à l'article 8 de la convention européenne, et rappelé avec force par une jurisprudence européenne constante.

Réponse émise le 17 mai 2011

Il est important d'indiquer que le respect des décisions de justice, accordant un droit de visite et d'hébergement au parent chez qui l'enfant ne réside pas habituellement, est fondamental dans l'intérêt même de cet enfant. L'article 227-5 du code pénal prévoit que le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Il convient d'observer que la mise en oeuvre des décisions de justice fixant l'exercice des droits de visite et d'hébergement ne permet pas le recours à la force publique dans les conditions du droit commun des procédures civiles d'exécution. Le parent lésé dans ses droits peut, en revanche, déposer une plainte auprès des forces de l'ordre, celles-ci étant tenues de la recevoir selon l'article 15-3 du code de procédure pénale, pour dénoncer ces faits constitutifs du délit de non-représentation d'enfant. Si la plainte est déposée le jour même où les faits de non-représentation sont commis, les forces de police et de gendarmerie disposent des pouvoirs liés à l'enquête de flagrance. Cependant, en ce domaine très particulier qu'est le droit de la famille, l'engagement direct de poursuites n'apparaît pas toujours comme la solution la plus adaptée au règlement de ces difficultés, dans la mesure où l'intérêt de l'enfant commande d'essayer de rétablir les relations entre les parents. C'est pourquoi, le recours à des alternatives aux poursuites, telles que la médiation pénale ou le classement sous condition de régularisation en application de l'article 41-1 du code de procédure pénale, est privilégié par le ministère public, notamment dans les cas où le parent mis en cause ne conteste pas le principe de la remise de l'enfant mais ses modalités. Il faut noter que le recours à des alternatives aux poursuites ne se résume pas à la simple possibilité pour le parent concerné d'échapper à la peine. Le classement sans suite sous condition, outil souple, signifie aussi la constatation de la régularisation de la situation ou la mise en place de mécanismes de reprise de contacts entre parents et enfants. Si la médiation ou les autres mesures alternatives échouent, l'exercice de poursuites pénales reste une mesure de contrainte afin que la personne qui serait privée indûment de son droit puisse trouver un moyen de faire respecter les décisions judiciaires. En tout état de cause, des poursuites sont exercées pour les situations dans lesquelles l'un des parents manifeste de manière délibérée et répétée un refus de respecter les décisions judiciaires. Au regard de tous ces éléments, il apparaît que les magistrats utilisent tous les moyens nécessaires pour faire appliquer les décisions relatives à la résidence des enfants au regard des exigences de la convention européenne des droits de l'homme, et que le manquement par un parent à ses obligations fait effectivement l'objet d'une réponse pénale. En 2009, les juridictions françaises ont prononcé 892 condamnations du chef de non-représentation d'enfant.

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