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Michel Havard
Question N° 93769 au Ministère de l'Écologie


Question soumise le 23 novembre 2010

M. Michel Havard appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sur les conséquences sanitaires de la pollution atmosphérique en France. Une équipe des chercheurs du Centre national de recherche scientifique (CNRS) a publié le 15 mars 2010, dans une prestigieuse revue internationale, les résultats d'une étude qui met en relation directe la pollution urbaine et les troubles cardiaques. Cette étude porte sur une unité urbaine de 149 000 habitants et mesure l'impact sanitaire de la pollution atmosphérique par rapport à un niveau théorique de faible pollution. Elle montre que, chaque année, la pollution atmosphérique est directement responsable de 24 décès anticipés dont 9 pour un motif cardio-vasculaire et 3 pour une cause respiratoire. Les niveaux de pollution observés sont également à l'origine chaque année de 43 admissions hospitalières pour motif cardio-vasculaire chez les adultes de plus de 15 ans. Les chiffres présentés ici fournissent un ordre de grandeur permettant d'illustrer les effets de la pollution atmosphérique sur la santé d'une population quand bien même les concentrations mesurées sont modérées ou même inférieures aux seuils réglementaires. Les estimations obtenues montrent que, si les risques relatifs sont dits "faibles" à l'échelle individuelle, l'impact sur la population est important du fait du grand nombre de personnes exposées. Pour l'unité urbaine considérée, la seule suppression des pics de pollution réduirait de 7 % la mortalité totale et de 10 % les admissions hospitalières pour cause respiratoire, cardiaque et cardio-vasculaire. Selon cette étude, une réduction de 25 % de la pollution de fond réduirait de 31 % la mortalité totale et de prés de 40 % les admissions hospitalières. Si l'on extrapole ces résultats de cette étude à la seule population française habitant dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants, on peut estimer que la pollution atmosphérique pourrait être responsable de plus de 4 500 décès prématurés par an et de 11 600 hospitalisations, soit un nombre de décès supérieur à celui provoqué par les accidents de la route. Compte tenu des conséquences néfastes avérées de la pollution atmosphérique en matière de santé, il lui demande donc de bien vouloir lui préciser quelles mesures elle entend prendre pour intégrer ces nouvelles connaissances dans le cadre des plans de protection de l'atmosphère (PPA) et du plan national santé environnement 2009-2013 qui prévoit une lutte renforcée contre la pollution atmosphérique. Il lui demande par ailleurs si, compte tenu de la mise en évidence des effets néfastes pour la santé de la pollution atmosphérique même inférieure aux normes en vigueur, il ne conviendrait pas d'engager une réflexion sur de nouvelles mesures de prévention et de lutte contre la pollution de l'air.

Réponse émise le 8 mars 2011

De nombreuses études épidémiologiques à travers le monde ontmontré que l'exposition de la population à la pollution atmosphérique était associée à des effets à court terme sur la morbidité et la mortalité. Les données épidémiologiques sur les effets à long terme des polluants sont moins nombreuses mais les résultats convergents de plusieurs études de cohortes ont montré l'effet à long terme de l'exposition aux particules fines sur l'espérance de vie, sur la genèse ou l'aggravation de maladies cardio-vasculaires, de l'insuffisance respiratoire, de l'asthme ou de certains cancers. Les résultats des travaux épidémiologiques et toxicologiques montrent donc que les niveaux de pollution observés dans l'atmosphère des villes sont associés à un risque pour la santé. Une étude publiée le 15 mars 2010 dans la revue American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine par des chercheurs du CNRS et de l'INSERM, apporte les preuves cellulaires chez le rat d'un effet direct de la pollution urbaine sur la fonction cardiaque. Des travaux sont en cours pour vérifier ces données chez l'homme. Par ailleurs, les travaux épidémiologiques ne permettent pas de déceler de seuil en dessous duquel aucun effet ne serait plus observé dans la population, en particulier pour les particules comme l'a indiqué l'ANSES (ex-AFSSET) dans son avis relatif à ce sujet rendu en mars 2009. Pour étayer les chiffres que vous présentez, le programme CAFE (clean air for Europe) de la Commission européenne a estimé qu'en France, en 2000, plus de 40 000 décès par an étaient en relation avec l'exposition chronique aux PM2,5 (particules fines de diamètre inférieur à 2,5 $GMm) d'origine anthropique, ce qui correspondait à une perte moyenne d'espérance de vie de 8,2 mois en France. À plus fine échelle, une méthode similaire d'évaluation de l'impact sanitaire de la pollution atmosphérique réalisée par l'InVS dans 9 villes françaises (Bordeaux, Le Havre, Lille, Lyon, Marseille, Paris, Rouen, Strasbourg, Toulouse) a permis d'estimer qu'une réduction de 5 $GMm/m³ de l'exposition moyenne annuelle aux particules fines (PM2,5) permettrait une diminution d'au moins 2 % du taux annuel de mortalité de la population âgée de 30 ans et plus, soit un total d'environ 1 500 décès annuels pour les 9 villes. La valeur limite réglementaire sera de 25 $GMm/m³ en 2015. Cette méthodologie est appliquée dans de nombreuses agglomérations françaises actuellement et montre les liens entre pollution de l'air et données de santé. Afin de limiter l'impact sanitaire de la pollution de l'air, la loi Grenelle 1 a instauré la mise en place d'un plan national destiné à réduire les émissions de particules. Il s'agit d'actions ayant pour objectif principal la réduction de la pollution de fond par les particules, de manière quasi permanente, et pas seulement la seule prévention des pics de pollution. L'objectif, issu du second plan national santé environnement (PNSE 2), est de réduire de 30 % les concentrations de particules fines dans l'air d'ici à 2015. Le plan particules a été présenté et rendu public le 28 juillet 2010. Ce plan présente des mesures dans quatre secteurs émetteurs : domestique (chauffage au bois notamment), industriel et tertiaire, transports, agricole. Une mesure phare du plan particules est la mise en oeuvre de zones d'actions prioritaires pour l'air (ZAPA) instaurées par la loi Grenelle 2 qui met à disposition des communes ou groupements de communes de plus de 100 000 habitants ce nouvel outil d'amélioration de la qualité de l'air. Il repose sur l'interdiction d'accès aux véhicules les plus polluants dans la zone déterminée. Un appel à projets d'études de faisabilité a été lancé en juillet 2010, et 6 collectivités ont été retenues. Deux nouvelles collectivités ont candidaté à un second appel à projets qui s'est clos le 31 décembre 2010. Localement, une dynamique territoriale est lancée par ces mesures de réduction qui sont déclinées à travers des outils d'orientation, de planification, voire de prescriptions à travers divers plans d'actions portés : soit par les préfets pour les plans de protection de l'atmosphère (PPA) ; soit par les collectivités pour les ZAPA, les plans de déplacement urbains, les plans locaux d'urbanisme, les SCOT et parfois les plans climat territoriaux ; soit à la fois par le préfet de région et le président du conseil régional pour l'élaboration des schémas régionaux climat air énergie (SRCAE) qui définiront des orientations pour la région. Les actions de réduction des particules primaires dans le plan particules et les actions de réduction des précurseurs de particules dites secondaires, comme les composés organiques volatils (COV), l'ammoniac (NH3) et les oxydes d'azote (NOx) sont traitées plus largement dans l'arrêté ministériel du 8 juillet 2003 relatif au plan de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA) pris en application de la directive 2001/81/CE relative aux plafonds d'émission nationaux et que la France doit réviser en 2011. Le ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement (MEDDTL) a également entrepris l'amélioration des mesures de prévision et de gestion des pics de pollution. Ces mesures seront précisées prochainement à travers un arrêté ministériel. Parallèlement, le Haut Conseil pour la santé publique (HCSP) a été saisi par les ministères en charge de l'environnement et de la santé et devra : émettre un avis sur la pertinence, en termes de santé publique, des seuils d'information et d'alerte actuellement en vigueur pour les particules en suspension ; élaborer des recommandations sanitaires adaptées, si nécessaire, à différents publics cibles en tenant compte notamment des populations fragiles, des comportements et de la typologie des sources d'émission (diesel, combustion du bois, industrie, agriculture, etc.) ; considérer également les recommandations sanitaires adaptées le cas échéant au dépassement des seuils d'information et d'alerte fixés par la réglementation européenne pour le dioxyde d'azote et l'ozone ; adapter les recommandations et messages aux différents publics cibles identifiés et apporter des conseils sur les modes de communication les mieux adaptés, aux échelons locaux, pour atteindre chaque public cible identifié. Ces différents éléments et le suivi des actions programmées permettront en 2011 de poursuivre le renforcement de la prévention et de la lutte contre la pollution atmosphérique.

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