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Bérengère Poletti
Question N° 93605 au Ministère du Travail


Question soumise le 16 novembre 2010

Mme Bérengère Poletti attire l'attention de M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur la période probatoire et la rétrogradation d'un salarié protégé. Au moment de l'embauche, il est généralement fixé dans le contrat de travail une période d'essai qui permet à l'employeur de vérifier les compétences de son salarié, mais aussi au salarié de vérifier que l'emploi proposé correspond bien à ses attentes. Elle est définie par le code du travail à l'article L. 1221-20. Au cours de sa carrière, un salarié peut se voir proposer une promotion. Dans ce cas, l'employeur peut alors fixer, non pas une période d'essai, mais une période probatoire. À l'issue de celle-ci, le salarié promu conservera son nouveau poste, ou, à défaut, sera rétrogradé à son ancien poste, avec son ancien salaire. Cette période probatoire n'est pas définie légalement, mais par la jurisprudence : « en cours de contrat, les parties peuvent convenir, à l'occasion d'un changement d'emploi, d'une période probatoire, la rupture de celle-ci ne peut concerner le contrat de travail et a pour effet de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures » (Cour de cassation, chambre sociale, 30 mars 2005, publié au bulletin, pourvoi n° 02-46103). En résumé, à la suite d'une période probatoire, soit le salarié est compétent, il garde son nouvel emploi assorti d'une nouvelle rémunération, soit le salarié n'est pas apte pour le poste, il est alors rétrogradé et on lui versera son ancienne rémunération. Mais d'après la chambre sociale de la Cour de cassation, il en va autrement lorsque le salarié est protégé. En effet, dans un arrêt en date du 30 septembre 2010 (numéro de pourvoi : 08-43862) les juges ont déclaré que « la décision de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures constituait une modification des conditions de travail qui ne peut être imposée au salarié protégé et qu'en cas de refus de ce dernier, il appartenait à l'employeur, soit de le maintenir sur le nouveau poste, soit de saisir l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation administrative de licenciement ». Ainsi, au bout d'une période probatoire d'un salarié protégé, l'employeur se verra dans l'obligation soit de maintenir le salarié à son nouveau poste, alors qu'il n'est pas apte au poste, ou de le licencier. Que risque-t-il d'arriver avec cette nouvelle jurisprudence ? Les employeurs ne vont plus proposer des promotions aux salariés protégés et ainsi les employeurs pourront être accusés de discrimination par les salariés protégés. Ne serait-il donc pas utile de donner une véritable base légale à la période probatoire ? Elle demande si cela serait possible, notamment, en ajoutant un article au code du travail qui permettra à l'employeur de rétrograder tous les salariés inaptes à la suite d'une période probatoire.

Réponse émise le 12 avril 2011

Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative à la situation d'un salarié protégé qui verrait son employeur mettre fin à la période probatoire dont il a fait l'objet en cours de contrat, à la suite d'un changement d'emploi. La position du juge judiciaire telle que dégagée par l'arrêt du 30 septembre 2010 (n° 08-43 862) auquel il est fait référence n'est qu'une nouvelle illustration de la prééminence de la protection dérogatoire du droit commun dont bénéficient les salariés protégés sur les règles applicables à tout salarié dépourvu d'une telle protection. Ainsi, et conformément au principe jurisprudentiel constant selon lequel aucune modification pas plus qu'aucun changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé, la cour de Cassation rappelle qu'il appartient à l'employeur qui met fin à la période probatoire du salarié et qui se heurte au refus de ce dernier de réintégrer ses fonctions antérieures, de saisir l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement. La demande reposera nécessairement sur l'insuffisance professionnelle résultant de l'inadaptation du salarié à son nouveau poste. Il appartiendra donc à l'employeur de démontrer la réalité de cette inadaptation et à l'inspecteur du travail de vérifier que le salarié avait, le cas échéant, bénéficié de la formation. L'adaptation nécessaire à l'exercice de ses nouvelles missions et qu'il était investi d'objectifs matériellement réalistes et réalisables. L'employeur devra par ailleurs être en mesure de justifier préalablement une tentative de reclassement aux meilleures conditions du salarié protégé. Il pourra être considéré que la proposition de reclassement sur le poste antérieurement occupé constituait une proposition conforme à l'obligation de recherche qui lui incombe au regard de la jurisprudence du juge administratif (Conseil d'État, 7 décembre 2009, n° 315 588, M. Grece).

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