M. Albert Facon appelle l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les préoccupations exprimées par Amnesty international concernant le projet de loi organique relatif au défenseur des droits. Ce projet prévoit la disparition de quatre autorités indépendantes existantes dans un premier temps et leur remplacement par un défenseur des droits : la Commission nationale de déontologie de la sécurité, le Défenseur des enfants, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité et le médiateur de la République. Les amendements adoptés par le Sénat n'ont pas permis d'apporter les garanties suffisantes pour la mise en place d'un mécanisme de contrôle du respect des droits humains effectif et indépendant. Amnesty international demande le maintien de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, du défenseur des enfants, de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité qui ont montré leur utilité, chacun oeuvrant dans son domaine de compétence avec sa logique propre à la défense des droits. Amnesty international demande également de renforcer, au profit du défenseur des droits, les pouvoirs actuellement dédiés au Médiateur de la République et d'établir le défenseur des droits, comme garant de l'indépendance des diverses autorités et d'une meilleure interaction entre elles, de la meilleure information du public et lui confier d'intervenir à la demande des autorités de soutien aussi bien sur des cas ponctuels que pour développer la réflexion sur des thématiques transversales ou nouvelles, afin d'améliorer la protection des droits. Il lui demande ce que le Gouvernement compte faire en la matière.
La Constitution donne au Défenseur des droits une compétence générale en matière de protection des droits et libertés. Selon les termes de l'article 71-1 de la Constitution, le Défenseur des droits veille au respect des droits et libertés par les administrations publiques, nationales ou locales. L'inclusion des compétences du Médiateur de la République dans le champ d'intervention du Défenseur des droits découle ainsi, directement, de la lettre même de l'article 71-1. Celui-ci habilite en outre le législateur organique à élargir les compétences du Défenseur des droits au-delà de celles exercées par le Médiateur de la République. S'agissant de la lutte contre les manquements à la déontologie de la sécurité, force est de constater que la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) reste peu connue de nos concitoyens, comme en témoigne le nombre réduit de réclamations qui lui est transmis chaque année (229 en 2009). La reprise de ses attributions par le Défenseur des droits, autorité constitutionnelle plus visible et pouvant être directement saisie, permettra de mieux garantir le respect de la déontologie de la sécurité. L'inclusion des compétences de la HALDE et du Défenseur des enfants dans le champ d'intervention du Défenseur des droits correspond à l'une des préconisations formulées par le rapport du comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par M. Édouard Balladur. Le droit à l'égalité est un des droits fondamentaux inscrits dans la devise même de la République ; il serait peu compréhensible que l'autorité constitutionnelle en charge de la protection des droits et libertés ne soit pas compétente pour connaître des discriminations et pour promouvoir le principe d'égalité. Ces considérations ont logiquement conduit le Sénat à étendre les compétences du Défenseur des droits aux attributions actuellement exercées par la HALDE, lors du vote du projet de loi organique et du projet de loi qui l'accompagne en première lecture, le 3 juin 2010. De la même manière, la mission de contrôle des conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de liberté entre pleinement dans le champ des attributions du Défenseur des droits. C'est la raison pour laquelle la commission des lois de l'Assemblée nationale a décidé, le 1er décembre dernier, d'inclure les compétences du contrôleur général des lieux de privation de liberté dans le champ d'intervention du Défenseur des droits. Le Défenseur des droits jouira de moyens d'action et d'investigation accrus qui seront très utiles pour l'efficacité de la mission de défense des libertés, de défense des droits de l'enfant et de lutte contre les discriminations : si ses recommandations ne sont pas suivies d'effet, il pourra enjoindre à l'administration de prendre les mesures nécessaires, et le cas échéant publier un rapport spécial si aucune suite n'est donnée. Il pourra saisir le Conseil d'État d'une demande d'avis sur l'interprétation ou la portée d'un texte législatif ou réglementaire. Enfin, pour rassembler les éléments utiles à sa mission, il lui sera possible d'accéder à des locaux même privés, y compris de manière inopinée. Les entraves à son action seront en outre pénalement sanctionnées. Le Gouvernement souhaite naturellement préserver la spécificité et la visibilité des missions exercées par les autorités que remplacera le Défenseur des droits. Ceci se traduit notamment par le fait que le Défenseur des droits sera assisté des adjoints respectivement compétents en matière de déontologie dans le domaine de la sécurité et de lutte contre les discriminations et de promotion de l'égalité et d'un Défenseur des enfants. Cette volonté se traduit également par la création de collèges spécialisés qui éclaireront les décisions que le Défenseur des droits sera amené à prendre. Ainsi, loin de constituer un recul, la création du Défenseur des droits doit permettre de rendre plus claire et plus efficace la défense des droits et des libertés dans notre pays.
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