M. Jean-Claude Fruteau attire l'attention de Mme la ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, chargée de l'outre-mer, sur la réforme de l'administration centrale de l'outre-mer. Selon le rapport n° 8 de la commission des finances du Sénat établi par Monsieur Marc Massion, la réforme de l'administration centrale de l'outre-mer engagée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) offre un bilan plus que contrasté. Rattachée au ministère de l'intérieur, cette direction centrale devait symboliser ce que doit être une administration de mission, à dominante interministérielle, centrée sur l'évaluation et la coordination, et débarrassée des questions annexes de gestion technique et budgétaire. Les deux ex-directions qui préexistaient, celle des affaires politiques administratives et financières (Dapaf) et celle des affaires économiques et culturelles (Daesc) ont fusionné au profit de la délégation générale à l'outre-mer (Dégéom) le 09 juillet 2008 avec le décret n° 2008-687. Or, deux ans après la création de la Dégéom, force est de constater que « l'écart est important entre la théorie et sa mise en oeuvre » comme le souligne le rapport du Sénat. En effet, ce rapport démontre l'existence de défaillances dans la mise en oeuvre de la RGPP qui a été mal préparée et mise en oeuvre de manière « particulièrement brutale ». Il indique également que la notion même d'administration de mission a été abandonnée et le volet interministériel oublié. Si, « sur le plan financier, la réforme est un succès » car elle a permis la production d'économie d'échelle, il en résulte « une administration qui peut difficilement exercer les missions que la RGPP voulait lui confier ». Aussi, pour améliorer la connaissance de l'outre-mer, ce rapport préconise l'achèvement du système d'information décisionnel dans le but de collecter, consolider, modéliser et restituer sous forme de tableaux de bord les données relatives aux programmes et actions outre- mer et de mieux procéder ainsi à l'évaluation des politiques publiques. Il souhaite connaître sa position à ce sujet ainsi que les mesures qu'elle entend mettre en oeuvre pour satisfaire à cette recommandation.
L'administration centrale de l'outre-mer a vécu une période délicate fin 2008 et début 2009 lorsque, avec des effectifs cibles réduits de près de 40 % par rapport aux deux directions préexistantes et encore largement incomplets, elle a dû affronter une charge de travail considérable due notamment aux suites de la crise antillaise de début 2009, à la préparation et au vote de la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM), à la rédaction des textes réglementaires correspondants, au lancement des états généraux de l'outre-mer et à la préparation du comité interministériel de l'outre-mer (CIOM). Mais ces difficultés qui relèvent aujourd'hui du passé auraient été rencontrées par toute autre administration née dans les mêmes circonstances, c'est-à-dire par un large appel à des compétences extérieures. La situation décrite dans le rapport cité par l'honorable parlementaire a fortement évolué depuis la mi-2009 et ne reflète plus la réalité actuelle de la délégation générale à l'outre-mer (DEGEOM). L'effectif total en poste à la DEGEOM n'était que de 126 agents au 15 juin 2009. Aujourd'hui, l'ensemble des postes, c'est-à-dire 138, sont pourvus, y compris des postes qui rencontraient des difficultés soit administratives de recrutement (délais dus aux passages en CAP, écarts de régime indemnitaire), soit techniques (certains profils de postes, notamment au département de l'évaluation des politiques publiques et de la prospective sont très difficiles à pourvoir). L'administration centrale de l'outre-mer est totalement en ordre de marche : ses effectifs correspondent désormais à l'effectif cible. Certains postes de chargés de mission ou de chefs de département ont d'ailleurs été renouvelés, à la faveur de mutations ou de choix d'évolution de carrière des agents, sans que se pose un problème d'attractivité. Le fort renouvellement de l'encadrement supérieur et l'arrivée de fonctionnaires des différents départements ministériels ont été une chance et un ferment de dynamisme qui a permis à la délégation d'accélérer ses connexions avec ces ministères. Ainsi, au sein du service des politiques publiques, 4 chefs de département sur 5 sont issus de ministères avec lesquels ils sont en relation. La DEGEOM est présente et active sur tous les dossiers à enjeu stratégique fort pour les outre-mer : états généraux de l'outre-mer, mise en oeuvre des mesures décidées par le Président de la République suite au CIOM du 6 novembre 2009, évolution institutionnelle des DOM, chantier de la départementalisation de Mayotte. S'agissant de l'évaluation, cette fonction n'existait pas dans l'organisation qui préexistait à la DEGEOM. Le département de l'évaluation des politiques publiques et de la prospective comprend 7 agents dont 6 de catégorie A ou A+, ce qui constitue une unité de bon calibre pour une délégation de 142 agents. Le portefeuille de chaque agent de ce département est déterminé par les problématiques identifiées comme liées à des dispositifs ultra-marins spécifiques et les besoins à couvrir en matière d'évaluation dans les différentes politiques spécifiquement menées outre-mer. Le choix opéré consiste à développer au sein de la DEGEOM une compétence de maîtrise d'ouvrage en évaluation des politiques publiques et non de réalisation d'études. Les tâches associées à cette compétence consistent à élaborer des plans d'évaluation, à les articuler aux priorités de l'action de l'État outre-mer, à définir les opérations d'évaluation de programme, à en piloter la réalisation, à en contrôler la qualité et à en suivre l'utilisation. Les travaux d'évaluation conduits dans ce cadre mobiliseront principalement des compétences externes. Le travail en réseau avec les autres services de l'État (directions des différents ministères, INSEE, organismes spécialisés dans l'évaluation) revêtira une importance centrale. Ainsi, le nombre d'agents dont dispose actuellement le département concerné de la DEGEOM est-il suffisant pour engager une démarche, même ambitieuse, d'évaluation et répondre aux besoins actuellement identifiés. Une telle conception de la fonction évaluation est fréquente aujourd'hui au sein des institutions publiques. C'est ainsi que l'Agence française de développement (AFD), qui intervient sur un champ très vaste, évalue très régulièrement ses interventions et dont la qualité des travaux fait autorité, possède une division de l'évaluation composée de 11 personnes seulement (1 chef de division, 9 évaluateurs et 1 chargé de communication). La DEGEOM élabore actuellement un programme triennal d'évaluation qui sera finalisé en début d'année 2011 et aura pour vocation d'alimenter les travaux de la commission nationale d'évaluation des politiques d'État en outre-mer. Plusieurs projets relatifs au système d'information ont été planifiés au sein de la DEGEOM pour satisfaire au besoin de visibilité de la situation économique, sociale et culturelle de l'outre-mer et permettre un pilotage efficace des politiques publiques. Le module décisionnel de l'observatoire de l'outre-mer (portail statistique et documentaire déjà ouvert en extranet sur l'administration en réseau (ADER), auquel fait référence l'honorable parlementaire sera alimenté par les services centraux de l'outre-mer mais également par les services déconcentrés et les autres ministères concernés. Outil stratégique pour la coordination interministérielle, il devra permettre aux décideurs publics politiques et administratifs d'avoir une vision globale mais aussi analytique des résultats des politiques outre-mer. La demande de financement de ce module décisionnel, présentée à la direction des systèmes d'information et de la communication du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, a été acceptée cette année par celle-ci sur son budget 2011. Les travaux devraient donc être lancés en début d'année 2011.
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