M. Alain Rousset attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la mise en oeuvre de la procédure du dialogue compétitif, telle qu'elle résulte des articles 36 et 37 du code des marchés publics. En tant que président de l'association des régions de France, il avait signé le 18 janvier 2007 la charte du dialogue compétitif, avec entre autres M.Thierry Breton, ancien ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La charte insistait sur l'aspect transparent et non-discriminatoire de cette procédure. Force est de constater qu'au bout de 3 années d'application, la réalité ne correspond pas aux objectifs assignés initialement. En particulier, en matière de travaux de construction, le dialogue compétitif écarte les entreprises moyennes ou de taille intermédiaire et favorise les grandes entreprises du bâtiment. Ceci résulte de l'investissement préalable important nécessaire en moyens complets d'études, disproportionné pour les entreprises moyennes ou intermédiaires au regard du risque important de ne pas obtenir les marchés. Le dialogue compétitif est une solution de facilité pour l'adjudicateur public qui est incité à ne pas engager de réflexion sur les conséquences techniques de la définition de ses propres besoins en la remettant ainsi aux entreprises privées qui vont elles-mêmes mener les travaux. Cela représente un amoindrissement de la capacité de négociation de l'adjudicateur public, et un encouragement aux entreprises à relever leurs prix. Le dialogue compétitif était supposé favoriser la concurrence : il revient à la supprimer en réservant de fait les marchés au cercle restreint des majors du bâtiment. 75 % des investissements publics sont réalisés par les collectivités territoriales et la part des travaux de bâtiment ou d'infrastructures est majeure. Ce sont les finances des collectivités qui sont les premières impactées par cette réduction de la concurrence qui ne peut que favoriser un établissement des prix au-dessus des coûts réels de marché. Les majors du bâtiment assurent qu'ils sous-traiteront une partie de leurs prestations aux entreprises locales. Outre que cela met celles-ci sous la coupe des grandes entreprises, libres de leur dicter leurs conditions de prix, il convient de rappeler que le coût de certains marchés les met à portée de majors du bâtiment dont les sièges ne sont pas en France : le recours à la sous-traitance locale ne fait pas partie de leurs préoccupations. Lors du vote de la loi sur la modernisation de l'économie en 2008, le Gouvernement avait affiché son intention de favoriser l'accès des PME aux marchés publics. Il n'y a eu qu'une timide ouverture, limitée aux marchés de R et D. Peu de marchés et peu de PME sont concernés. Aussi, il serait souhaitable qu'un bilan des procédures menées en dialogue compétitif, mettant en particulier en exergue la complexité réelle des marchés et le type d'entreprise adjudicataire soit établi. La concurrence doit être réinstaurée en réaménageant la procédure de dialogue compétitif pour permettre à l'ensemble des entreprises du bâtiment de concourir valablement. Il semble également important, quatre années après la création de cette procédure, d'en avoir un bilan et de pouvoir évaluer les pistes d'amélioration allant dans le sens d'une plus grande ouverture à la concurrence et en particulier aux PME et entreprises de taille intermédiaire.
La procédure de dialogue compétitif, prévue par les articles 36 et 37 du code des marchés publics, a pour objectif de répondre à une situation de complexité. Le pouvoir adjudicateur ne peut avoir recours à cette procédure que s'il est dans l'incapacité de définir seul et à l'avance les moyens techniques dont il a besoin, ou de mettre en place le montage juridique et financier nécessaire à son projet. Par conséquent, son but premier est de permettre la mise en place de solutions adaptées à des situations particulières et complexes, afin de répondre aux besoins du pouvoir adjudicateur. En ce qui concerne plus particulièrement les marchés publics de travaux, la loi n° 85-704 relative à la maîtrise d'ouvrage publique (MOP) du 12 juillet 1985 interdit, sauf dérogations prévues à son article 18, que les missions de conception et de réalisation d'un ouvrage soient confiées au même opérateur. Par conséquent, le pouvoir adjudicateur passe, dans la majorité des cas, un marché de maîtrise d'oeuvre préalablement à la passation d'un marché public de travaux. La mission de ce maître d'oeuvre étant de définir le projet et donc les moyens techniques à mettre en oeuvre, le recours à la procédure du dialogue compétitif sera d'autant plus rare en matière de travaux. Les PME peuvent bénéficier, dans le cadre de la procédure de dialogue compétitif, de la plupart des mécanismes prévus par le code des marchés publics visant à favoriser l'accès des PME à la commande publique. C'est le cas du dispositif de l'article 51 qui leur permet de candidater en groupement, afin de pouvoir répondre à un marché global ou complexe en mettant en commun leurs compétences et leurs moyens. Dans ce cas, les PME seront cotraitantes et non sous-traitantes. L'article 52-I interdit également au pouvoir adjudicateur de se fonder sur l'absence de références similaires pour écarter la candidature d'une entreprise à un marché public. Ainsi, les PME ne seront pas handicapées pour concourir à une procédure de dialogue compétitif au motif que ce sont de jeunes entreprises. De même, l'article 67-X prévoit la possibilité pour le pouvoir adjudicateur de verser une prime aux participants à une procédure de dialogue compétitif, ce qui permet d'encourager la participation de PME dont les études menées pour participer à la procédure seront en partie remboursées, même si l'entreprise n'est finalement pas attributaire du marché. Dans la même perspective, l'article 98 a raccourci les délais de paiements à trente jours pour toutes les collectivités publiques, à l'exception des établissements de santé. Cette mesure permet de ne pas handicaper les PME dont la trésorerie est plus fragile. De même, en ce qui concerne le paiement des acomptes, l'article 91 ramène la périodicité du versement à un mois pour les PME. Enfin, le dispositif concernant la cession de créance prévu par les articles 106 à 110 permet aux PME d'obtenir plus facilement un financement afin d'être en mesure de réaliser les investissements nécessaires à l'exécution d'un marché public.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.