M. Bernard Perrut appelle l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État sur les inquiétudes qu'éprouvent certaines collectivités locales devant l'absence des compensations intégrales des charges de l'État qui leur avaient été annoncées. En effet ces collectivités voient augmenter leurs charges dans le même temps que diminuent leurs ressources. Il lui, demande dans quel délai doivent être réalisés les transferts qui leur permettront de faire face à leurs difficultés.
La compensation des transferts de compétences obéit depuis 1983 au principe de la neutralité budgétaire : les transferts de compétences vers les collectivités territoriales doivent s'accompagner de l'attribution de ressources équivalentes aux dépenses consacrées, à la date du transfert, par l'État à l'exercice des compétences transférées (art. L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales - CGCT). Ce principe a été érigé en principe constitutionnel à l'occasion de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, au sein de l'article 72-2 de la Constitution, lequel dispose que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice » (4e alinéa). La compensation financière est ainsi : intégrale : par l'affectation de ressources équivalentes au « coût historique » supporté par l'État à l'euro près ; pour assurer le respect de ce principe, la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (LRL) encadre les périodes de référence selon la nature de la dépense : les dépenses de fonctionnement sont évaluées à partir de la moyenne actualisée des dépenses consacrées par l'État au cours des trois dernières années précédant le transfert, tandis qu'une période d'au moins cinq ans est considérée pour la compensation des dépenses d'investissement ; concomitante : une inscription de la compensation provisionnelle intervient dans la loi de finances initiale de l'année du transfert de compétences ; cette compensation est ajustée au regard des données définitives en loi de finances rectificative et devient définitive ; contrôlée, via l'avis consultatif mais obligatoire de la commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) sur le projet d'arrêté interministériel constatant le montant du droit à compensation, en application des articles L. 1614-3 et R. 1212-5 du CGCT ; conforme à l'objectif d'autonomie financière inscrit dans la Constitution (par l'attribution de ressources de nature fiscale notamment). En outre, cette compensation est garantie. En effet, elle ne doit pas se dégrader dans le temps et dans l'hypothèse où tel serait le cas il appartient à l'État de maintenir un niveau de ressources équivalent à celui qu'il consacrait à l'exercice de cette compétence avant son transfert (considérant n° 23 de la décision n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003). La compensation des transferts de compétences est donc à la fois intégrale et durable (elle est dite « pérenne »), même si l'article 72-2 de la Constitution n'impose pas une compensation réévaluée dans le temps en fonction du coût d'exercice des charges transférées (décisions du Conseil constitutionnel n° 2003-487 DC du 18 décembre 2003 et n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003). En matière de création et d'extension de compétences, aucune obligation de compensation intégrale des charges ne pèse sur l'État, qui doit néanmoins les « accompagner de ressources déterminées par la loi » (art. 72-2 de la Constitution). Le législateur dispose ainsi d'un pouvoir d'appréciation sur le montant des financements attribués, sous réserve de ne pas dénaturer le principe de libre administration des collectivités territoriales (décision n° 2004 DC du 13 janvier 2005). Comme plusieurs rapports parlementaires l'ont souligné, et notamment celui relatif à la compensation des transferts de compétences récemment soutenu par les sénateurs Yves Krattinger et Roland du Luart dans le cadre des travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, l'État a toujours veillé, sous le contrôle de la CCEC, à respecter ses obligations constitutionnelles en matière de compensation des transferts, créations ou extensions de compétences. En outre, sans considérer l'ensemble des compensations versées au titre de l'acte I de la décentralisation, le montant des compensations versées aux collectivités territoriales au titre de la décentralisation s'élève à plus de 18,5 MdEUR en 2010, qui se décomposent en plusieurs sous-ensembles : les transferts de fiscalité de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance (TSCA) et de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) au titre de la loi LRL du 13 août 2004 pour près de 6 MdEUR (5,968 MdEUR) ; la dotation générale de décentralisation (DGD) de droit commun qui s'élève à 1,5 MdEUR et est complétée par la DGD formation professionnelle (1,7 MdEUR) servie aux régions ; les prélèvements sur recettes au titre de la dotation régionale d'équipement scolaire et de la dotation départementale d'équipement des collèges, soit 1,1 MdEUR ; la compensation revenu minimum d'insertion/revenu de solidarité active (RMI/RSA), sous forme de TIPP, qui s'élève à plus de 6 MdEUR ; s'y ajoute enfin, au titre de la solidarité, les contributions versées par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) au titre des concours allocation personnalisée d'autonomie (APA), prestation de compensation du handicap (PCH) et maison départementale des personnes handicapées (MDPH), à hauteur de 2,1 MdEUR. La loi de finances initiale pour 2011 abonde certains de ces montants, notamment en compensation des transferts de services encore en cours, portant notamment les transferts de fiscalité (TSCA et TIPP) au titre de la loi LRL à 5,999 MdEUR. Par ailleurs, conformément au cinquième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales. En effet, en sus de la stricte application du droit de la compensation financière précité, des systèmes de péréquation ont été introduits dans certains des concours financiers de l'État aux collectivités, de nature à atténuer la « cristallisation » des droits à compensation et à promouvoir une certaine équité. C'est le cas, notamment, de la dotation globale de fonctionnement (DGF), des concours APA et PCH et du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI).
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