M. Jean-Jacques Urvoas attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur le rôle et la fonction d'éditeur. La partie du code de la propriété intellectuelle qui définit le contrat d'édition, les droits et les obligations des auteurs des oeuvres de l'esprit et de leurs éditeurs a été rédigée dans les années 50. Le métier d'éditeur n'a aujourd'hui plus grand-chose à voir avec ce qu'il a pu être il y a quelques années et évidemment il y a quelques décennies. La disparition quasi totale du graphique dans le domaine de l'édition musicale et l'arrivée du numérique dans les modes de diffusion de l'écrit bouleversent totalement les liens qui peuvent exister entre un auteur et un éditeur. Le SNAC (Syndicat national des auteurs et des compositeurs) s'interroge : comment évaluer l'exploitation permanente et suivie d'une oeuvre au format numérique ? La simple mise à disposition de celle-ci dans un fichier présent sur un réseau Internet ou équivalent sera-t-elle suffisante pour permettre à l'éditeur de satisfaire cette obligation ? À partir de quand une oeuvre, dans son format numérique, sera-t-elle considérée comme épuisée ? Quel contrôle l'auteur d'une oeuvre aura-t-il sur les ajouts éventuels à son oeuvre (images, éléments visuels ou sonores, liens hypertextes, bannières publicitaires) si faciles à faire dans le monde numérique ? Que se passera-t-il pour la rémunération proportionnelle de l'auteur s'il n'y a plus de prix de vente ou de recettes spécifiques à l'exploitation de l'oeuvre elle-même ? Il lui demande donc les mesures que le Gouvernement entend prendre face à toutes ces questions auxquelles la loi devrait pouvoir répondre.
Contrairement au droit commun des contrats et au principe de liberté contractuelle qui prévaut en droit français, le législateur a voulu en 1957 faire respecter un certain équilibre entre les auteurs et leurs éditeurs en prévoyant qu'un certain nombre de dispositions d'ordre public relatives aux droits et aux obligations des parties doivent figurer dans le contrat d'édition. Ce cadre légal particulièrement protecteur des auteurs pose les principes généraux qui doivent guider les relations contractuelles entre auteurs et éditeurs. Ces principes sont toujours d'actualité et doivent conduire tout particulièrement l'éditeur à associer le plus justement possible l'auteur aux fruits tirés de l'exploitation de son oeuvre, à respecter son obligation d'exploitation de l'oeuvre afin de lui donner toutes ses chances de succès auprès du public et à respecter l'intégrité de l'oeuvre. Ces principes sont adaptables aux évolutions technologiques par le simple fait d'ajustements des pratiques contractuelles existantes. Il serait prématuré de faire évoluer ce cadre légal sans avoir de connaissance précise des modèles économiques qui caractériseront l'exploitation du livre numérique. En revanche, les usages professionnels doivent évoluer pour tenir compte des particularités de l'exploitation numérique, dans le respect des principes défendus par le législateur en 1957. Ainsi que viennent de l'annoncer les organismes représentatifs des intérêts des auteurs et des éditeurs, des discussions relatives aux modalités de cession des droits numériques, associant le conseil permanent des écrivains et le Syndicat national de l'édition, doivent s'engager dans les toutes prochaines semaines. Le ministère de la culture et de la communication, qui souhaite laisser sa chance à la négociation interprofessionnelle, sera attentif au déroulement de ces échanges qui devraient permettre d'encadrer de manière équilibrée les usages contractuels concernant l'exploitation numérique des oeuvres.
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