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Alain Cousin
Question N° 91643 au Ministère du Commerce


Question soumise le 26 octobre 2010

M. Alain Cousin attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation sur le statut de l'auto-entrepreneur. Comme souvent lorsqu'une innovation est confrontée à la réalité quotidienne de l'économie, ce nouveau régime voit apparaître, depuis plusieurs mois, certaines dérives. En effet, l'absence d'obligation de s'inscrire au registre des métiers dans le cas d'activités complémentaires, notamment le bâtiment par exemple, a vu apparaître des situations délicates où certains salariés, en dehors de leurs heures de travail, effectuent des travaux sur le secteur géographique de l'entreprise qui les emploie, avec bien évidemment une tentation « d'utiliser » le fichier client de leur employeur. Le texte actuel prévoit bien des règles de respect de la concurrence en suggérant fortement d'informer son patron, mais faire appliquer ces consignes s'avère à l'usage très difficile dans la mesure où leur mise en oeuvre concrète repose sur l'interprétation souveraine des tribunaux. Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour mieux encadrer ce statut.

Réponse émise le 27 décembre 2011

Le régime de l'auto-entrepreneur, par définition, constitue un simple régime (simplifié) de déclaration et de paiement des cotisations sociales. En aucun cas, il ne saurait remettre en cause l'application des règles générales, prévues notamment par le droit du travail et, plus largement, le droit civil. À cet égard, il importe de rappeler que, selon l'article 1134 du code civil, les conventions doivent être exécutées de bonne foi, ce qui met à la charge du salarié et de l'employeur une obligation générale de loyauté. Cette obligation débute dès la signature du contrat de travail et continue durant toute son existence. Le salarié a donc, en principe, l'interdiction d'exercer toute activité concurrente de celle de l'employeur pour son propre compte, y compris en tant qu'auto-entrepreneur. À défaut d'accord exprès de l'employeur, il prend le risque de se voir licencier pour faute grave (Cass. Soc., 2 décembre 1997). La jurisprudence retient l'utilisation du fichier des clients de l'employeur comme exemple, parmi de nombreux autres, de concurrence déloyale d'un salarié. Même en l'absence d'une clause de non-concurrence dans le contrat de travail, le salarié ne peut exercer une activité identique ou similaire à celle de son ancien employeur dans des conditions déloyales, après la rupture du contrat. Ces règles s'appliquent à tout salarié (ou ex-salarié), y compris à celui qui souhaite démarrer une auto-entreprise. Par ailleurs, le régime de l'auto-entrepreneur n'a nullement été conçu pour couvrir l'externalisation abusive de salariés ou le recrutement de faux indépendants. Les pouvoirs publics sont fortement mobilisés sur cette question. Le Gouvernement a clairement indiqué qu'il souhaitait renforcer l'information sur le caractère illégal et les risques de toute pratique visant à dissimuler une relation salariale de subordination sous la forme d'une relation commerciale de sous-traitance, et que des contrôles soient effectués par les différents services concernés (inspection du travail, URSSAF, services fiscaux) afin de vérifier le respect du droit rappelé ci-dessus. À ce jour, sous l'égide de la délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) et de l'ACOSS, plus de 1 500 contrôles sur la situation d'auto-entrepreneurs ont été effectués au niveau national, auxquels il convient d'ajouter 1 000 contrôles réalisés par l'URSSAF de Paris, ainsi que des enquêtes plus ciblées, qui peuvent être réalisées à l'occasion de contrôles inopinés ou de signalements par l'inspection du travail, les services fiscaux, la police ou la gendarmerie. Un premier bilan de ces contrôles est en cours de réalisation et devrait être disponible début 2012. Les services de contrôle vont, bien évidemment, poursuivre ces opérations dans le cadre du programme de lutte contre la fraude. En tout état de cause, les enquêtes menées auprès des auto-entrepreneurs et des entreprises « classiques », réalisées dans le cadre d'un rapport d'évaluation effectué à la demande du Gouvernement et rendu public le 14 octobre 2010, montrent que les pratiques d'externalisation imposée à un auto-entrepreneur sont tout à fait marginales : elles ne concerneraient que 1 % à 2 % des auto-entrepreneurs. Quant au frein à la création d'emplois dans les entreprises « classiques », celles-ci préférant, au lieu d'embauches supplémentaires, recourir à la sous-traitance auprès des auto-entrepreneurs, il apparaît limité. En effet, selon les mêmes enquêtes, moins de 10 % des entreprises ont recours à la sous-traitance auprès des auto-entrepreneurs et il ne s'agit, dans la majorité des cas, que de pallier des pics d'activité ou bien des absences ou congés de salariés. Le régime de l'auto-entrepreneur permet en revanche de faire rentrer certains travailleurs dits « dissimulés » dans une zone de droit. C'est un régime qui diminue l'étendue de l'économie souterraine et permet ainsi à des gens qui travaillaient illégalement de rentrer dans un cadre légal et de payer leurs cotisations.

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