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Jean-Michel Villaumé
Question N° 91472 au Ministère des Transports


Question soumise le 19 octobre 2010

M. Jean-Michel Villaumé attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des transports sur la privatisation des autoroutes. Alors que les fameux chassés-croisés des week-ends estivaux viennent de s'achever, les millions d'automobilistes qui font leurs comptes sur la route des vacances savent qu'en empruntant les autoroutes, ils dépensent souvent autant au péage qu'à la pompe. Et ces encombrements autoroutiers font des heureux puisque les sociétés d'autoroute qui exploitent depuis cinq ans le réseau français espèrent cette année des nouveaux records de profits. Un bon week-end de vacances rapporte près de 100 millions d'euros aux compagnies qui se partagent le marché et le magot autoroutier. Les péages sont une affaire très rentable et sont la parabole exemplaire d'une privatisation qui n'a profité ni aux automobilistes ni à l'État. Le système de tarification, opaque et compliqué, garantit aux sociétés d'autoroutes des revenus élevés. En théorie, tout est sous contrôle. Les hausses doivent être validées par les services de l'État et les sociétés d'autoroute n'ont pas le droit d'augmenter leurs prix de plus de 70 % ou 85 % de l'inflation. Les tarifs des péages devraient d'ailleurs évoluer moins vite que les prix à la consommation hors hausses additionnelles au titre des investissements comme travaux de mises aux normes et les élargissements. Dans un rapport très sévère publié en 2008, la Cour des comptes a observé que ces hausses étaient néanmoins « mal étayées » et que leur « justification est invérifiable ». L'institution révélait également la pratique pernicieuse du « foisonnement » qui consiste à concentrer les hausses les plus fortes sur les tronçons les plus fréquentés expliquant comment les sociétés autoroutières contournaient les règlements des concessions pour trafiquer les péages avec un système de tarifs aussi opaque que sophistiqué. « Si bien que les recettes tirées des péages croissent plus rapidement que les hausses accordées et sont supérieures [...] aux tarifs moyens affichés », écrivaient les magistrats. En dépit de contrats de concession en théorie bien verrouillés et d'une politique tarifaire placée sous contrôle de l'État, les prix des autoroutes ont donc considérablement augmenté ces dernières années. Les sociétés concessionnaires n'ont jamais distribué autant de dividendes à leurs actionnaires et les automobilistes n'ont jamais payé aussi cher. 1,29 milliard d'euros, c'est le bénéfice net cumulé des groupes ASF, APRR et Cofiroute en 2009, soit + 2,4 % sur un an. Montrées du doigt, certaines sociétés ont mis un peu d'ordre dans leur grille tarifaire, tout en restant des machines à cash sans limitation de vitesse ! Selon des chiffres du ministère de l'écologie, les sociétés d'autoroute ont augmenté leurs tarifs dans une fourchette de 9,76 % à 18,18 % entre 2004 (année qui a précédé la décision de les privatiser) et 2010. C'est beaucoup plus que l'inflation constatée par l'INSEE (+ 9,91 %) pendant la même période. Les sociétés d'autoroutes déclament alors un argumentaire sur mesure pour justifier les hausses : travaux très coûteux, remise aux normes et d'autres investissements... Dans tous les cas, ces constats marquent l'échec de la privatisation. Le rapport de la Cour des comptes a mis la pression sur les services de l'État qui s'étaient montrés laxistes et sifflé la fin de la récréation. L'État a donc demandé aux sociétés de s'amender mais la vigilance doit rester de mise. Les autoroutes françaises restent les plus chères d'Europe alors que la vente des concessions d'autoroutes en 2006, toujours selon la Cour des comptes, aurait dû rapporter à l'État non pas 14,8 milliards d'euros mais 24 milliards d'euros ! Preuve est faite que l'État n'a pas gagné grand-chose en privatisant et que, surtout, il a manqué de rigueur et de volonté politique pour contrôler les petits futés des péages, au grand dam des automobilistes-contribuables. Il lui demande donc quelles sont les mesures qu'il entend prendre pour garantir une vraie transparence dans la fixation des tarifs des péages autoroutiers, et de lui faire connaître les améliorations que le Gouvernement entend apporter au fonctionnement du Comité des usagers du réseau routier afin que ses recommandations soient appliquées dans l'intérêt des automobilistes.

Réponse émise le 16 novembre 2010

Une concession autoroutière est un contrat de délégation de service public par lequel l'État confie à une entreprise la construction, l'entretien et l'exploitation d'une autoroute en contrepartie d'un péage. Il s'agit d'un contrat de longue durée car les investissements initiaux et complémentaires consentis par les concessionnaires sont importants et nécessitent d'être amortis sur plusieurs dizaines d'années, comme les emprunts servant à les financer. La fixation des tarifs des péages est prévue par le contrat de concession validé par décret en Conseil d'État, qui a valeur de règlement. Chaque tarif proposé par une société concessionnaire en application de son contrat fait l'objet d'un contrôle minutieux par les services de l'État afin de faire respecter les termes des contrats de concession. Les hausses sont donc extrêmement encadrées et ont été particulièrement faibles en 2010. Lorsque des modulations de tarifs existent, elles sont prévues par les contrats et sont également strictement encadrées, obéissant à des motifs d'intérêt public. Elles ne doivent générer aucune recette supplémentaire pour la société concessionnaire. Pour répondre à une demande de plus grande transparence de la part de la Cour des comptes, un comité des usagers du réseau routier national a par ailleurs été créé fin 2009. Ce comité recueille les attentes des usagers de ce réseau, formule des propositions ainsi que des pistes d'améliorations du service rendu et émet des recommandations sur les tarifs appliqués sur le réseau autoroutier concédé. Les augmentations tarifaires pour 2010 ont, à ce titre, fait l'objet en février dernier d'une présentation au comité. Chaque membre a pu s'exprimer sur ce sujet. Le comité a recommandé d'anticiper, pour les tarifs 2011, le processus d'information sur les hausses tarifaires. L'État mettra tout en oeuvre pour satisfaire cette demande. Le comité des usagers a ainsi pleinement vocation à jouer un rôle actif dans les questions touchant au réseau routier national, parmi lesquelles celle des tarifs tient une place importante.

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