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Jean-Paul Bacquet
Question N° 90984 au Ministère de la Santé


Question soumise le 19 octobre 2010

M. Jean-Paul Bacquet attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur l'avenir de la prévention et de l'accès aux soins des populations immigrantes ou étrangères dans notre pays. Alors que le futur plan national de lutte contre le VIH et les IST est censé comporter une partie thématique sur la prévention et l'accès aux soins des populations immigrantes ou étrangères, un amendement de M. Thierry Mariani au projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité vient considérablement restreindre le droit de séjour pour les étrangers gravement malades. En 1997, la loi Debré a intégré dans la législation française la protection des étrangers gravement malades contre l'éloignement du territoire. L'année suivante, la loi Chevènement renforçait cette protection grâce à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire. Ce droit au séjour est conditionné au fait que l'étranger, gravement malade, vivant en France « ne puisse effectivement bénéficier du traitement approprié dans son pays d'origine ». L'esprit de la loi, rappelé le 7 avril 2010 par le Conseil d'État, est donc de faire en sorte qu'un étranger gravement malade et sans accès effectif aux soins dans son pays d'origine soit protégé de l'expulsion et puisse avoir accès aux soins en France dans des conditions de vie stable pour éviter la mort prématurée ou la survenue de graves complications ou de handicaps dans un pays où il ne pourrait pas être soigné. Une lecture de la loi conforme à son texte et à son esprit ne saurait donc être qualifiée d'interprétation et « très généreuse » comme cela est écrit dans l'exposé des motifs de l'amendement. Ainsi, l'amendement de M. Mariani vient introduire une subtile nuance de la « disponibilité dans le pays » et transforme la condition de « non-accès effectif au traitement approprié dans le pays d'origine de l'étranger » en seule « inexistence du traitement approprié ». Cette nouvelle définition ne prend donc pas en compte la quantité de traitement accessible dans le pays d'origine, ni leur coût, ni même la qualité du système sanitaire. On peut en conclure que, dès lors qu'un laboratoire distribuera quelques médicaments dans la capitale, même s'ils sont hors de prix et qu'il n'y en aura pas assez pour tout le monde, le titre de séjour sera refusé. De même, les personnes malades qui ont actuellement une carte de séjour pourront aussi se voir opposer un refus de renouvellement. En outre, il semble primordial de rappeler que l'interruption du traitement (par exemple dans les cas de VIH mais pas seulement) conduit à terme à une issue fatale (véritable peine de mort décidée pour des raisons administratives) et entraîne aussi dans certains cas le risque de développement de souches virales résistantes qu'il y a tout lieu d'éviter tant dans l'intérêt de la personne elle-même que d'un point de vue de santé publique dans le pays concerné. Par conséquent, refuser le droit au séjour à des étrangers gravement malades qui vivent en France au motif que le traitement requis par leur état de santé « existe » dans leur pays d'origine (sans vérifier l'accès effectif) pourra conduire soit à des cas où certaines personnes repartiront ou seront renvoyées dans leur pays d'origine malgré le risque d'une mort à plus ou moins brève échéance : la responsabilité de la France serait alors engagée, à la fois directement (peines ou traitements inhumains ou dégradants) et plus globalement en matière de désengagement dans la lutte contre les pandémies, notamment l'infection à VIH, la tuberculose et les hépatites virales, soit d'autres personnes resteront en France en situation de très grande précarité, dépendantes des aides caritatives, sans possibilité d'autonomie professionnelle, dans une situation d'insécurité administrative préjudiciable à un suivi médical de qualité. Le non-recours aux soins et la prise en charge tardive auront pour conséquences des complications et surcoûts hospitaliers, en contradiction totale avec les programmes et objectifs de santé publique pour la prévention et le dépistage précoce en matière de VIH, des hépatites, des cancers, des diabètes. Si de nombreuses associations se félicitent de l'annonce d'un plan national qui propose un vrai changement de paradigme en termes de prévention et de dépistage, les satisfactions auront été de courte durée face à cette nouvelle mesure dont les répercussions dramatiques sont inévitables. Il lui demande donc d'indiquer si elle entend intervenir pour empêcher le maintien de cette disposition dans notre législation.

Réponse

Cette question n'a pas encore de réponse.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

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