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François Brottes
Question N° 90058 au Ministère de la Défense


Question soumise le 5 octobre 2010

M. François Brottes attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants sur les conséquences du décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du nord. Ce décret fait suite à l'arrêt du Conseil d'État n° 328282 du 17 mars 2010 enjoignant au ministre de la défense et au ministre du budget, de prendre, dans un délai de quatre mois (sous astreinte de 500 euros par jour de retard) les dispositions réglementaires permettant l'attribution du bénéfice de la campagne double aux titulaires de pensions civiles et militaires ayant participé à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc et accompli à ce titre des services militaires en opérations de guerre, en fonction de la nature et de la durée de ces services, conformément à l'article R. 19 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Or le décret pris en date du 29 juillet 2010, sur le rapport du ministre de la défense, fixe des conditions d'application tellement étroites qu'elles excluent en pratique la quasi-totalité des combattants d'Afrique du nord. Ainsi, ce décret édicte en son article 3 que seules les pensions liquidées à compter du 19 octobre 1999 (date de la loi n° 99-882 reconnaissant « la guerre » d'Algérie) pourront être révisées. Cette date de référence ne se justifie par aucun élément de droit objectif, vide le texte de ses effets et rend de fait impossible l'attribution de la campagne double aux blessés de guerre. L'article 2 prévoit quant à lui que le bénéfice de la campagne double est accordé « pour toute journée durant laquelle les appelés et les militaires désignés à l'article 1er ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu ». Ces faits doivent être démontrés par les archives collectives de l'unité, ce qui, dans bien des cas, est extrêmement difficile voire impossible. Les associations d'anciens combattants d'Afrique du nord ont signifié leur indignation, estimant être traitées « d'une manière inqualifiable et sans précédent ». Toutes ces restrictions n'aboutissent en effet qu'à restreindre au maximum l'accès au bénéfice de ces nouveaux droits. Il lui demande donc le retrait de ce décret, et l'adoption d'un nouveau texte fixant des conditions équitables au bénéfice réel des pensionnés.

Réponse émise le 1er mars 2011

Les bénéfices de campagne constituent une bonification d'ancienneté prévue par le code des pensions civiles et militaires de retraite. Ce sont des avantages particuliers accordés aux militaires, et sous certaines conditions aux fonctionnaires civils. L'attribution de la campagne double signifie que chaque jour de service effectué par le militaire est compté pour trois jours dans le calcul de sa pension. La loi du 18 octobre 1999 a substitué à l'expression « aux opérations effectuées en Afrique du Nord » l'expression « à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc », qualifiant le conflit en Algérie de « guerre ». Elle a ainsi créé une situation juridique nouvelle. Il en a découlé que les personnes exposées à des situations de combat au cours de la guerre d'Algérie étaient susceptibles de bénéficier de la campagne double. Cela a été confirmé par le Conseil d'État dans sa décision du 17 mars 2010. Le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord accorde ce droit aux militaires d'active et aux appelés pour toute journée durant laquelle ils ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu et s'applique aux fonctionnaires et assimilés dont les pensions de retraite ont été liquidées à compter du 19 octobre 1999, date d'entrée en vigueur de la loi. Ces pensions sont révisées à compter de la demande des intéressés, déposée postérieurement à la date d'entrée en vigueur du décret du 29 juillet 2010, auprès des services de l'administration qui a procédé à la liquidation de la pension de retraite. Elles n'ouvrent droit à aucun intérêt de retard. Cette mesure ne peut s'appliquer aux pensions liquidées antérieurement au 19 octobre 1999, puisque ce n'est qu'à compter de cette date qu'a été reconnu officiellement l'état de guerre en Algérie, qui seul permet l'attribution de la campagne double. Le Gouvernement a décidé que le décret du 29 juillet 2010 serait applicable à compter du 19 octobre 1999, ce qui donne toute son effectivité à la loi du 18 octobre 1999 dans le respect du principe de non-rétroactivité des lois. Il ne peut réglementairement aller plus loin. S'agissant des actions de feu ou de combat, le Conseil d'État, dans son avis du 30 novembre 2006, a estimé que la campagne double ne devait pas être accordée à raison du stationnement de l'intéressé en Afrique du Nord, mais devait l'être au titre des « situations de combat » que le militaire a subies ou auxquelles il a pris part. Aussi a-t-il considéré qu'il revenait aux ministres respectivement chargés des anciens combattants et du budget de « définir les circonstances de temps et de lieu » des situations de combat ouvrant droit au bénéfice de la bonification de campagne double. Or, il n'existe pas de définition juridique de la situation de combat. En revanche, pour les anciens combattants, qui ne peuvent se prévaloir des quatre-vingt-dix jours réglementaires de présence en unité combattante, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre prévoit notamment en son article R. 224 que la carte du combattant est délivrée pour la participation « à des actions de feu ou de combat ». Ainsi le Gouvernement a décidé que la campagne double serait accordée pour chaque journée « durant laquelle les combattants ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu ». Pour toute la journée durant laquelle l'intéressé a été exposé à une situation de feu ou de combat, il bénéficie de deux jours de bonification. Le Gouvernement a opté pour une solution objective, un critère reconnu, clair et opérant. La seule référence à une situation de combat, sans autre précision, aurait été difficile à établir, alors que la notion d'exposition à des actions de feu ou de combat a déjà reçu une définition éprouvée et les archives en portent trace. Par le choix de ce critère, le Gouvernement a souhaité rendre effectif plus rapidement le droit acquis à la campagne double. Enfin, le décret du 29 juillet 2010 ne remet pas en cause la situation des blessés de guerre puisqu'ils bénéficient déjà de la double campagne en application des dispositions de l'article R. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite qui n'a pas été modifié.

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