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Patrick Braouezec
Question N° 8973 au Ministère des Affaires étrangères


Question soumise le 30 octobre 2007

M. Patrick Braouezec attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur le rôle de la France au sein de l'Alliance atlantique. Dès 1991, après la chute du mur de Berlin, on a vu se mettre en place une relégitimation de l'OTAN. Depuis, au-delà de sa relégitimation et de son élargissement à l'Europe centrale et orientale, le dessein principal des partisans d'une défense atlantiste est de définir un « nouveau concept stratégique » pour l'OTAN. Ce concept, adopté en 1999 lors du sommet du cinquantenaire précise, paragraphe 56, sa nature et son objectif : « La sécurité de l'Alliance doit s'envisager dans un contexte global... Les forces de l'Alliance peuvent être appelées à opérer au-delà des frontières de la zone de l'OTAN. » Ainsi s'opère un changement de cadre, la mission de l'OTAN, jusqu'ici organisme de défense régionale, est d'être le bras armé de la mondialisation. Tout est dit, pour le Président de la République, la France doit prendre « toute sa place » au sein de l'Alliance atlantique : l'objectif est bien la pleine intégration de la France à une Alliance atlantique globalisée et son plein engagement. Or l'OTAN est devenue un élément essentiel du réseau d'organisations mis en place par les grandes puissances qui décident de la guerre et de la paix, des choix politiques et économiques, du respect ou non des droits humains ou syndicaux, de la survie de la planète. L'Alliance atlantique, qualifiée de « symbole d'une identité occidentale », constitue dans le domaine politico-militaire, comme le sont le Conseil de sécurité, le G 8 ou le groupe de la Banque mondiale, dans les domaines politique, économique et financier, un directoire où les puissances imposent leurs visées hégémoniques et le maintien du nouvel ordre social mondial. Présentée comme une « arme de démocratisation massive », l'OTAN est l'organisation la moins démocratique qui soit, les décisions du Shape, son commandement militaire, comme celles du Conseil de l'Atlantique Nord, sa direction politique responsable des plans de défense et des plans nucléaires, sont couvertes par le « secret défense ». Plus que tout autre directoire, l'Alliance atlantique fonctionne hors de tout contrôle parlementaire et citoyen. Lieu de pouvoir souverain, elle agit à l'encontre de l'idée de démocratie. En conséquence, il lui demande ce que le Gouvernement compte faire pour certifier que la France ne participera pas à l'imposition de ce nouvel ordre militaire et financier mondial, et que, par ailleurs, elle respectera ses engagements au regard de l'ensemble de ses obligations, afin de ne porter atteinte ni aux droits humains ni aux valeurs de la démocratie.

Réponse émise le 12 février 2008

Depuis la fin de la guerre froide, l'OTAN a engagé un processus de transformation profonde de ses structures et de sa composition. Fondée sur le principe de la « porte ouverte » (article 10 du traité de l'Atlantique Nord), l'OTAN s'est élargie à l'est du continent européen et compte aujourd'hui 26 membres. La décision est prise sur la base d'un consensus, après discussions et consultations entre les pays membres, et représente à ce titre l'expression de la volonté collective des États souverains membres de l'Alliance. Engagée sur de multiples théâtres, l'OTAN est également le garant de notre sécurité collective. Parallèlement, l'Alliance atlantique s'est engagée dans un processus de transformation pour tenir compte de la disparition de la menace permanente que constituait le pacte de Varsovie et prendre en charge des opérations de gestion de crise, y compris au-delà de la seule zone couverte par les engagements de défense collective. Dans les années 1990, le dispositif allié conçu pour un affrontement conventionnel de grande envergure en Europe a été démantelé, avec le retrait des corps armés qui étaient stationnés le long du « rideau de fer », l'allègement de la structure de commandement, et la redéfinition du rôle de l'Alliance dans les concepts stratégiques de 1991 et 1999. La transformation des deux commandements stratégiques a été décidée au sommet de Prague en 2002. Le commandement des opérations alliées (ACO), localisé à Mons, est responsable de la planification et du suivi de la conduite de l'ensemble des opérations de l'Alliance. Le commandement allié « transformation » (ACT), localisé à Norfolk, est chargé de la transformation des capacités militaires de l'OTAN. La structure de commandement de l'OTAN a été progressivement allégée, pour être articulée autour de trois commandements interarmées de niveau opératif (Naples, Brunssum, Lisbonne). L'adaptation de l'OTAN est également le fruit des leçons tirées lors de nos opérations, principalement au Kosovo et en Afghanistan. Pour la modernisation de la structure des forces, la principale décision a été la création en 2002 de la force de réaction rapide de l'OTAN (NRF), force expéditionnaire de 25 000 hommes robuste déployable sous court préavis et capable d'effectuer des missions d'entrée en premier. Dès sa création, la France a décidé de participer pleinement aux tours d'alerte de cette force, catalyseur de la transformation pour les armées européennes. Membre fondateur de l'Alliance atlantique, la France est l'un des contributeurs essentiels aux activités de l'OTAN. Depuis la fin de la guerre froide, la France est de manière constante l'un des premiers contributeurs en troupes dans les opérations de l'OTAN, avec un haut niveau de qualité et disponibilité de nos forces : Kosovo, 2 000 hommes, 3e contributeur, commandement de la KFOR de septembre 2007 septembre 2008 ; Afghanistan (FIAS) : 1 100 hommes, 7e contributeur. Comme le sait l'honorable parlementaire, le président de la République a défini un certain nombre d'orientations pour la politique de la France envers l'OTAN et en matière de PESD. Opposer l'Union à l'OTAN n'a aucun sens parce que la France a besoin des deux organisations. S'agissant de l'Europe de la Défense, il est dans l'intérêt bien compris des États-Unis que l'Union européenne rassemble ses forces, rationalise ses capacités, organise sa propre défense de façon indépendante. Dans la perspective de la présidence française de l'Union européenne au second semestre 2008, il faut progresser vers cet objectif avec pragmatisme et ambition, avec pour préoccupation la sécurité de la France et de l'Europe. Plus de dix ans après la fondation de la politique européenne de sécurité et de défense (FESD) et alors que celle-ci est devenue opérationnelle, il s'agit de rendre les outils de notre sécurité plus efficaces et plus opérationnels face aux crises. L'Union européenne progresse en ce sens. Ainsi, mandatée par le Conseil de sécurité des Nations unies, l'Union européenne lancera fin janvier 2008 l'opération EUFOR Tchad/RCA qui a vocation à assurer la sécurité des populations civiles qui souffrent à l'est du Tchad et au nord-est de la RCA, dans le contexte de la crise du Darfour. Une vingtaine de pays européens participeront à cette nouvelle opération militaire, placée sous le commandement du général Nash, de nationalité irlandaise. Rénover l'Alliance et sa relation avec la France, renforcer l'Europe de la défense sont deux mouvements complémentaires. La France, membre fondateur de notre Alliance et qui est déjà l'un de ses premiers contributeurs, doit prendre toute sa place dans l'effort de rénovation de ses instruments et de ses moyens d'action, et faire évoluer dans ce contexte sa relation avec l'Alliance en parallèle avec l'évolution et le renforcement de l'Europe de la défense. Les deux vont ensemble. Une Europe de la défense indépendante et une organisation atlantique où nous prendrions toute notre place.

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