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Max Roustan
Question N° 89666 au Ministère du Logement


Question soumise le 5 octobre 2010

M. Max Roustan attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme sur un arrêt de la Cour de cassation en date du 10 novembre 2009, qui supprime la récupération du « R2 » dans les charges des locataires, c'est-à-dire l'entretien, pour les réseaux de chaleur. En 1974, la Cour de cassation avait considéré que le propriétaire, en achetant de la chaleur, n'acquiert pas un combustible destiné à être transformé en calories, mais « qu'il achète directement ces calories à un organisme dont la personnalité juridique se différencie de la sienne sans confusion possible ». Dès lors une facture d'énergie est entièrement récupérable. L'administration s'est placée dans la même position après avoir longtemps hésité lors d'une réponse ministérielle à Mme Beaudeau n° 02509 du 06 novembre 1997 JOQR Sénat page 3079. C'est sur ces deux bases juridiques que les factures de vendeurs de chaleur sont récupérées auprès des locataires par les organismes d'HLM. Dans leur décision de novembre 2009, la Cour de cassation relève que « les factures émises par CPCU présentaient une tarification en « binôme » composée d'une « partie variable dite R1, proportionnelle à la consommation effective de l'usager » s'exprimant en « euros/tonnes de vapeur » et d'une « partie fixe, dite R2, liée à la puissance garantie, c'est-à-dire à la puissance que l'usager est en droit d'appeler et correspondant aux engagements contractuels » s'exprimant en « euros/kW souscrit et représentative de la redevance annuelle d'abonnement ». Or, poursuit la Cour, « les sommes correspondant à la « prime fixe dite R2 » seraient exclues des charges récupérables ainsi que la taxe à la valeur ajoutée correspondante ». Les problèmes dus à cette décision sont nombreux : d'abord, le décret relatif aux charges précise que la dépense relative au « combustible ou à la fourniture d'énergie » est récupérable, « quelle que soit sa nature ». Or c'est bien d'une énergie fournie par un tiers dont il est question ici ; ensuite, il n'est pas contestable que le bailleur n'a aucune maîtrise sur le prix qui lui est facturé, en particulier pour la partie dite R2, qui n'est que la contrepartie d'une dépense d'investissement engagée par le fournisseur d'énergie pour produire et transporter celle-ci jusqu'au consommateur. À-t-on envisagé de distraire du prix du kWh le coût du réseau ERDF ou le montant de l'amortissement suite à l'édification des centrales nucléaires ? Enfin, la position de la Cour de cassation doit être mise en perspective avec les textes les plus récents, en particulier la loi ENL de 2006, qui précise qu'en matière de charges « le coût des services assurés dans le cadre d'un contrat d'entreprise correspond à la dépense, toutes taxes comprises, acquittée par le bailleur » (art. L. 442-3 CCH). Ainsi, cette décision se heurte à la loi la plus récente. Cette décision pourrait de nouveau être appliquée dans le cadre d'un nouveau contentieux bailleur-locataires sur le même thème avec le risque d'un remboursement sur trois ans de charges indues. À titre d'illustration, pour l'OPH du Grand Alès, cela représenterait 450 000 euros qui ne seraient plus dans les charges de chauffage des locataires mais qu'il aurait à payer directement. Pour cela, il faudrait augmenter les loyers de 10 % sur les 1 500 logements concernés ! Il lui demande, en conséquence, que le Gouvernement avec le soutien du Parlement permette aux bailleurs une meilleure maîtrise des conditions de prix du chauffage des logements sociaux en revenant à la situation précédente.

Réponse émise le 21 février 2012

Les charges récupérables sont définies par l'article L. 442-3 du code de la construction et de l'habitation (CCH) pour le parc locatif social et l'article 23 de la loi du 6juillet 1989 pour le parc locatif privé, comme étant "des sommes accessoires au loyer principal, qui sont exigibles en contrepartie des services rendus liés à l'usage de la chose louée, des dépenses d'entretien courant et de menues réparations, des impositions qui correspondent à des services dont le locataire profite directement ". La liste de ces charges est limitativement énumérée par les décrets n° 82-955 du 9 novembre 1982 et n° 87-7 13 du 26 août 1987. Il en résulte que ne figurent pas dans les charges récupérables, les dépenses de financement ou de remboursement, directement ou indirectement, des prix de la réalisation des installations de chauffage d'un immeuble (Cour de cassation 3eme civ, 9 mars 2005). Dans ce cadre, la jurisprudence de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation du 10 novembre 2009 a effectivement considéré que le bailleur ne pouvait pas récupérer sur le locataire la part fixe R2 du tarif binôme des réseaux de chaleur urbain correspondant à l'amortissement du réseau, le prix de la consommation R1 étant seul récupérable. Cependant, l'article 27 de la loi du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (NOME) en modifiant le dernier alinéa du I de l'article L. 442-3 du CCH et l'article 23 de la loi du 6juillet 1989, a mis fin à cette jurisprudence. Désormais, dans le cas d'un contrat d'achat d'électricité, d'énergie calorifique ou de gaz naturel combustible, distribués par les réseaux, le bailleur pourra récupérer auprès du locataire le prix de l'énergie qu'il achète à une entité juridique indépendante, sans distinguer les éléments constitutifs de ce prix.

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