M. Daniel Paul attire l'attention de M. le ministre chargé de l'industrie sur l'évolution jurisprudentielle apportée par l'arrêt du Conseil d'État « Mothais » du 5 juillet 2010, relatif aux fonctionnaires reclassés de la Poste. La haute cour a en effet considéré que la Poste, en refusant de prendre toute mesure de promotion interne en faveur des fonctionnaires reclassés a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, sans pouvoir utilement se prévaloir, pour s'en exonérer, ni de la circonstance que les décrets statutaires des corps de reclassement auraient interdit ces promotions, ni de la circonstance qu'aucun emploi ne serait vacant au cours de la période, pour procéder à de telles promotions. À ce titre, dans cet arrêt, le Conseil d'État a estimé que le salarié ayant exercé le recours, au vu des documents évaluant sa manière de servir, a été privé d'une chance sérieuse d'être promu à une date antérieure à celle où il a pu bénéficier d'une promotion (laquelle est intervenue après qu'il ait finalement accepté la reclassification), et a évalué le préjudice de carrière ainsi subi à 10 000 euros. Aussi, il lui demande si le Gouvernement entend tirer les conséquences de cette évolution jurisprudentielle en mettant en oeuvre un dispositif de reconstitution de carrière, ou si chaque salarié devra exercer un recours contentieux pour faire reconnaître les droits dont il a été privé illégalement.
Malgré l'évolution de La Poste vers une société anonyme, le législateur a prévu que l'ensemble des fonctionnaires de l'entreprise continuent à y exercer leurs fonctions dans le cadre du statut général des fonctionnaires. La situation de l'ensemble des fonctionnaires de La Poste est ainsi régie par un certain nombre de textes dont les statuts particuliers des corps et grades de La Poste (ceux dits de reclassement comme ceux dits de classification), la loi du 2 juillet 1990 portant organisation du service public de La Poste, et les titres 1 et 2 du statut général. Comme l'ensemble du personnel de La Poste, les fonctionnaires dits reclassés, conformément au statut général des fonctionnaires, ont le droit à une carrière : ils peuvent, en effet, évoluer au sein des corps de classification, sans perte d'identité statutaire. Sur ce dernier point, il convient de rappeler que des mesures spécifiques ont été prises afin d'améliorer les perspectives de carrière des fonctionnaires reclassés : 1. S'agissant de l'accès aux corps de classification, les reclassés peuvent se présenter aux premiers concours internes au même titre que les agents ayant choisi la classification. 2. Un accès aux grades d'avancement des corps de classification a été ouvert de manière dérogatoire aux reclassés. Il convient de rappeler qu'aux termes des règles statutaires de la fonction publique, cet accès est exclusivement réservé aux agents du corps concerné en vertu du principe d'égalité de traitement des fonctionnaires au sein d'un même corps. De plus, il convient d'ajouter que les intéressés ont régulièrement bénéficié des avancements d'échelon auxquels ils pouvaient prétendre. Ils ont également bénéficié du reclassement indiciaire intervenu en janvier 1991 lors de la mise en oeuvre de la réforme des PTT puis de celui de juillet 1992 lors de la mise en place d'une carrière linéaire au sein des corps de reclassement par fusion de grades. Enfin, la promotion dans les corps de fonctionnaires dits « reclassés » de La Poste a été relancée par le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 relatif aux dispositions statutaires applicables à certains corps de fonctionnaires de La Poste : celui-ci permet de réaliser des promotions dans l'ensemble des corps dits de « reclassement » de l'opérateur. En l'absence de recrutement externe depuis des années et en raison de l'existence de quotas statutaires, les possibilités de promotions étaient en effet très réduites. Grâce à ce décret, de nombreuses promotions ont été mises en oeuvre par La Poste dans les corps de reclassement. Ainsi, 127 agents ont été promus en 2009, puis 223 en 2010. Une vague de promotion est en cours pour 2011. Par ailleurs, si le Conseil d'État, dans son arrêt du 11 décembre 2008, a en effet enjoint au Gouvernement de prendre un décret permettant une reprise des promotions dans les corps dits de « reclassement » de l'opérateur, la haute juridiction n'a pas prescrit la reconstitution de carrière des agents pouvant être concernés par le droit à une promotion. La reconstitution de carrière constitue un acte administratif extrêmement rare. Elle n'est intervenue dans le passé que pour réparer des préjudices de carrière imputables aux évènements de la Seconde Guerre mondiale et aux évènements d'Afrique du Nord et de la guerre d'Indochine.
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