Mme Marie-Line Reynaud attire l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur la publication d'une expertise scientifique collective sur les comportements alimentaires menée par l'Inra à sa demande. Elle lui demande de lui établir un bilan de cette étude et de lui préciser les mesures que le Gouvernement entend prendre afin de permettre une amélioration des comportements alimentaires des citoyens français.
L'expertise scientifique collective (ESCO) sur les comportements alimentaires menée par l'Institut de la recherche agronomique (INRA) à la demande du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche (MAAP) a fait un état des lieux des connaissances sur les déterminants des comportements alimentaires. Les principales conclusions de l'expertise sont les suivantes : la prise alimentaire est régulée par le cerveau mais elle est modulée à court et moyen terme par de nombreux facteurs environnementaux ; les campagnes d'information qui s'adressent à l'ensemble de la population atteignent surtout les catégories déjà sensibilisées, il en est de même pour l'étiquetage nutritionnel. La connaissance des messages et leur appropriation n'induisent généralement pas les modifications de comportement attendues à court terme ; les actions ciblées sur des individus ou des groupes d'individus sont les plus efficaces ; l'action sur la disponibilité des denrées et la composition des aliments (par contraintes réglementaires ou incitatives via des chartes de progrès et des accords publics/privés) est plus efficace qu'une politique des prix (les systèmes de taxation ou de subvention différentielles ne sont pas des leviers opérationnels car les ménages peuvent substituer certains produits par d'autres) ; les périodes de la vie les plus critiques sont celles de l'enfance (les comportements alimentaires se construisent au cours des premières années de la vie et sont ensuite difficiles à changer), de l'adolescence (âge de changement des habitudes alimentaires, mais dont les nouvelles pratiques semblent être transitoires et laissent place ensuite à un retour à une alimentation de type familial lors de la mise en couple, la naissance des enfants ou l'accès à un emploi), de la vieillesse (période où les comportements alimentaires peuvent devenir plus instables, avec des problèmes de dénutrition, mais âge plus sensible aux messages de prévention santé) ; les populations défavorisées, qui sont davantage touchées par l'obésité, ont une alimentation éloignée des recommandations nutritionnelles, et sont plus exposées aux facteurs de risques. Elles sont moins sensibles aux messages de prévention, plus désireuses d'accéder à des produits fortement médiatisés, elles doivent être ciblées en priorité. Le Programme national pour l'alimentation décline de façon opérationnelle la politique publique de l'alimentation inscrite dans la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Dans ce programme sont inscrites des actions dont les objectifs et les modalités s'inspirent fortement des résultats de l'expertise sur les comportements alimentaires : l'expertise scientifique collective ayant montré que les habitudes alimentaires se mettent en place lors de l'enfance, les ministères chargés de l'alimentation et de l'éducation ont décidé de mettre en place un réseau d'animateurs d'éveil sensoriel afin que les enfants des classes primaires puissent bénéficier de séances d'éveil sensoriel et d'éducation au goût. Par ailleurs, le MAAP poursuit et élargit aux collèges et lycées l'opération de distribution de fruits à l'école intitulée « un fruit pour la récré ». Cette opération a pour objectif d'inciter les enfants à la découverte et à la consommation des fruits et légumes. Tous les secteurs, depuis la production jusqu'à la distribution, y compris évidemment les industriels et les professionnels de la restauration collective, seront mobilisés pour définir des contrats d'engagement de qualité. Ces engagements permettront aux consommateurs de bénéficier de produits alimentaires de bonne qualité nutritionnelle et gustative, produits, transformés et distribués dans des conditions durables. Le focus fait par l'expertise scientifique collective sur les populations les plus précaires montre que les messages classiques d'éducation alimentaire ne trouvent pas de résonance auprès de ce public pour des raisons culturelles et matérielles qui minimisent leur intérêt vis-à-vis des messages de prévention pour la santé. Un travail est actuellement mené par le MAAP, les interprofessions des fruits et légumes frais et transformés, l'association Sens du goût et le réseau national des épiceries solidaires et sociales (ANDES) afin d'aider les plus précaires à réfléchir sur leurs habitudes alimentaires et les inciter à cuisiner et consommer des légumes.
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