M. Jacques Pélissard attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les modalités de fixation des tarifs du gaz et l'évolution de ce dernier depuis plusieurs années. En effet, comme l'annonçait le gestionnaire de réseau GrDF à la fin du mois de juin (dépêche AFP du 21 juin 2010), ce dernier prévoit de procéder cette année, à la demande des fournisseurs de gaz, à près de 300 000 procédures de coupures pour impayés, soit 30 fois plus qu'en 2008. Une telle situation inquiète fortement les associations de consommateurs et pose la question de la pertinence des tarifs sociaux actuellement déclinés et censés prévenir ce type de cas. Plus largement, il souhaiterait connaître sa position sur les modalités actuellement appliquées pour la fixation des prix et plus particulièrement sur leur indexation au prix du fioul et du pétrole, ressource désormais plus rare que le gaz naturel. Il souhaiterait également connaître quels sont les déterminants des coûts hors approvisionnement du gaz (transport, stockage, commercialisation...) dont la hausse régulière ne fait l'objet d'aucune information précise et de savoir quelles orientations le Gouvernement compte prendre afin de préserver le plus large accès possible des particuliers à cette source d'énergie.
Le cadre réglementaire en vigueur garantit la transparence et la prévisibilité des mouvements tarifaires de GDF Suez. L'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 impose que les tarifs de GDF Suez oeuvrent la totalité des coûts supportés par l'entreprise. Depuis l'entrée en vigueur pour GDF Suez du décret n° 2009-1603 du 18 décembre 2009 et la signature du contrat de service public 2010-2013, les tarifs sont révisés au moins une fois par an par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, après avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), autorité administrative indépendante, afin de tenir compte de l'éventuelle évolution de ses coûts d'approvisionnement et de ses coûts hors approvisionnement (coûts de distribution, de transport, de stockage et de commercialisation). En outre, tous les trimestres, à l'initiative de l'entreprise et à titre conservatoire, les tarifs peuvent évoluer, après avis de la CRE et selon une formule rendue publique, traduisant l'évolution des coûts d'approvisionnement. S'agissant des coûts d'approvisionnement, il faut noter que GDF Suez importe 95 % de son gaz naturel, principalement dans le cadre de contrats à long terme, notamment auprès de la Norvège, des Pays-Bas, de la Russie et de l'Algérie. Ces contrats à long terme garantissent la sécurité de l'approvisionnement. Ils prévoient une indexation sur le prix des produits pétroliers (notamment le baril de brent), historiquement en raison du fait que ces produits étaient les principaux concurrents du gaz naturel, ce que traduit la formule tarifaire. Afin de protéger les consommateurs de hausses trop brutales, elle comporte un effet de lissage, à la hausse comme à la baisse, sur une période de six mois antérieure à chaque mouvement tarifaire. Les prix du pétrole ont augmenté tout au long de l'année 2009 et de l'année 2010 et continuent leur hausse en début d'année 2011. GDF Suez, qui importe son gaz sur la base de prix indexés sur les prix des produits pétroliers, voit donc augmenter ses coûts d'approvisionnement. Les tarifs réglementés de vente aux clients de GDF Suez ne font que répercuter la hausse des coûts de l'entreprise, en application de la formule tarifaire. À la suite d'évolutions sur les marchés du gaz naturel, et à la demande du Gouvernement, GDF Suez a renégocié récemment une partie de ses contrats d'approvisionnement à long terme. Ainsi, les prix de ceux-ci dépendent désormais partiellement des prix du gaz naturel coté sur les marchés au jour le jour (prix dits « spots »). La CRE, dans ce contexte, avec l'accord du Gouvernement, a lancé en avril 2010 un audit afin d'évaluer la pertinence de la formule tarifaire. Elle a délibéré le 31 août et a établi les conclusions suivantes : la formule en vigueur a constitué une bonne évaluation des coûts d'approvisionnement de GDF Suez par les contrats à long terme jusqu'à l'été 2010 ; en revanche, appliquer telle quelle la formule dans le futur ne permettrait pas de retranscrire fidèlement dans les tarifs les résultats des renégociations réalisées par GDF Suez à la demande du Gouvernement. Un ajustement de la formule est donc nécessaire ; en parallèle de l'ajustement de la formule elle-même, il convient de définir des mécanismes annuels d'évaluation, et de prise en compte si nécessaire, des écarts entre les coûts réels d'approvisionnement et les tarifs résultant de l'application de la formule. En conséquence, GDF Suez n'a pas demandé de revalorisation des tarifs du gaz en octobre 2010 et a proposé des aménagements de la formule tarifaire traduisant l'évolution de ses coûts d'approvisionnement. L'arrêté modifiant la formule d'évolution des tarifs réglementés en distribution publique a été signé le 9 décembre 2010 par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Il a fait suite à un avis favorable de la CRE. Désormais, la formule exprimant les coûts d'approvisionnement de GDF Suez intègre, à hauteur de 10 % environ, le prix du gaz naturel sur les marchés, dit « prix spot », au-delà de l'indexation traditionnelle sur les cours des produits pétroliers. La nouvelle formule entrera en vigueur au 1er avri1. D'ici là, il n'y aura pas de modification des tarifs réglementés du gaz en distribution publique de GDF Suez. Enfin, conformément aux dispositions prévues dans le décret du 18 décembre 2009 relatif aux tarifs réglementés de vente du gaz naturel, un bilan annuel des coûts d'approvisionnement de GDF Suez sera mis en oeuvre. Concernant l'augmentation du nombre de coupures de gaz pour impayés, il convient d'être prudent sur les chiffres dont la portée doit être appréciée au regard de la récente séparation d'ERDF et de GrDF. Avant 2008, les factures de gaz et d'électricité étaient communes et les coupures pour impayés étaient exclusivement effectuées sur l'électricité, pour des raisons techniques. L'augmentation du nombre de coupures constatées s'explique par le fait que, depuis la séparation de ces deux entreprises, les opérateurs gaziers recourent effectivement à des coupures de gaz en cas d'impayés de leurs clients. En outre, parmi les dossiers de demandes de coupures (y compris d'autres motifs que les impayés, comme les déménagements) qui ont été traités par GrDF, il apparaît que la moitié des clients a régularisé sa situation, si bien que seule l'autre moitié a fait l'objet de coupures effectives. Le rétablissement de la fourniture des clients après régularisation de leur situation intervient dans un délai maximal de vingt-quatre heures. Pour autant, les pouvoirs publics ont mis en place plusieurs dispositifs pour protéger les plus faibles, particulièrement en période hivernale, car la facture d'énergie pèse plus sur leurs revenus que pour le reste de la population. La procédure mise en oeuvre à l'égard des coupures pour impayés, par le décret du 13 août 2008, protège les consommateurs, particulièrement ceux en situation de précarité, en exigeant des fournisseurs l'envoi de courriers de relance et le respect de délais stricts avant toute coupure. Le dispositif de lutte contre la pauvreté et les exclusions prévu à l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles a pour objectif d'aider les plus démunis à faire face à leurs factures de gaz et d'électricité avec l'appui du Fonds de solidarité pour le logement (FSL). La loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement a établi une obligation de maintien de la fourniture d'eau, de gaz et d'électricité, pour la résidence principale des familles en difficulté. Cette mesure concerne les familles qui bénéficient ou ont bénéficié, au cours des douze derniers mois, d'une aide relevant du FSL. Elle s'applique entre le 1er novembre et le 15 mars de l'année qui suit le versement de l'aide du FSL. Afin d'atténuer l'impact des prix et alléger la facture des ménages concernés, a été mis en place, à compter de 2005, le tarif de première nécessité (TPN) pour l'électricité et, à compter de 2008, le tarif spécial de solidarité (TSS) pour le gaz. Le TPN prend la forme d'un abattement, augmenté de 10 points par le Gouvernement au 1er janvier 2011, soit désormais de 40 à 60 % sur l'abonnement et sur les 1 200 premiers kWh annuels. Il correspond à une réduction moyenne sur la facture de l'ordre de 97 EUR par an. 940 000 personnes en bénéficiaient en 2009. Le TSS prend la forme d'une déduction forfaitaire de 17 à 118 EUR (en pied de facture ou versée par chèque individuel en habitat collectif) qui varie selon la consommation et la taille du foyer. 298 000 personnes en bénéficiaient en 2009. La procédure d'attribution du TPN et du TSS, bien que déjà simplifiée au maximum, peut rester un frein à l'accès à ce tarif social pour certains ménages en grande difficulté sociale. La loi du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (NOME) a donné les moyens au Gouvernement de rendre plus automatique l'attribution du TPN. La concertation est en cours avec les entreprises, collectivités et les organismes sociaux et caritatifs pour finaliser les textes qui permettront de rendre plus automatique l'attribution du TPN et du TSS. Sauf opposition de leur part, le TPN et le TSS seront attribués aux ayants droit, dont le fournisseur aura pu être identifié dans les fichiers des distributeurs. La situation des personnes disposant de faibles revenus retient toute l'attention du Gouvernement, notamment au vu du rapport sur la précarité énergétique (rapport Pelletier), remis le 6 janvier 2010, qui a motivé l'engagement national contre la précarité énergétique lancé le 26 janvier 2010. Parmi les mesures annoncées dans le cadre de cet engagement figure la création d'un observatoire national de la précarité énergétique. Cet observatoire permettra de mieux cerner le phénomène de précarité énergétique pour orienter les politiques publiques, impulser des dispositifs innovants et mobiliser l'ensemble des acteurs. La convention engageant les différents partenaires souhaitant participer au fonctionnement de cet observatoire, associant personnes publiques et personnes privées, sera signée d'ici peu par les ministères et les parties prenantes. Un « Fonds national d'aide à la rénovation thermique des logements privés » sera également mis en place, notamment au grand emprunt, qui portera à 1,25 MdEUR l'engagement financier de l'État (hors aides fiscales). Géré par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), ce fonds sera doté pour la période 2010-2017 de 500 MEUR dans le cadre du grand emprunt et de 150 MEUR par les fournisseurs d'énergie par l'intermédiaire des certificats d'économie d'énergie. À ces montants doivent s'ajouter 600 MEUR de participations de l'ANAH et de L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) provenant de leurs programmes. Au niveau départemental, des « contrats locaux d'engagement contre la précarité énergétique » seront conclus. Cette contractualisation avec les acteurs locaux permettra de mobiliser les différentes sources de financements et de mettre en place un accompagnement individualisé : repérage des situations à traiter, diagnostic énergétique et financier, montage du projet de rénovation thermique, mise en oeuvre des travaux. En outre, l'article 78 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement comporte des mesures d'adaptation du dispositif des certificats d'économies d'énergies afin que ce dernier contribue mieux à la lutte contre la précarité énergétique.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.