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Maryse Joissains-Masini
Question N° 86283 au Premier Ministre


Question soumise le 10 août 2010

Mme Maryse Joissains-Masini attire l'attention de M. le Premier ministre sur l'urgence de renforcer le statut de l'élu, un statut indissociable de la relance de la démocratie, base de notre esprit républicain. Depuis plusieurs semaines, la rumeur, nouveau média de l'inquisition moderne, enfle autour du ministre du travail comme elle l'a fait auparavant, avec d'autres hommes politiques et comme elle continuera de le faire si nous n'intervenons pas. Sous le masque de l'information du citoyen, certains médias utilisent des procédés de basse police : truquages, montages, faux témoignages, accusations sans preuves. « Ces journalistes » oublient que leur mission est de recueillir l'information et de la vérifier et qu'ils ne sont ni juges, ni procureurs, ni inquisiteurs. Ils oublient aussi que la présomption d'innocence existe. Nous sommes encore un État de droit et l'élu local ou national, avec cette nouvelle conception de l'information, se doit d'être dans un état de repentance quotidienne où sa vie privée, sa vie professionnelle sont bafouées régulièrement. C'est pourquoi elle lui demande de créer un vrai statut de l'élu, car si l'élu a des responsabilités, des obligations vis-à-vis de ses électeurs, il doit aussi être protégé pour ne pas être discriminé, voire lynché médiatiquement. C'est par la création de ce statut que les Français reprendront confiance dans leurs élus qui accomplissent, pour la quasi totalité d'entre eux, leur mission avec passion et fierté ; les urnes, écartant sans ménagement les autres. Elle lui demande s'il ne pense pas qu'il faudrait une loi ferme sur la déontologie de la presse afin d'éviter cette désinformation généralisée, ce terrorisme intellectuel ? Cela aurait pour mérite de sanctionner les abus et les contrevérités qui violent la liberté de pensée, la liberté de conscience. Elle redonnerait à l'élu la possibilité de renouer un lien de confiance perdu avec l'électeur, d'effacer l'image dégradante de « corrompu » que cette presse de bas étage a réussi à faire passer auprès de nos concitoyens. Si le système est maintenu en l'état, rares seront les élus qui auront le courage de s'opposer à des dérives qu'ils auront constatées car ils savent qu'on les fera taire sans délai.

Réponse émise le 9 novembre 2010

Depuis la fin du xviiie siècle et la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la liberté de la presse est régulièrement réaffirmée. Ainsi, en son article 11, elle prévoit que « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». Ce principe a été repris par le législateur dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui rappelle que « l'imprimerie et la librairie sont libres ». Mais ce principe de liberté, ainsi que l'énonçait d'ailleurs la Déclaration précitée, ne peut être général et absolu. Dans une décision du 10 décembre 2007, la Cour européenne des droits de l'homme rappelait que « dans un monde dans lequel l'individu est confronté à un immense flux d'informations, circulant sur des supports traditionnels et électroniques, et impliquant un nombre d'acteurs toujours croissant, le respect de la déontologie journalistique revêt une importance accrue ». Ainsi, la loi du 29 juillet 1881 encadre la liberté de la presse. Elle punit comme complice d'une action qualifiée de crime ou délit l'incitation, par voie de presse, à commettre une telle action. Elle prohibe l'incitation à la discrimination ou à la haine à raison du sexe, de l'appartenance religieuse ou ethnique, de l'orientation sexuelle ou du handicap d'une personne ou d'un groupe de personnes. Elle prohibe la négation de crimes contre l'humanité. Elle poursuit la diffusion de nouvelles fausses, de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongèrement attribuées à des tiers lorsque, faite de mauvaise foi, elle aura troublé ou menacé de troubler l'ordre public. Elle sanctionne la diffamation entendue comme toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé. Elle sanctionne enfin l'injure. Dans ce cas, le juge va rechercher si les propos incriminés constituent une « expression outrageante ou méprisante, ou une invective » susceptible de porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée. Toute personne investie d'un mandat public, ce qui est le cas des élus locaux, bénéficie, en vertu de l'article 31 de la loi de 1881, d'une protection juridique accrue. En effet, dans ce cas l'auteur de propos diffamatoires encourt une peine de 45 000 EUR d'amende alors que le montant de l'amende n'est que de 12 000 EUR lorsqu'il s'agit d'un particulier. Enfin, l'atteinte à la vie privée est également susceptible d'être déférée devant les tribunaux. Il s'agit d'une construction jurisprudentielle élaborée à partir des dispositions de l'article 9 du code civil qui protège l'intimité de la vie privée. Dans tous les cas, c'est au juge judiciaire qu'il appartient de connaître et d'apprécier les éventuels délits commis par la presse ou les éventuelles atteintes portées à la liberté de la presse et d'apprécier le caractère pertinent et suffisant des ingérences du pouvoir politique en ce domaine. Bien évidemment, il convient pour ce faire que des plaintes pour violation de la vie privée, diffamation ou dénonciation calomnieuse, par exemple, soient déposées. Le droit positif permet aujourd'hui à chacun, titulaire ou non d'un mandat électif, de faire valoir ses droits en justice face à ce qu'il pourrait considérer comme des abus commis par certains médias d'information. Par ailleurs, au plan déontologique, dès juillet 1918, les journalistes ont éprouvé le besoin de compléter les termes de la loi du 29 juillet 1881 précitée en rédigeant une charte des devoirs et des droits professionnels. Cette charte fut actualisée en 1938. Reposant sur le postulat qu'une information de qualité doit être exacte et ne pas avoir été obtenue de manière déloyale, elle énonce un certain nombre de principes : respect des faits et de la vérité, honnêteté morale et financière auxquels devraient se plier ceux qu'elle qualifie de « journalistes dignes de ce nom ». D'une manière générale, cette charte s'organise autour de trois règles : respect dû au lecteur, respect des confrères (refus du plagiat) et protection du secret de ses sources par le journaliste. Cette charte n'a pas de caractère contraignant et chacun est libre d'y adhérer. Il s'agit de règles de déontologie grâce auxquelles la profession peut s'autoréguler. La convention collective nationale des journalistes signée par les représentants de la profession, employeurs et journalistes, précise : « Les parties reconnaissent l'importance d'une éthique professionnelle et l'intérêt que celle-ci représente pour une bonne information du public ». À la suite des états généraux de la presse écrite, un groupe de « sages », animé par M. Bruno Frappat, a présenté, fin octobre 2009, un projet de code de déontologie fixant un corpus de règles et principes éthiques qui auraient vocation à s'appliquer à tous les journalistes, quel que soit le support sur lequel ils travaillent ou la forme de presse à laquelle ils appartiennent. Ce projet de code de déontologie devrait faire l'objet de discussions entre les partenaires sociaux. Il viendrait alors donner plus de force aux règles éthiques que chaque journaliste se doit d'appliquer y compris dans son rapport aux élus.

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