M. Bruno Bourg-Broc attire l'attention de M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur l'impact du travail de nuit sur les conditions de travail et de vie des salariés. En effet, le conseil économique, social et environnemental dans son rapport de juillet 2010 met en avant le fait que le travail de nuit relève du caractère exceptionnel affirmé par la loi, mais celui-ci se développe de plus en plus, ce qui pose une question de santé publique pour un nombre croissant de salariés. C'est pourquoi il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement pour repenser les modalités de recours au travail de nuit pour préserver la santé des salariés mais également l'équilibre de leur vie familiale.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative au rapport adopté par le Conseil économique, social et environnemental le 8 juillet 2010, sur le développement du travail de nuit et son impact sur les conditions de travail et de vie des salariés. Si les enquêtes emploi menées par l'Institut national de la statistique et des études économiques depuis 1991 témoignent d'une progression du travail de nuit, liée principalement au développement du secteur des services, cette hausse reste toutefois mesurée : alors qu'en 1991, 13 % des salariés travaillaient de façon occasionnelle, ils sont, en 2008, 15,4 %, soit environ 3,6 millions de salariés. C'est surtout pour les femmes que la progression est la plus significative, essentiellement du fait de la levée de l'interdiction du travail de nuit des femmes, opérée en 2001, afin de mettre en conformité le droit français avec le droit européen et garantir le principe de non-discrimination entre les hommes et les femmes. Au-delà de cette évolution tendancielle mais limitée, il convient de rappeler que le code du travail encadre strictement les conditions de mise en place du travail de nuit. Le recours au travail de nuit, occasionnel ou habituel, doit en effet, aux termes de l'article L. 3122-32, être justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale. Le travail de nuit habituel fait l'objet d'un contrôle et d'une protection renforcée. Sa mise en place dans l'entreprise est conditionnée à un accord collectif, faisant l'objet, lorsque celui-ci est conclu au niveau de la branche, d'un examen attentif des services de la direction générale du travail dans le cadre de la procédure d'extension, rendue obligatoire par le code du travail. À défaut d'accord collectif, la mise en place du travail de nuit par l'employeur est conditionnée à une autorisation de l'inspecteur du travail. Enfin, la législation actuelle prévoit, pour le travailleur de nuit habituel, plusieurs garanties (repos compensateurs et surveillance médicale renforcée notamment) visant à prendre en compte la pénibilité et les effets sur la santé de cette forme atypique de travail ainsi que des mesures favorisant la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale. Pour ces raisons, le cadre législatif et réglementaire actuel, plus protecteur que les prescriptions imposées par le droit européen, ne paraît pas devoir être modifié. Il convient également de signaler que la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a instauré diverses mesures relatives à la prise en compte de la pénibilité dans les parcours professionnels, qu'il s'agisse de sa prévention (dispositif de suivi des expositions des travailleurs, accord ou plan d'action de prévention de la pénibilité) ou de sa compensation (droit à une retraite anticipée pour pénibilité). Les dispositions de cette loi relatives au suivi des expositions des travailleurs ainsi que celles relatives au droit à la retraite anticipée pour pénibilité au travail mentionnent un certain nombre de facteurs de risques professionnels. Un décret du 30 mars 2011 a fixé la liste précise de ces facteurs ; le travail de nuit y figure au titre des risques liés à certains rythmes de travail. La loi a par ailleurs instauré pour certaines entreprises une obligation de conclure un accord ou d'élaborer un plan d'action en faveur de la prévention de la pénibilité, les employeurs étant, à défaut, soumis à une pénalité de 1 % maximum des rémunérations ou gains versés aux travailleurs concernés par l'exposition à des facteurs de pénibilité. Le travail de nuit intervient ici à plusieurs titres. D'une part, il entre en ligne de compte dans le calcul de la proportion de salariés exposés déclenchant l'obligation de négocier un accord ou de conclure un plan d'action. D'autre part, il fait partie des thèmes sur lesquels peuvent porter ces accords ou plan d'action.
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