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Jacques Kossowski
Question N° 85669 au Ministère de l'Emploi


Question soumise le 3 août 2010

M. Jacques Kossowski attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi sur la mobilité choisie des salariés en France. En mai dernier, un rapport publié par le Conseil d'analyse économique mettait en évidence la trop grande rareté de celle-ci. En effet, qu'il s'agisse de déménager pour se former ou pour travailler dans une autre entreprise ou un autre secteur d'activité, "la mobilité choisie des salariés est restée faible". Pourtant, elle est indispensable au bon fonctionnement du marché du travail et à la lutte contre le chômage. Aussi, ne conviendrait-il pas de prendre des mesures incitatives en faveur de ceux qui prennent le risque de changer géographiquement d'activité professionnelle. Il lui demande quel dispositif il pourrait mettre en place à cet effet.

Réponse émise le 6 septembre 2011

Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux perspectives de la mobilité géographique. Les dispositifs et les dispositions visant à lever les obstacles à la mobilité géographique, lorsque cette dernière est nécessitée par des changements de nature professionnelle, sont par nature hétérogènes. Ils concernent aussi bien le champ de la politique de l'emploi que celui du logement, etc. La double mobilité, professionnelle et géographique, comme les arbitrages possibles entre mobilité résidentielle et migrations alternantes entre domicile et lieu du travail, compliquent le tableau des aides et des incitations à prendre en compte. Se pose également la question de savoir qui prend l'initiative de la mobilité : l'employeur dans le cadre d'une mutation ou d'un licenciement (cas de mobilité subie pour lequel des obligations peuvent être portées à sa charge) ; le salarié souhaitant saisir une opportunité d'emploi (mobilité choisie) ; ou encore le demandeur d'emploi qui pourra dans ce cas bénéficier des aides à la mobilité de Pôle emploi. On sait que la mobilité à l'initiative du salarié et la mobilité subie ne produisent pas les mêmes effets sur le marché du travail : les chances de reprendre rapidement un emploi sont sensiblement meilleures en effet lorsque la mobilité est choisie (cf. document de travail du centre d'économie de la Sorbonne, n° 2010.99). Ce fait pourrait d'ailleurs suggérer de faire plutôt porter l'effort de la collectivité sur les cas de mobilité subie, au bénéfice de la sécurisation des parcours professionnels. Cependant, il existe également des situations intermédiaires entre mobilité subie, évaluée par approximation par la part des licenciements dans les transitions emploi-chômage, et mobilité choisie, estimée à partir des départs volontaires : c'est la mobilité négociée. Cette dernière, en tant qu'elle permet d'équilibrer les intérêts des parties au contrat de travail, doit être également encouragée. C'est ce qu'ont tenu à affirmer les partenaires sociaux à travers l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008. Outre le rapport du Conseil d'analyse économique de Mme Mathilde Lemoine et M. Étienne Wasmer sur « Les mobilités des salariés », d'autres contributions récentes ont cherché à éclairer ces questions. Le rapport « Bouger pour l'emploi » remis en juin 2009 au Premier ministre par Mme Claude Greff, alors députée d'Indre-et-Loire, avait émis vingt-sept propositions pour favoriser la « mobilité professionnelle géographique » des salariés. Certaines propositions de ce rapport ont fait l'objet d'une reprise par le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE) dans son rapport de synthèse sur les trajectoires et les mobilités professionnelles de septembre 2009. Le conseil proposait notamment de mieux faire connaître, de compléter et de rendre cohérentes les aides à la mobilité, au déménagement et à la double résidence pour les demandeurs d'emploi ou les salariés changeant d'emploi. Le conseil proposait aussi de réduire les droits de mutation à titre onéreux pour les salariés demandeurs d'emploi qui déménagent et achètent une nouvelle résidence dans une autre région (département) afin d'occuper un nouvel emploi. Cette dernière suggestion a d'ailleurs fait l'objet d'une proposition de loi n° 2350 visant à favoriser la mobilité géographique en France, enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 24 février 2010, aujourd'hui renvoyée à la commission des affaires sociales. À cet égard, plusieurs mécanismes fiscaux permettent d'ores et déjà de supporter l'effort des ménages contraints par une mobilité professionnelle à un changement de résidence principale. Il en est ainsi de l'exonération de la plus-value sur la vente de la résidence principale prévue aux 1° et 2° du II de l'article 150 U du code général des impôts (CGI), dont la durée à compter de la mise en vente peut tenir compte des circonstances entourant la transaction (CE n° 308051 du 6 octobre 2010). On peut signaler encore la possibilité pour les salariés qui optent pour la déduction du montant réel et justifié de leurs frais professionnels de faire état de frais de double résidence, en application du 3° de l'article 83 du CGI. S'agissant de la mobilité négociée, l'article 8 de l'accord national interprofessionnel (ANI) de janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail a proposé que la mobilité professionnelle et géographique soit « mise en oeuvre dans l'entreprise suivant un processus organisé et concerté ». Les parties signataires ont insisté sur « l'articulation de ce processus avec la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences et le plan de formation de l'entreprise ». En ce qui concerne la mobilité à l'initiative de l'employeur et l'accompagnement des mobilités géographique, ils ont souhaité que les entreprises recherchent toutes les mesures d'accompagnement susceptibles d'être mises en place, dans le cadre d'une anticipation du changement ou d'une restructuration, au bénéfice des salariés et de leur famille, telles que, par exemple, l'aide au déménagement, à la recherche de logement, à l'accès au logement, à l'achat ou à la location d'un véhicule, à l'obtention du permis de conduire, à la recherche d'établissement scolaire, à la recherche d'emploi pour le conjoint, etc. Ils ont rappelé notamment l'existence des différents dispositifs du 1 % logement (notamment loca-pass et mobili-pass). Il convient de mentionner par ailleurs l'engagement pris par les partenaires sociaux - aux termes de l'article 10 de l'ANI du 11 janvier 2008 - de « clarifier les clauses spécifiques du contrat de travail », et notamment les conditions de mise en oeuvre des clauses de mobilité. Il s'agit là encore de limiter les mobilités subies. Cette clarification devra nécessairement tenir compte de la jurisprudence dégagée en la matière par la Cour de cassation le 14 octobre 2008, qui permet de mieux contrôler la mise en oeuvre de ces clauses de mobilité et qui rappelle l'existence d'un droit du salarié à une vie personnelle et familiale. Rappelons que l'accompagnement du conjoint d'un salarié contraint à une mobilité géographique professionnelle se traduit par la mise en place d'un régime spécifique de la démission pour suivi de conjoint, incluant le droit à bénéficier des allocations chômage-chômage. Le nouvel emploi doit correspondre à celui occupé à la suite d'une mutation au sein de l'entreprise ou lors d'un changement d'employeur à l'initiative du salarié, à la reprise d'un emploi après une période de chômage, ou encore à une création ou à une reprise d'entreprise. En ce qui concerne précisément les demandeurs d'emploi, notons que Pôle emploi a mis en oeuvre tout un ensemble d'aides intéressant la mobilité professionnelle géographique, susceptibles de lever les freins à la recherche active d'un emploi. Ces aides à la reprise d'emploi sont mises en oeuvre dans le cadre du projet personnalisé d'accès à l'emploi (PPAE) et concernent les demandeurs d'emploi ayant pris un engagement de mobilité allant au-delà des critères relatifs à l'offre raisonnable d'emploi (circulaire de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle [DGEFP] n° 2008/18 du 5 novembre 2008) : la reprise d'emploi en question peut être sous contrat à durée indéterminée ou sous contrat à durée déterminée d'au moins six mois dans une localité distante du domicile habituel du demandeur d'emploi de 60 kilomètres aller-retour ou pour un temps de trajet au moins égal à deux heures aller-retour. L'aide peut couvrir des frais de déplacement quotidiens, hebdomadaires ou mensuels, de double résidence ou de déménagement. Ces aides, cumulables entre elles, ne sont octroyées qu'une fois par période de douze mois à compter de la date de la reprise d'emploi, dans la limite d'un plafond annuel par bénéficiaire de 2 500 euros.

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