M. François Loncle attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les conséquences sociales et économiques des augmentations successives des tarifs du gaz et notamment celle qui vient d'être annoncée pour le 1er juillet et qui suit la hausse de 9,7 % d'avril dernier. Selon GrDF, gestionnaire du réseau de distribution de gaz naturel, 300 000 procédures de coupure de fourniture en gaz pour cause d'impayés sont prévisibles en 2010, les impayés ayant été multipliés par 30 en deux ans. Cette situation souligne l'inefficacité des tarifs sociaux qui ne garantissent plus l'accès au gaz pour tous. Certes GDF-Suez met en avant la baisse de 11 % intervenue en 2009, mais oublie de souligner que les prix ont augmenté de près de 50 % en 5 ans. Pourtant les prix du gaz n'ont jamais été aussi bas sur les marchés mondiaux. En témoigne la récente annonce de Gazprom de facturer une partie de ses ventes au prix des marchés Spot. Cette annonce marque un virage historique et souligne combien la règle de l'indexation des prix du gaz sur ceux du pétrole est économiquement infondée. L'un des arguments justifiant la fusion des groupes GDF et Suez consistait pourtant à vouloir créer un groupe de taille mondiale en situation de peser dans les négociations avec les producteurs au bénéfice des consommateurs. Cela visait notamment la renégociation des contrats à long terme. Or, on peut aujourd'hui s'interroger sur les bénéfices annoncés aux consommateurs. Aussi il lui demande s'il compte tirer les conclusions du nombre croissant de procédures de coupure de gaz en mettant en place un nouveau dispositif de tarifs sociaux et si, en tant qu'actionnaire à 35 % du groupe GDF-Suez, il compte clarifier les modalités de fixation des prix du gaz et mettre fin à l'indexation de son prix sur celui du pétrole.
La revalorisation des tarifs réglementés du gaz naturel vendu par la société GDF Suez a conduit à une augmentation de la facture moyenne de gaz de 9,4 % au 1er avril 2010 et de 4,7 % au 1er juillet 2010. Le cadre réglementaire en vigueur garantit la transparence et la prévisibilité des mouvements tarifaires de GDF Suez. L'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 impose que les tarifs de GDF Suez couvrent la totalité des coûts supportés par l'entreprise. Depuis l'entrée en vigueur pour GDF Suez du décret n° 2009-1603 du 18 décembre 2009 et la signature du contrat de service public 2010-2013, les tarifs sont révisés au moins une fois par an par les ministres chargés de l'économie et de l'énergie, après avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), autorité administrative indépendante, afin de tenir compte de l'éventuelle évolution de ses coûts d'approvisionnement et de ses coûts hors approvisionnement (coûts de distribution, de transport, destockage et de commercialisation). En outre, tous les trimestres, à l'initiative de l'entreprise et à titre conservatoire, les tarifs peuvent évoluer, après avis de la CRE et selon une formule rendue publique, traduisant l'évolution des coûts d'approvisionnement. S'agissant des coûts d'approvisionnement, il faut noter que GDF Suez importe 95 % de son gaz naturel, principalement dans le cadre de contrats de long terme, notamment auprès de la Norvège, des Pays-Bas, de la Russie et de l'Algérie. Ces contrats à long terme garantissent la sécurité de l'approvisionnement. Ils prévoient une indexation sur le prix des produits pétroliers (notamment le baril de Brent), historiquement en raison du fait que ces produits étaient les principaux concurrents du gaz naturel, ce que traduit la formule tarifaire. Afin de protéger les consommateurs de hausses trop brutales, elle comporte un effet de lissage, à la hausse comme à la baisse, sur une période de six mois antérieure à chaque mouvement tarifaire. Les prix du pétrole ont augmenté tout au long de l'année 2009 et continuent leur hausse en 2010. GDF Suez, qui importe son gaz sur la base de prix indexés sur les prix des produits pétroliers, voit donc augmenter ses coûts d'approvisionnement. Les tarifs réglementés de vente aux clients de GDF Suez ne font que répercuter la hausse des coûts de l'entreprise, en application de la formule tarifaire. Alors que le prix du baril de Brent était en moyenne de 73 dollars (51 EUR) sur la période de référence d'approvisionnement de GDF Suez du 1er avril 2010 (septembre 2009 à février 2010), il est passé à 77 dollars (57 EUR) pour celle du 1er juillet (décembre 2009 mai 2010), soit une augmentation d'environ 5 % en dollars et de 11 % en euros, la baisse de l'euro par rapport au dollar ayant contribué à renchérir le coût de l'approvisionnement. À cette hausse des coûts d'approvisionnement s'est ajoutée, lors du mouvement du 1er avril 2010, l'augmentation des coûts hors approvisionnement. En effet, la facture du client final est composée pour environ 50 % de coûts d'approvisionnement, 10 % de transport, 7 % de stockage, 25 % de distribution et 8 % de commercialisation. Chacune de ces composantes se voit appliquer ses propres augmentations, indépendamment du prix de la molécule, qui font à la fin varier les tarifs. Les tarifs de transport (ATR-T) et de distribution (ATR-D) sont établis par la CRE en fonction de la politique d'investissement applicable aux réseaux (sécurité d'approvisionnement et développement), des charges d'exploitation des entreprises gestionnaires, de leurs prévisions d'activité, et également de l'inflation. Les tarifs de stockage, quant à eux, ne sont pas réglementés. La grille tarifaire de GRTgaz a augmenté de 3,9 % au 1er avril 2010, celle de GrDF a augmenté de 0,76 % au 1er juillet 2010. Les augmentations des tarifs réglementés du gaz naturel des 1er avril et 1er juillet ont tenu compte de ces variations. La CRE a émis, le 25 mars 2010 et le 24 juin 2010, un avis favorable au sujet de ces mouvements. À la suite d'évolutions sur les marchés du gaz naturel, et à la demande du Gouvernement, GDF Suez a renégocié récemment une partie de ses contrats d'approvisionnement long terme. Ainsi, les prix de ceux-ci dépendent désormais partiellement des prix du gaz naturel coté sur les marchés au jour le jour (prix dits « spots »). La CRE, dans ce contexte, avec l'accord du Gouvernement, a lancé en avril un audit afin d'évaluer la pertinence de la formule tarifaire. Elle a délibéré le 31 août et a établi les conclusions suivantes : la formule en vigueur a constitué une bonne évaluation des coûts d'approvisionnement de GDF Suez par les contrats long terme jusqu'à l'été 2010 ; en revanche, appliquer telle quelle la formule dans le futur ne permettrait pas de retranscrire fidèlement dans les tarifs les résultats des renégociations réalisées par GDF Suez à la demande du Gouvernement. Un ajustement de la formule est donc nécessaire ; en parallèle de l'ajustement de la formule elle-même, il convient de définir des mécanismes annuels d'évaluation, et de prise en compte si nécessaire, des écarts entre les coûts réels d'approvisionnement et les tarifs résultant de l'application de la formule. En conséquence, GDF Suez a informé le Gouvernement qu'il ne demandera pas de revalorisation des tarifs du gaz en octobre et lui proposera prochainement, ainsi qu'à la CRE, des aménagements de la formule tarifaire traduisant l'évolution de ses coûts d'approvisionnement. Les éventuels ajustements de la formule seront publiés au Journal officiel avant la fin de l'année. Enfin, conformément aux dispositions prévues dans le décret relatif aux tarifs du gaz, un bilan annuel des coûts d'approvisionnement de GDF Suez sera mis en oeuvre. Concernant l'augmentation du nombre de coupures de gaz pour impayés, il convient d'abord d'être prudent sur les chiffres dont la presse a fait écho, et dont la portée doit être appréciée au regard de la récente séparation d'ErDF et de GrDF. Avant 2008 les factures de gaz et d'électricité étaient communes et les coupures pour impayés étaient quasiment exclusivement effectuées sur l'électricité, car plus faciles à mettre en oeuvre. L'augmentation du nombre de coupures constatées s'explique par le fait que, depuis la séparation de ces deux entreprises, les opérateurs gaziers recourent effectivement à des coupures de gaz en cas d'impayés de leurs clients. En outre, parmi les dossiers de demandes de coupures (y compris d'autres motifs que les impayés, comme les déménagements) qui ont été traités par GrDF, il apparaît que la moitié des clients a régularisé sa situation, si bien que seule l'autre moitié a fait l'objet de coupures effectives. Le rétablissement de la fourniture des clients après régularisation de leur situation intervient dans un délai maximal de 24 heures. La procédure mise en oeuvre à l'égard des coupures pour impayés par le décret du 13 août 2008, protège les consommateurs, particulièrement ceux en situation de précarité, en exigeant des fournisseurs l'envoi de courriers de relance et le respect de délais stricts avant toute coupure. Le dispositif de lutte contre la pauvreté et les exclusions prévu à l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles a pour objectif d'aider les plus démunis à faire face à leurs factures de gaz et d'électricité avec l'appui du Fonds de solidarité pour le logement (FSL). La loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement a établi une obligation de maintien de la fourniture d'eau, de gaz et d'électricité pour la résidence principale des familles en difficulté. Cette mesure concerne les familles qui bénéficient ou ont bénéficié, au cours des douze derniers mois, d'une aide relevant du FSL. Elle s'applique entre le 1er novembre et le 15 mars de l'année qui suit le versement de l'aide du FSL. Afin d'atténuer l'impact des prix et alléger la facture des ménages concernés, les pouvoirs publics, en lien avec les entreprises, ont mis en place, à compter de 2008, le tarif spécial de solidarité (TSS) pour le gaz sous forme d'une déduction forfaitaire (en pied de facture ou versée par chèque individuel en habitat collectif) qui varie selon la consommation et la taille du foyer, 298 500 personnes en bénéficiaient en 2009. La procédure d'attribution du TSS, bien que déjà simplifiée au maximum, peut rester un frein à l'accès à ce tarif social pour certains ménages en grande difficulté sociale. Le projet de loi sur la nouvelle organisation des marchés de l'électricité (NOME), tel qu'il a été voté par le Sénat en première lecture, avec le soutien du Gouvernement, permettra de rendre plus automatique l'attribution du TSS. Le Gouvernement s'est engagé à présenter à la concertation d'ici à la fin de l'année le projet de décret en Conseil d'État qui formalisera cette réforme consistant à attribuer le TSS aux ayants droit, sauf opposition de leur part. De même, ce projet de loi prévoit une réversibilité complète pour les petits consommateurs de gaz naturel (pour une consommation de moins de 30 000 kilowattheures par an), c'est-à-dire la possibilité de choisir à tout moment entre une offre libre et une offre aux tarifs réglementés. Les consommateurs pourront donc désormais bénéficier des offres de marché, qui ont pu atteindre jusqu'à 15 % de rabais par rapport aux tarifs réglementés, tout en gardant la possibilité de retourner à ces tarifs. La situation des personnes disposant de faibles revenus retient toute l'attention du Gouvernement, notamment au vu du rapport sur la précarité énergétique (rapport PELLETIER), remis le 6 janvier 2010, qui a motivé l'engagement national contre la précarité énergétique lancé le 26 janvier 2010. Parmi les mesures annoncées dans le cadre de cet engagement figure la création d'un Observatoire national de la précarité énergétique. Cet observatoire permettra de mieux cerner le phénomène de précarité énergétique pour orienter les politiques publiques, impulser des dispositifs innovants et mobiliser l'ensemble des acteurs. La convention engageant les différents partenaires souhaitant participer au fonctionnement de cet observatoire, associant personnes publiques et personnes privées, est en cours de finalisation. Un fonds national d'aide à la rénovation thermique des logements privés sera également mis en place, notamment grâce au grand emprunt, qui portera à 1,25 MdEUR l'engagement financier de l'État (hors aides fiscales). Géré par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), ce fonds sera doté pour la période 2010-2017 de 500 MEUR dans le cadre du grand emprunt et de 150 millions par les fournisseurs d'énergie par l'intermédiaire des certificats d'économie d'énergie. À ces montants doivent s'ajouter 600 MEUR de participations de l'ANAH et de l'ADEME provenant de leurs programmes. Au niveau départemental, des contrats locaux d'engagement contre la précarité énergétique seront conclus. Cette contractualisation avec les acteurs locaux permettra de mobiliser les différentes sources de financement et de mettre en place un accompagnement individualisé : repérage des situations à traiter, diagnostic énergétique et financier, montage du projet de rénovation thermique, mise en oeuvre des travaux. En outre, l'article 78 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement comporte des mesures d'adaptation du dispositif des certificats d'économies d'énergie afin que ce dernier contribue mieux à la lutte contre la précarité énergétique. Enfin, le Gouvernement a donné au Sénat, dans le cadre du projet de loi NOME, un avis favorable à un amendement qui prévoit l'automatisation du tarif social pour le gaz. Un dispositif analogue sera mis en oeuvre par décret pour l'électricité.
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