M. Michel Terrot attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes sur le processus d'expansion européenne. En effet, les citoyens sont poussés à croire en le futur de la France dans l'Union européenne mais sans que le Gouvernement ne parvienne à exprimer clairement quelles seront les frontières finales de cette construction politique en devenir. De même, la construction européenne est galopante mais sans que la forme finale de l'Europe ne soit connue. C'est pourquoi il lui demande quels sont les États qui sont potentiellement appelés à entrer un jour dans l'UE et quelle sera la forme politico-juridique de l'Union une fois la construction achevée.
La position de la France sur l'élargissement de l'Union européenne est liée à sa vision de l'Europe, c'est-à-dire celle d'une Europe politique forte et volontariste, à laquelle les citoyens français peuvent s'identifier, ce qui implique de fixer des limites et donc des frontières. Le Président de la République avait fait de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne un préalable indispensable à tout nouvel élargissement de l'Union européenne. Il n'était, en effet, pas concevable qu'une union qui n'aurait pas su réformer ses institutions, accueille de nouveaux membres. L'entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre 2009 conduit à accorder une attention nouvelle à la question de l'élargissement de l'Union européenne, en particulier à la région des Balkans. La France est favorable à un élargissement maîtrisé, fondé sur les principes du consensus renouvelé pour l'élargissement agréés par le Conseil européen en décembre 2006. Ces principes impliquent notamment un examen rigoureux, tout au long du processus, des mérites individuels de chaque candidat (pas d'adhésions groupées a priori et pas de traitement privilégié d'un candidat) et de leur capacité effective à satisfaire aux conditions d'adhésion (critères de Copenhague), ainsi que la prise en compte de la capacité d'absorption de l'union. Ainsi que l'a rappelé la réunion de haut niveau tenue à Sarajevo le 2 juin 2010, la France est, à l'instar des 26 autres États membres de l'union, attachée au respect des engagements pris à l'égard des États des Balkans occidentaux lors du sommet de Zagreb en novembre 2000, à savoir que ces pays ont clairement vocation à intégrer à terme l'Union européenne. Cette perspective européenne contribue en effet à la stabilisation de la région, comme le conseil affaires étrangères du 14 juin 2010 et le conseil affaires générales du 14 décembre dernier l'ont réaffirmé dans leurs conclusions. Pour autant, il appartient aux pays concernés de réaliser les efforts nécessaires. En dix ans, les progrès de chacun ont été nombreux, en matière économique ou de réforme politique notamment. Mais les États des Balkans font encore face à des défis majeurs, pour la plupart liés au respect de l'État de droit et à leur capacité à mettre en oeuvre les réformes nécessaires en matière de gouvernance ou de justice. Parmi les pays des Balkans occidentaux, seule la Croatie a ouvert des négociations d'adhésion avec l'Union européenne (en octobre 2005). À ce jour, 34 chapitres de la négociation ont été ouverts et 28 clos de manière provisoire, sur un total de 35 chapitres. La France soutient les efforts du gouvernement croate pour mettre en oeuvre les réformes nécessaires et ainsi achever les négociations dans les meilleurs délais. Au-delà, l'ancienne République yougoslave de Macédoine et le Monténégro se sont vus reconnaître le statut de candidat par le Conseil européen en décembre 2005 et en décembre 2010 respectivement mais n'ont pas encore ouvert de négociations en vue d'une adhésion. À l'inverse du Monténégro, et suivant en cela l'avis de la Commission, le Conseil européen de décembre 2010 n'a pas accordé le statut de candidat à l'Albanie. La candidature de la Serbie à l'adhésion à l'Union européenne, déposée en décembre 2009, a été transmise en octobre 2010, pour avis, à la commission, qui remettra son rapport à l'automne 2011 au plus tôt. Par ailleurs, la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo (dont le processus de rapprochement européen est compliqué par la non reconnaissance de son indépendance par cinq États membres) n'ont pas déposé de demande du statut de candidat à ce jour. En dehors des pays des Balkans occidentaux, la Turquie a ouvert des négociations en octobre 2005. Comme l'a rappelé très clairement et à plusieurs reprises le Président de la République, la France souhaite entretenir et enrichir sa relation bilatérale ancienne avec la Turquie. Elle est favorable au lien le plus fort entre la Turquie et l'Europe mais elle n'est pas favorable à l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Cette position n'a pas varié. Dans ce cadre, l'intérêt bien compris de la Turquie comme de l'Europe est que le mouvement de rapprochement des normes turques vers les normes européennes se poursuive. Concrètement, cela signifie que nous sommes favorables à l'ouverture de nouveaux chapitres dans la négociation en cours, dès lors qu'ils sont compatibles avec notre vision du résultat final de la négociation. Enfin, conformément à la décision du Conseil européen du 17 juin 2010 qui a estimé que l'Islande respectait les critères de Copenhague, l'Islande a ouvert des négociations avec l'Union européenne le 27 juillet 2010. Le traité de Lisbonne, dont l'entrée en vigueur était une condition préalable à la poursuite du processus d'élargissement, vise également à garantir le fonctionnement d'une union élargie. Plusieurs dispositions y concourent, notamment l'extension du champ d'application du vote à la majorité qualifiée qui devient la règle au conseil (art. 16-3 TUE) et le nouveau système de pondération des voix au conseil (art. 16-4 TUE) qui commencera d'être appliqué à compter de 2014. Au-delà, la configuration que prendra l'Union européenne dépendra naturellement du rythme du processus d'élargissement et de la nature des éventuels nouveaux États membres. Dans cette perspective, la France entend naturellement veiller à ce que d'éventuels élargissements contribuent bien à renforcer l'union.
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