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Alfred Almont
Question N° 84649 au Ministère de la Santé


Question soumise le 20 juillet 2010

M. Alfred Almont appelle l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les problèmes posés plus que jamais par l'exposition des populations au chlordécone et à ses conséquences médicales et environnementales de plus en plus inquiétantes. Ce pesticide de la famille du DDT (un des premiers insecticides utilisés), a longtemps été employé pour lutter notamment contre le charançon du bananier. Mais même après qu'il se soit avéré être extrêmement toxique et dangereux (il est interdit aux États-unis depuis 1976 et en France depuis 1990), son autorisation d'utilisation a été prolongée aux Antilles françaises jusqu'en 1993. En Martinique, mais aussi en Guadeloupe, la pollution par le chlordécone est devenue une préoccupation importante, un cinquième des sols en Guadeloupe et les deux cinquièmes en Martinique sont contaminés. Aujourd'hui, il s'avère que les sols, les rivières et même l'eau de mer sur de larges bandes côtières, ainsi que les produits qui en sont issus (légumes, fruits, poissons...), sont contaminés par ce produit phytosanitaire dont la particularité est que sa présence dans la nature sera malheureusement durable ; il pourrait en rester des traces jusqu'en 2500 selon l'INRA. Des informations récentes, qui suivent de près celle relative à la pollution du milieu marin, mettent en relation le taux plus important de cancer de la prostate aux Antilles avec l'exposition au chlordécone ; elles ont été publiées dans la presse scientifique et ont été reprises par la presse quotidienne. En 2008, une mission d'information Parlementaire avait formulé des préconisations pour faire face aux conséquences désastreuses de ce pesticide pour la santé des populations, alors même qu'une commission d'enquête avait été demandée. Le « plan chlordécone » qui en découlait, et que nous avions salué, ne semblerait plus suffisant, ni adapté face à ces nouvelles révélations. Il entend donc lui demander solennellement quelles nouvelles mesures elle envisage de mettre en oeuvre face à ce grave problème qui, si ce que nous lisons dans la presse est vrai, est un problème de santé publique d'envergure nationale et quels moyens de communication seraient alors mis en oeuvre pour renseigner et rassurer les populations concernées.

Réponse émise le 31 mai 2011

La chlordécone est un pesticide qui a été utilisée pour lutter contre le charançon, ravageur du bananier. L'introduction de cette molécule date de 1972 et son interdiction définitive de 1993. En Guadeloupe, la contamination des sols par la chlordécone est localisée essentiellement dans le sud de la Basse-Terre. En Martinique, la contamination est plus diffuse sur le territoire, les surfaces les plus contaminées étant situées dans le nord est de l'île. Cette substance très stable persiste dans les sols. Elle peut contaminer certaines denrées animales ou végétales, les eaux de certains captages puis, par ruissellement, des zones marines et certains produits de la pêche. Cette contamination constitue, par son ampleur et sa persistance dans le temps, un enjeu sanitaire, environnemental, pour l'agriculture et la pêche, mais aussi économique, social et politique pour les Antilles. Mobilisant l'État et ses opérateurs, au niveau national et local, depuis 1999, puis inscrit comme une des priorités du plan national santé-environnement en 2004, cet enjeu a vu l'action de l'État se renforcer en 2007, grâce à la mise en place d'un plan interministériel 2008-2010 animé par un coordonnateur. Visant cinq objectifs (améliorer la surveillance de l'environnement et de l'état de santé de la population ; continuer à réduire l'exposition de la population à la chlordécone ; proposer les mesures d'accompagnement nécessaires en agriculture ; améliorer la surveillance des sols et produits de jardins familiaux ; permettre à la population antillaise d'accéder à toute information utile sur l'environnement, la santé et l'alimentation), et comportant une quarantaine d'actions, ce plan a été porté par de nombreux acteurs (services de l'État, organismes d'expertise ou de recherche, professionnels de l'agriculture, de l'aquaculture et de la pêche). Il a mobilisé plus de trente-trois millions d'euros de crédits d'État, des collectivités locales et de l'Union européenne, et permis des avancées importantes. Les bilans interministériels de mise en oeuvre de ce plan d'action sont disponibles sur le site Internet du Gouvernement, à l'adresse suivante : http ://www.chlordécone-infos.fr. Ainsi, la mise en évidence d'un lien possible entre l'exposition à la chlordécone et la survenue d'un cancer de la prostate a légitimé a posteriori les mesures prises en vue de réduire l'exposition de la population à la chlordécone. Ce plan a permis la réduction du risque d'exposition à la chlordécone pour des personnes aux ressources limitées et consommant des denrées végétales non soumises à contrôle, grâce au programme relatif aux jardins familiaux, ainsi que l'amélioration des connaissances sur les transferts sol-plantes, ouvrant la voie à des recommandations en termes de culture sur des sols contaminés. Une évaluation du plan d'action 2008-2010, avec mise au point d'indicateurs pour le suivi des nouvelles actions, est actuellement engagée par les inspections générales des ministères les plus concernés. La persistance de la contamination des sols pendant encore de longues années, la mise en évidence récente d'une contamination significative du milieu marin et le caractère récent de nombreuses actions conduites localement, notamment d'information, se conjuguent cependant pour exiger la poursuite de l'effort engagé. S'inscrivant dans la continuité du précédent, mais avec des inflexions nouvelles, le plan interministériel chlordécone 2011-2013 s'organise autour de quatre objectifs : approfondir l'état des connaissances des milieux, et rechercher et expérimenter des techniques de remédiation de la pollution ; consolider le dispositif de surveillance de l'état de santé des populations, et approfondir la connaissance des effets sur la santé ; poursuivre la réduction de l'exposition des populations, en assurant la qualité de la production alimentaire locale et soutenant les professionnels impactés ; gérer les milieux contaminés et assurer une bonne information de la population. Le deuxième plan d'action pour la période 2011 à 2013, met en oeuvre 36 actions pour un montant de 31 Meuros d'ores et déjà dégagés par l'État, dont 3 Meuros gérés au sein d'un programme « interventions territoriales de l'État » chlordécone, auxquels s'ajouteront des crédits visant à financer des activités de recherche en cours de réalisation du plan. Certaines actions pourront être complétées ou adaptées en s'appuyant sur les initiatives des acteurs locaux. Une de ses caractéristiques importantes est qu'il comporte, comme prévu dans la loi de modernisation agricole, un important volet touchant la pêche et les milieux aquatiques, afin de faire face à la contamination, notamment du milieu marin, mise en évidence dans le cadre du premier plan. L'élaboration de ce second plan a été marquée par une concertation plus approfondie, associant l'ensemble des acteurs locaux et la société civile, sous l'égide des préfets de Guadeloupe et de Martinique. Son lancement par le Gouvernement sera utilement prolongé par la poursuite de travaux et la mise en oeuvre du plan par les préfets de Guadeloupe et de Martinique, en collaboration avec les collectivités territoriales. Ce second plan chlordécone représente un important effort de gestion d'une contamination environnementale, marqué par sa volonté de cohérence et sa dimension largement interministérielle.

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