Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la fraude aux examens. En effet, quelque 70,5 % des étudiants français avouent avoir triché lors de leur scolarité. Telle est la conclusion inédite d'une étude sur les facteurs de fraude aux examens menée auprès d'environ 1 815 étudiants inscrits dans une université pluridisciplinaire française par deux chercheurs. L'ampleur de la tricherie n'avait encore jamais été évaluée scientifiquement en France. Or celle-ci apparaît massive. Les étudiants interrogés sont 4,7 % à avoir triché dès l'école primaire, 48,3 % au collège, 35,6 % au lycée et 11,4 % à l'université. En revanche, cette pratique reste occasionnelle et se raréfie dans les études supérieures : si 11 % disent avoir souvent copié sur leur voisin au collège et 10,9 % au lycée, seuls 4,9 % le font à l'université. Utiliser une antisèche est plus fréquent. Et demander ou donner la réponse à un autre étudiant restent les formes «les plus répandues de la fraude». La pratique est d'autant plus courante que les étudiants sont peu informés. Seuls 16 % d'entre eux savent qu'on peut se faire exclure définitivement pour cela. La fraude au bac existe depuis la création de ce diplôme. « L'usurpation d'identité organisée à grande échelle était un des moyens utilisés à une période où il était difficile de contrôler l'identité des individus », expliquent les auteurs. Aujourd'hui, les nouveaux outils de communication, comme le téléphone portable et Internet, ont beaucoup transformé les moyens de tricher. Selon un rapport de l'inspection générale portant sur l'évaluation à l'université en 2007, il existe un écart important de perception du phénomène selon que l'on interroge les professeurs et administratifs qui « minimisent » la triche et les étudiants qui en font une évocation « inquiétante » en ce qui concerne les examens sur « table ». S'agissant de la fraude par plagiat sur Internet, les appréciations sont inversées. Rares sont les étudiants qui deviennent tricheurs en entrant à l'université, selon le rapport. « L'intensité de la fraude aux examens dépend fortement de l'expérience déjà acquise dans ce domaine », disent les auteurs. Qui a triché beaucoup au collège, ou au lycée, trichera beaucoup à l'université. Reste le cas étonnant des meilleurs bacheliers (mention très bien, bien, assez bien) qui se mettent davantage à frauder, une fois à l'université, que ceux qui ont obtenu le bac avec mention passable. Assurés de leur réussite, ils ne cherchent pas à obtenir la moyenne à l'examen, mais à obtenir une meilleure note. « Avant, je n'en ressentais pas le besoin, mais surtout, c'est que je ne pouvais pas. À la fac, lors des examens, la triche est facilement réalisable », explique un bac +2, mention bien, inscrit en sociologie. « J'ai triché parce que les connaissances à avoir étaient trop denses, indigestes », dit une bac +6, médecine, mention très bien au bac. Pour eux, « le gain potentiel vaut le risque quand la probabilité de détection est faible », expliquent les auteurs. À l'inverse, les étudiants faibles tricheraient moins parce qu'ils ne s'attendent pas à en tirer d'avantages suffisants. Autrement dit, ils pensent être en difficulté qu'ils trichent ou non. Autre enseignement, les « première année » fraudent moins que les autres (26 % contre 42 %). Sans doute parce « qu'il leur faut apprendre les règles et les attentes universitaires ainsi que les manières de tricher en usage ». Le phénomène touche par ailleurs tous les milieux sociaux. En revanche, les filles fraudent moins que les garçons. Quelque 35 % d'entre elles n'ont jamais triché contre 25 % des garçons. Elles ont une appréciation plus sévère du phénomène. Par exemple, en mathématiques, 53 % d'entre elles considèrent que demander à quelqu'un le résultat d'un exercice, c'est tricher, alors que seuls 38 % des garçons le reconnaissent. Pourquoi les étudiants trichent-ils ? Les chercheurs évoquent un « malentendu » entre les attentes de l'institution pas toujours explicites et celles d'une partie des étudiants qui jugent la charge de travail trop pesante, l'organisation des examens inadéquate et la transmission des savoirs inadaptée, ce qui conduit certains à tricher « sans avoir le sentiment de véritablement le faire ». En conséquence, elle attire son attention sur les mesures qu'il convient de prendre afin de lutter contre la fraude aux examens.
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