M. Noël Mamère attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'instruction donnée dans les filières scientifiques de l'enseignement supérieur, en université ou dans les écoles d'ingénieur, qui s'appuie d'une part sur des cours à caractère académique, pour l'acquisition des compétences de base (mathématiques, physique, biologie...), d'autre part sur des cours de spécialisation portant sur les métiers préparés par ces filières (technologies aéronautiques, nucléaires, pratiques médicales...) et leur positionnement industriel, économique, social et environnemental. Ces derniers enseignements sont dispensés par des ingénieurs et professionnels des secteurs concernés et n'ont pas le caractère universel des premiers. En effet, malgré leur bonne volonté, il n'est pas possible à ces professionnels de rendre objectivement compte des enjeux liés à leurs activités, d'une part parce que, reconnus parmi les meilleurs de leur branche, ils ne reflètent qu'une expérience polarisée et nécessairement positive de leur milieu ; d'autre part parce qu'ils dépendent toujours de leurs employeurs, qui n'ont pas les mêmes visées éducatives. Ce système d'enseignement conduit inévitablement à reproduire les schémas du passé et fait obstacle à l'évolution nécessaire de nos forces intellectuelles et à l'anticipation des défis du futur, en premier lieu le développement durable. C'est ainsi que dans les cursus énergétiques, par exemple, le nucléaire occupe une place, sinon exclusive, toujours prépondérante, et que les impasses structurelles (déchets, épuisement du combustible, prolifération, malveillance, approvisionnement dans des pays non démocratiques...) sont sensiblement occultées. Inversement, le lobby nucléaire n'hésite pas à s'inviter dans les journaux d'enfants pour y organiser le bourrage de crâne, comme cela a été démontré l'année dernière par le jury de déontologie publicitaire. Il souhaite donc savoir les mesures qu'elle compte prendre pour développer l'ouverture d'esprit, le sens critique, l'esprit de responsabilité et la créativité de nos jeunes étudiants, ainsi que l'équilibre, l'équité et l'efficacité de notre système éducatif. L'introduction, à raison de 1 à 10 % de l'horaire programmé, d'interventions de leaders d'opinion du monde associatif ou même politique, sur les questions controversées des programmes d'enseignement scientifique et technologique, ne pourrait-elle pas être une piste d'intervention ? Il lui demande si par la suite, l'extension de ce dispositif d'une part aux disciplines non scientifiques, d'autre part à l'enseignement secondaire ne pourrait pas être envisagée.
Les formations scientifiques dispensées dans les universités et les écoles d'ingénieurs conduisant à la délivrance d'un diplôme national ou du titre d'ingénieur font l'objet d'une habilitation par l'État. Celle-ci est prononcée sur la base d'un dossier détaillé élaboré par l'établissement concerné et après une évaluation approfondie confiée à l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur ou à la commission des titres d'ingénieur. Cette évaluation porte notamment sur : la nature et le niveau des connaissances et compétences à acquérir ; l'adossement de la formation à la recherche ; la qualité de l'équipe pédagogique, composée notamment d'enseignants-chercheurs et, en proportion variable selon la nature du cursus, de professionnels du secteur d'activité en question ; l'organisation pédagogique et les modalités de contrôle des connaissances et compétences ; les débouchés et l'insertion professionnelle des diplômés. S'agissant du secteur de l'énergie, l'offre de formation des établissements d'enseignement supérieur, tant au niveau de la licence professionnelle, du master et des formations d'ingénieur qu'au niveau doctoral, est très diversifiée, avec des cursus centrés sur une forme d'énergie particulière ou au contraire plus généralistes. Dans tous les cas, l'habilitation est assujettie à la qualité de la formation. Cette dernière a bien entendu aussi pour objet de développer la capacité critique des étudiants et ne saurait ignorer les débats qui traversent la société sur la thématique envisagée. Si la formation est assurée pour l'essentiel par des enseignants-chercheurs, des chercheurs et des professionnels de la spécialité considérée, les établissements peuvent également faire intervenir des représentants de la société civile pouvant représenter des points de vue divers. Ces intervenants sont bien entendus désignés par les établissements, dans le cadre de l'autonomie pédagogique qui leur est conférée par la loi.
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