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Jean-Jacques Urvoas
Question N° 82308 au Ministère du de l'État


Question soumise le 29 juin 2010

M. Jean-Jacques Urvoas attire l'attention de M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur le rapport relatif à la France publié par la commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI), du conseil de l'Europe, le 15 juin 2010. Ses auteurs suggèrent entre autres aux autorités françaises de suivre les recommandations de la HALDE en supprimant la condition de nationalité pour l'accès aux trois fonctions publiques, aux emplois des établissements et entreprises publics et aux emplois du secteur privé, à l'exception de ceux relevant de la souveraineté nationale et de l'exercice de prérogatives de puissance publique. Il lui demande si le Gouvernement entend oeuvrer en ce sens.

Réponse émise le 3 mai 2011

Conformément à l'article 5 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, « les ressortissants des États membres de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'espace économique européen autres que la France ont accès, dans les conditions prévues au statut général, aux corps, cadres d'emplois et emplois. Toutefois, ils n'ont pas accès aux emplois dont les attributions ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique de l'État ou des autres collectivités publiques ». Cet article, issu de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, pose un principe général d'ouverture de tous les corps et cadres d'emplois de la fonction publique française aux ressortissants communautaires. Ces derniers peuvent accéder à la fonction publique par concours (externe ou interne, depuis la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique), par la voie du détachement ou par la voie contractuelle. Il prévoit toutefois une exception pour les emplois dits « de souveraineté », conformément aux restrictions à l'accès aux emplois dans l'administration publique prévues par l'article 45-4 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ancien article 39-4 du traité CE) et par la jurisprudence communautaire. L'article susmentionné dispose, en effet, que la libre circulation des travailleurs, assurée à l'intérieur de l'Union, n'est pas applicable aux emplois dans l'administration publique. La Cour de justice des communautés européennes (CJCE devenue aujourd'hui CJUE) a eu l'occasion, à de nombreuses reprises, d'interpréter de manière restrictive cette dérogation en indiquant que seul l'accès aux postes impliquant l'exercice de la puissance publique et la sauvegarde des intérêts généraux de l'État peut être limité (CJCE, 17 décembre 1980, affaire C-149/79). La CJCE a précisé qu'un emploi ne peut être fermé aux ressortissants communautaires qu'à la condition que les prérogatives de puissance publique liées à cet emploi soient effectivement exercées de façon habituelle et ne représentent pas une part très réduite des activités (CJCE, 30 septembre 2003, affaires C-405/01 et C-47/02). S'agissant des ressortissants extracommunautaires, ces derniers ne peuvent avoir la qualité de fonctionnaire mais ils peuvent être recrutés en qualité d'agents non titulaires, dans les conditions de droit commun et sans qu'aucune discrimination ne s'opère dans les conditions de recrutement de ces agents en fonction de leur nationalité. En outre, ils peuvent être recrutés librement dans le secteur de l'enseignement supérieur et de la recherche ou dans le secteur médical. La loi n° 76-1288 du 31 décembre 1976 et de loi n° 80-1040 du 23 décembre 1980 permettent, par exemple, le recrutement de médecins et de dentistes étrangers dans les hôpitaux publics. Le recrutement des étrangers non communautaires par contrat dans la fonction publique se pratique de la même manière dans d'autres pays européens tels que le Danemark, l'Espagne ou encore la Belgique. Le droit communautaire, en effet, n'impose nullement aux États membres de l'Union européenne d'ouvrir leur marché du travail aux ressortissants extracommunautaires dans les mêmes conditions que pour les ressortissants communautaires. Si la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée, sans s'intéresser spécifiquement à la fonction publique, prévoit une égalité de traitement avec les nationaux en ce qui concerne notamment les conditions d'accès à un emploi salarié et à une activité non salariée (à condition que ces activités ne soient pas liées, même à titre occasionnel, à l'exercice de l'autorité publique), ainsi que les conditions d'emploi et de travail, il n'en demeure pas moins qu'un État membre peut maintenir des restrictions à l'accès à l'emploi ou à des activités non salariées lorsque, conformément à sa législation nationale ou au droit communautaire en vigueur, ces activités sont réservées à ses ressortissants nationaux, aux citoyens de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen (cf. article 11-3-a) de la directive). Dans ce contexte, une modification du droit applicable à la fonction publique française en matière d'ouverture aux ressortissants d'États extérieurs à l'Union européenne n'est pas d'actualité, comme l'a confirmé le Premier ministre en réponse à la délibération de la HALDE n° 2009-139 du 30 mars 2009 par laquelle la Haute Autorité recommandait de supprimer les conditions de nationalité pour accéder notamment aux emplois des trois fonctions publiques.

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