Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pierre Gosnat
Question N° 81777 au Ministère de l'Immigration


Question soumise le 22 juin 2010

M. Pierre Gosnat interroge M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire sur la politique d'immigration de la France aux regards de l'obligation de respect de la convention des droits de l'enfant dont notre pays est signataire. Dans son article 3, la convention consacre l'intérêt supérieur de l'enfant, et engage les États à lui assurer toute la protection et les soins nécessaires à son bien être. À ce titre, il insiste sur l'obligation pour les parties de «veiller à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre son gré à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant ». En outre, l'article 9 de la convention prévoit que « nul enfant ne soit privé de liberté de façon illégale ou arbitraire. L'arrestation, la détention ou l'emprisonnement d'un enfant doit, en conformité avec la loi, n'être qu'une mesure de dernier ressort, et d'une durée aussi brève que possible » (article 37 de la convention). Or, en autorisant leur placement dans des centres de rétention administrative, la politique d'immigration mise en oeuvre par le Gouvernement prive les enfants de sans papiers de leurs droits essentiels de vivre en famille, d'être protégés et éduqués. En 2008, se sont plus de 200 mineurs qui ont été ainsi placés, sans compter des dizaines de milliers de familles démembrées par l'expulsion de l'un des deux parents. Il attire d'ailleurs son attention sur la situation de perpétuelle insécurité matérielle et psychique pour l'enfant. Les professionnels de santé s'accordent à dire que ses enfants confrontés à l'enfermement ou à la séparation du noyau familial, restent traumatisés, développent des angoisses, de l'agressivité et des troubles relationnels. À cela s'ajoute un sentiment d'humiliation, n'ayant pas accès aux soins ou au logement dans des conditions satisfaisantes. Ils se retrouvent contraints de vivre dans la clandestinité en attente du jugement d'expulsion de leurs parents. Il lui demande d'interdire, par respect de la convention des droits de l'enfant, le placement de mineurs dans les centres de rétention.

Réponse émise le 27 juillet 2010

L'article L. 511-4 du CESEDA dispose que l'étranger mineur de dix-huit ans ne peut « faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière... », et l'article L. 555-1 du CESEDA énumère limitativement les personnes pouvant être placées en rétention et écarte de cette énumération les mineurs isolés de dix-huit ans. L'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant dispose que « dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale », et l'article 9-1 que « les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré ». L'administration privilégie le placement de familles dans les centres de rétention administrative plutôt que le placement en locaux de rétention administrative. Néanmoins, les enfants ne sont présents en rétention (CRA ou LRA) que lorsqu'ils accompagnent leurs parents de façon à ne pas en être séparés. Les parents peuvent à tout moment déléguer leur autorité parentale de façon à ce que le (ou les) enfant(s) ne reste(nt) pas avec eux ou le (ou les) confier au service d'aide sociale à l'enfance. Le recours à l'assignation à résidence des parents et de leurs enfants est tout à fait envisageable dans certains cas, mais elle peut s'avérer impossible, par exemple, dans le cas de familles n'habitant pas dans un lieu adapté (squat, hébergement dans des locaux de petite superficie ou avec une forte densité de personnes). Le placement en résidence hôtelière ne permet pas non plus toujours d'obtenir de la part d'un hôtelier un hébergement dans de bonnes conditions. En effet, les prestations hôtelières avec livraison de repas ne sont pas adaptées à l'alimentation des enfants ; des lits pour bébé ou des lieux récréatifs adaptés à l'âge des enfants ne sont pas disponibles partout. De plus, un espace à l'air libre n'est pas forcément accessible ou praticable. Le placement dans un CRA donne, de surcroît, la possibilité d'un suivi médical de la famille et de l'ensemble des conditions de la rétention administrative. Dans sa décision du 12 juin 2006 (CE n° 282275) statuant sur la légalité du décret n° 2005-617 du 30 mai 2005, le Conseil d'État a relevé que les dispositions du CESEDA instituent non pas des mesures privatives de liberté à l'encontre des enfants mineurs des personnes placées en centre de rétention, mais seulement les conditions de leur accueil avec leurs parents, lesquelles relèvent du pouvoir réglementaire. Le Conseil d'État a ainsi confirmé la légalité de l'accueil d'un mineur dans un lieu de rétention dès lors que les conditions de cet accueil sont respectueuses de la réglementation en vigueur, et adaptées à chaque cas. De plus, l'accompagnement, par leurs enfants mineurs, de parents reconduits est une faculté. Il peut y être mis fin dès lors que les parents décident de confier leurs enfants à un tiers. En outre, dans deux arrêts rendus le 10 décembre 2009, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé que le seul fait de placer en rétention administrative un étranger en situation irrégulière accompagné de son enfant mineur ne constituait pas, en soi, un traitement inhumain ou dégradant interdit par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion