Mme Danielle Bousquet attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur un récent rapport d'Amnesty international et de l'Omega research foundation, qui indique que des entreprises européennes participent au commerce de matériel le plus souvent utilisé pour commettre des tortures ou d'autres formes de mauvais traitements. En effet, malgré l'introduction en 2006 de dispositions européennes interdisant le commerce international d'équipements de police et de sécurité conçus pour la torture et les mauvais traitements, des transactions commerciales persistent. Les deux associations demandent à la Commission européenne et aux États membres de l'Union européenne de combler les lacunes juridiques mises en évidence par le rapport, et aux États membres de mettre en oeuvre et de faire respecter la réglementation en vigueur. S'étant engagés à combattre la torture où qu'elle soit perpétrée, les États membres doivent maintenant traduire leurs paroles en actes. Ils doivent réglementer de manière véritablement efficace le commerce européen d'équipement de police et de sécurité, et veiller à ce que ce type d'articles ne se retrouve pas dans la « panoplie type du tortionnaire ». Elle lui demande donc de lui indiquer quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour combler les failles juridiques qui permettent à des entreprises d'exporter des instruments de coercition.
Le règlement 1236/2005 du Conseil de l'Union européenne du 27 juin 2005, concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est entré en vigueur en 2006. Ce règlement a pour objectif la mise en place d'un régime de contrôle spécifique visant à contribuer à la prévention de la violation du droit fondamental de tout être humain de ne pas être soumis à la torture ou à d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s'appuie sur divers textes internationaux : le pacte international relatif aux droits civils et politiques, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, la convention des Nations unies de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Il répond au souhait que la France avait exprimé, pour prévenir la dissémination des biens pouvant servir à torturer ou exécuter les personnes. Ce règlement instaure des mécanismes de prohibition, de contrôle et de retenue des marchandises qui n'ont aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale ou la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L'exportation et l'importation de ces biens peuvent être autorisées s'il est prouvé que ces biens seront utilisés exclusivement à des fins d'exposition publique dans un musée, en raison de leur signification historique. Par ailleurs, est également instauré un dispositif de contrôle pour l'exportation de produits qui peuvent être utilisés pour la peine capitale ou à des fins de torture, mais qui ont aussi des utilisations légitimes. Pour ces équipements, une autorisation préalable d'exportation est exigée. Au niveau national, le non-respect de cette réglementation constitue une violation d'une mesure de prohibition, au sens de l'article 38 du code des douanes, et, par conséquent, un délit douanier qui est prévu aux articles 417 à 428 de ce code (contrebande, importation ou exportation sans déclaration en cas de fausse déclaration en douane ayant pour but ou pour effet d'éluder la mesure de prohibition) et qui est sanctionné par les dispositions de l'article 414 du code des douanes (peine de prison de trois ans, amende comprise entre une et deux fois la valeur des marchandises, confiscation des marchandises avec une aggravation de ces sanctions en cas d'infraction commise en bande organisée). Ce dispositif est d'ailleurs repris dans le rapport de l'Omega Research Foundation (« Appendice premier : législation nationale introduite par les États membres en matière pénale »). « L'article 38 du code des douanes rend illégales l'importation ou l'exportation des biens interdits, y compris ceux couverts par le règlement 1236/2005 de l'Union européenne. Les articles 414 et 417-428 du code des douanes en définissent le régime pénal. » Concernant les formalités douanières, le règlement prévoit une procédure de demande d'autorisation d'exportation ou d'importation de biens repris à l'annexe II et à l'annexe III du règlement 1236/2005 du Conseil du 27 juin 2005. Le formulaire de demande (CERFA12722*01) a été mis en ligne et est accessible à tous les opérateurs. Le rapport des ONG Amnesty International et de l'Omega Research Foundation souligne, à juste titre, qu'il s'agit du premier dispositif multilatéral de contrôle du commerce de ce type dans le monde, permettant ainsi de combler un vide substantiel dans la protection des droits de l'Homme à travers le contrôle des exportations. Si l'évaluation de la mise en oeuvre de l'actuelle réglementation des exportations faisait apparaître des difficultés, le Gouvernement, conjointement avec la Commission européenne et les autres États membres de l'Union européenne, rechercherait les pistes de réforme permettant de contrôler que des biens ne se transforment pas en instruments de coercition, notamment pour ce qui concerne la liste des biens visés en annexe III du règlement 1236/2005 de l'Union européenne, ainsi que leur régime de délivrance d'autorisation d'exportation.
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