M. Albert Facon appelle l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le projet de loi pour l'adaptation du droit interne concernant la dotation des juges du pouvoir de juger les auteurs présumés de crimes internationaux qui se trouvent sur le territoire français, obligation issue du statut de la CPI. Ce projet n'a toujours pas été adopté, la France s'étant pourtant engagée à soutenir la CPI en signant en 1998 et en ratifiant en 2000 le statut de Rome. Mais la ratification ne suffit pas. Pour mettre en oeuvre le statut au niveau national, les juges français doivent pouvoir se fonder sur la loi nationale. Bien que ce texte ait été voté le 10 juin 2008 par le Sénat, il attend depuis d'être inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. S'il était adopté en l'état, les victimes de crimes internationaux les plus graves risqueraient de ne pas obtenir justice dans notre pays et les possibilités de poursuite à l'encontre des auteurs présumés de ces crimes seraient très restreintes. En effet, le projet de loi tel que voté par le Sénat instaure des conditions si restrictives qu'il rend pratiquement impossible la mise en oeuvre de la compétence universelle. Contrairement à la plupart de nos voisins européens qui se sont dotés de lois permettant de telles poursuites, la France risquerait de ne pas détenir les outils juridiques nécessaires à la poursuite des auteurs de graves violations des droits humains. Le 8 juillet 2009, la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale a souhaité, dans un avis adopté à l'unanimité, assouplir le dispositif mis en place par le Sénat et renforcer ainsi la compétence universelle des juridictions françaises. Il lui demande donc si le Gouvernement compte inscrire le projet de loi à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale et prendre en compte l'avis adopté par la commission des affaires étrangères.
En adoptant la loi du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, la France a respecté tous ses engagements au regard de la convention portant statut de la Cour pénale internationale. En effet, cette convention n'impose aux États qui y sont parties ni la création d'incriminations spécifiques dans leur droit interne pour les crimes qui relèvent de la compétence de cette cour, ni la reconnaissance d'une compétence juridictionnelle élargie. La législation française était donc, avant même l'entrée en vigueur du statut de Rome de la Cour pénale internationale, en parfaite conformité avec les obligations résultant de ce statut. Néanmoins, le Gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi comportant toutes les dispositions nécessaires pour incriminer, de la manière la plus complète possible, les comportements prohibés par ladite convention, notamment crimes ou délits de guerre, et prévoyant des règles de complicité élargies. En outre, le Gouvernement a accepté d'instaurer une compétence juridictionnelle élargie pour les tribunaux français, qui constitue une avancée incontestable : aucune disposition du statut de Rome n'impose aux États parties de se reconnaître compétents pour juger les génocides, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre commis à l'étranger, par des étrangers, à l'encontre de victimes étrangères. La France n'a jamais instauré une telle compétence en l'absence de stipulation prévue par une convention internationale. Néanmoins, le Gouvernement a soutenu l'amendement déposé par le rapporteur du Sénat élargissant la compétence des juridictions pénales françaises au-delà de leur compétence habituelle. Depuis 2002, en application des articles 627-4 à 627-15 du code de procédure pénale, qui permettent l'arrestation et la remise à la Cour pénale internationale des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes ou délits de guerre qu'elle ne peut juger en raison de la territorialité des faits, de la nationalité de l'auteur et de la victime, la France peut dénoncer de tels faits à la Cour pénale internationale et en arrêter les auteurs qui se seraient refugiés sur le territoire de la République afin de les remettre à cette cour. En outre, en application des dispositions adoptées par le Parlement, la France pourrait juger elle-même de tels criminels, dès lors qu'ils résideraient habituellement sur le territoire français. Ce texte, adopté à l'unanimité par le Sénat le 10 juin 2008, a été voté par l'Assemblée nationale le 13 juillet 2010. Le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions de la loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale contestées par certains députés et sénateurs et la loi a été promulguée le 9 août 2010.
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