M. André Wojciechowski attire l'attention de M. le ministre de la défense sur l'attitude de l'Iran face à la stratégie nucléaire mondiale. Il rappelle que l'Iran refuse la main tendue de la commission internationale depuis 1995 et que la France a proposé d'enrichir et de retraiter son uranium afin de permettre aux centrales nucléaires de garder une vocation civile. Dans le cadre de l'obligation de contrôle et de transparence, il lui demande ce que compte faire le Gouvernement afin de sauvegarder et de maintenir une dissuasion crédible avec moins d'armes nucléaires.
Membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et État doté d'armes nucléaires au sens du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), la France a toujours refusé de participer à la course aux armements, quel que soit le contexte stratégique. Elle est en outre activement engagée dans la lutte contre la prolifération nucléaire. La France, qui a été le premier État, avec le Royaume-Uni, à avoir ratifié le traité d'interdiction complète des essais nucléaires en 1998, ne procède plus à aucun tir nucléaire. Elle est par ailleurs à l'origine de l'initiative qui a conduit à l'instauration du code de conduite de La Haye sur les tirs de missiles balistiques et elle participe au régime de contrôle des technologies de missiles. En outre, notre pays présente aujourd'hui un bilan exemplaire et unique au monde en matière de désarmement nucléaire. Depuis ces dernières années, les forces et les moyens de la dissuasion française n'ont cessé d'être ramenés au niveau de stricte suffisance. La France a en effet retiré et éliminé toutes ses armes nucléaires sol-sol (destruction des missiles balistiques du plateau d'Albion et des missiles Hadès), diminué d'un tiers le nombre de ses sous-marins nucléaires lanceurs d'engins, démantelé le centre d'expérimentation du Pacifique ainsi que les installations de production de matières fissibles pour les armes nucléaires de Pierrelatte et Marcoule. Le Président de la République a par ailleurs annoncé, en 2008, une mesure supplémentaire de désarmement, avec la réduction d'un tiers, pour la composante aéroportée, du nombre d'armes nucléaires, de missiles et d'avions. Après cette réduction, l'arsenal français comprendra moins de 300 têtes nucléaires, soit la moitié du nombre maximal de têtes que la France a eu pendant la guerre froide. Pour que la dissuasion soit crédible, le chef de l'État doit disposer d'une large gamme d'options face aux menaces. Les forces nucléaires françaises ont donc été adaptées en conséquence et continueront de l'être. La dissuasion nucléaire française repose sur deux composantes : une composante océanique et une composante aéroportée. Leurs caractéristiques respectives, notamment en termes de portée et de précision, les rendent complémentaires. La modernisation de ces deux composantes, engagée depuis plus de dix ans, vise à maintenir sur une longue durée la capacité des forces nucléaires à remplir leurs missions. S'agissant de la composante océanique, cette modernisation se concrétise par l'entrée en service, cette année, du missile balistique intercontinental M51, dont seront dotés les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de nouvelle génération (SNLE-NG). À cet égard, le quatrième et dernier SNLE-NG, Le Terrible, emportera le M51 dès l'admission au service actif, en 2010, de ce bâtiment. Le M51 donnera à la composante océanique une allonge très supérieure et une flexibilité accrue. Il disposera d'un potentiel d'évolution et emportera en 2015 les nouvelles têtes nucléaires océaniques (TNO). Pour ce qui concerne la composante aéroportée, la mise en service opérationnelle du missile aérobie ASMPA sous Mirage 2000N au standard K3 a été prononcée à la fin de l'année 2009, précédant l'arrivée cette année, dans l'armée de l'air et la marine nationale, de la composante définitive à base d'avions Rafale au standard F3. Le missile ASMPA a des performances améliorées au regard de son prédécesseur pour tenir compte, notamment, de l'évolution des défenses aériennes. Il est équipé de la nouvelle tête nucléaire aéroportée (TNA). Cette dernière, comme la TNO, renouvelleront, à l'échéance de leur durée de vie, les têtes actuelles (TN81 et TN75), dont la refabrication à l'identique ne pouvait être garantie sans être testée par l'expérimentation nucléaire. Afin de pallier cette absence de validation nucléaire expérimentale, la conception de ces nouvelles têtes repose sur un concept de charge robuste, validé lors de l'ultime campagne d'essais de 1995. Le maintien de la crédibilité de notre dissuasion repose largement sur les moyens scientifiques et techniques nécessaires à la préservation dans le temps de nos capacités nucléaires. Notre aptitude à assurer sur le long terme, de façon indépendante, la fabrication d'armes fiables et sûres doit être garantie. En l'absence d'essais nucléaires et d'installation de production de matières fissiles à des fins explosives, le programme de simulation est donc un élément clé de la dissuasion. Il n'est pas destiné à la mise au point de nouvelles filières d'armes nucléaires, mais à préserver leur adaptation en fonction des phénomènes de vieillissement des armes, des évolutions des défenses et des mutations scientifiques et techniques. À partir des résultats de l'ultime campagne d'essais, ce programme a pour objectif d'assurer la garantie de fonctionnement des têtes nucléaires en l'absence d'essais nucléaires. Le programme de simulation repose sur les principes suivants : la mise au point de modèles physiques prédictifs pour chaque étape de fonctionnement de l'arme ; l'exploitation de ces modèles par l'intermédiaire de codes de calculs mis en oeuvre par des ordinateurs très puissants tels que TERA100 qui sera mis en service au second semestre de cette année ; la validation expérimentale, notamment grâce au laser mégajoule (LMJ), qui permettra d'effectuer les premières expériences à partir de 2014. Comme le souligne le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, la France continuera à maintenir ses forces nucléaires à un niveau de stricte suffisance. Elle les ajustera en permanence au degré le plus bas possible compatible avec sa sécurité. Le niveau des forces nucléaires françaises ne dépend pas de celui des autres acteurs dotés de l'arme nucléaire, mais seulement de la perception des risques et de l'analyse de l'efficacité de la dissuasion pour la protection de nos intérêts vitaux. Le degré de suffisance continuera donc à faire l'objet d'une appréciation nationale à la fois quantitative, s'agissant du nombre de porteurs, de missiles, d'armes, et qualitative, avec la prise en compte des défenses susceptibles d'être opposées à nos forces. Cette estimation est régulièrement présentée au Président de la République et actualisée dans le cadre du conseil de défense restreint sur les armements nucléaires.
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