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Odette Duriez
Question N° 80350 au Ministère du des sceaux


Question soumise le 8 juin 2010

Mme Odette Duriez attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la controverse que suscite le futur projet de loi visant à introduire le contreseing d'avocat. En effet, l'ordre des experts-comptables considère que ce projet de loi aboutirait à donner aux avocats un avantage compétitif, en leur accordant, seuls et à l'exclusion de tout autre rédacteur d'actes juridiques, la possibilité de contresigner un acte sous seing privé. D'après eux, cette nouvelle faculté compliquerait l'environnement du chef d'entreprise en introduisant une nouvelle catégorie d'acte juridique, générant ainsi une confusion dans les esprits sur leur force contraignante ou leur validité, et un coût supplémentaire. Selon eux, ce projet, en déniant la capacité de contreseing aux experts-comptables, principaux rédacteurs habituels d'actes auprès des TPE et PME, entraînerait l'intervention d'un professionnel supplémentaire, sans véritable valeur ajoutée pour le client. Si le contreseing vise à symboliser l'attestation de la régularité de l'acte rédigé ou du respect d'un devoir de conseil entourant l'échange des consentements des parties, il apparaît légitime aux experts-comptables que tout professionnel habilité à rédiger des actes juridiques puisse affirmer, de la sorte, sa responsabilité professionnelle. Enfin, ils soulignent que la solution est à rechercher d'abord dans l'intérêt de l'usager qui attend des services de qualité au meilleur prix. Ils sont convaincus que l'interprofessionnalité est la voie à explorer en priorité pour mieux servir les entreprises qui recherchent une palette complète de services. Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures elle compte prendre pour répondre à l'attente des experts-comptables.

Réponse émise le 10 août 2010

L'acte contresigné est issu des travaux de la commission présidée par maître Darrois, qui a remis son rapport au Président de la République le 8 avril 2009. Cette commission a proposé que le contreseing de l'avocat confère une efficacité juridique renforcée à l'acte sous seing privé qui en est l'objet. Cette préconisation a été reprise à l'article premier du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées qui a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale le 30 juin 2010. En particulier, l'acte contresigné fera pleine foi de la signature et de l'écriture des parties. Par la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990, le législateur a estimé qu'il convenait que l'activité de consultation juridique et de rédaction d'actes sous seing privé soit exercée sous le statut d'avocat, compte tenu des exigences de ce dernier tant en termes d'expérience et de déontologie que de responsabilité. L'avocat, en tant que professionnel du droit pratiquant une activité contentieuse, est, en outre, le mieux placé pour anticiper les difficultés d'application et d'exécution d'un acte, ce qui lui confère une expérience et une compétence particulières. À l'inverse, il résulte de l'article 22 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable et de l'article 59 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques que les expertspeuvent seulement, et sous certaines conditions, donner des consultations et effectuer des études et des « travaux » d'ordre juridique, lesquels doivent conserver un caractère accessoire. Les seuls actes sous seing privé qu'ils sont autorisés à rédiger sont ceux qui constituent l'accessoire direct de la prestation comptable fournie. Les nouvelles dispositions relatives au contreseing ont vocation à s'appliquer aux actes les plus complexes, pour lesquels l'intervention du spécialiste du droit qu'est l'avocat s'avère nécessaire. Elles n'imposeront aucunement aux entreprises de faire appel à un avocat et ne feront en rien obstacle à la possibilité pour les experts-comptables d'effectuer des travaux d'ordre juridique au profit des entreprises dans lesquelles ils assurent des missions d'ordre comptable de caractère permanent ou habituel ou dans la mesure où ces travaux ou avis sont directement liés aux travaux comptables dont ils sont chargés. Les entreprises pourront ainsi bénéficier de l'expertise de chacune des professionsdu chiffre et du droit en fonction de leurs besoins. Saisie par le Conseil supérieur de l'ordre des experts comptables, l'autorité de la concurrence a d'ailleurs considéré, dans son avis du 27 mai 2010, que les futures dispositions sur le contreseing d'avocat ne contreviennent pas au droit de la concurrence. S'agissant de l'interprofessionnalité capitalistique, la possibilité de constitution de sociétés de participations financières communes qui sera ouverte à plusieurs professions du droit représente une étape importante pour habituer ces professions à travailler ensemble, au profit des particuliers et des entreprises. L'idée d'ouvrir une même possibilité entre professionnels du droit et professionnels du chiffre mérite une concertation approfondie entre les différentes professions concernées. Elle suppose également de prendre en considération ses différentes implications, notamment en ce qui concerne l'exercice en qualité de commissaire aux comptes. C'est pourquoi un groupe de travail spécifiquement consacré à cette question et qui réunit les expert-comptables avec les professions du droit a été mis en place le 17 mars 2010. D'ores et déjà, les débats ont permis de faire émerger un consensus général en faveur de l'engagement d'une réflexion sur l'ouverture de l'interprofessionnalité capitalistique à la profession d'expert-comptable par le biais des sociétés de participation financière des professions libérales, ce qui répond parfaitement aux intérêts de cette profession.

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