M. Bernard Cazeneuve attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les difficultés posées par la réduction des délais de paiement introduit par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008, pour certains secteurs d'activité et plus particulièrement pour les petites entreprises implantées en milieu rural. En Basse-Normandie, les entreprises artisanales de distribution, installation et réparation de matériels agricoles, de matériels de parcs et jardins et d'équipement d'élevage, se trouvent particulièrement pénalisées par la réduction des délais de paiement, qui se révèle être peu adaptée à la forte saisonnalité de ces activités. Ces entreprises doivent constituer leurs stocks en amont de la période de vente, qui par nature reste dépendante des aléas climatiques. Ce système de commandes dites « de pré-saison » satisfait les parties en présence, mais compte tenu de ses caractéristiques, l'application de la réduction des délais de paiement ne pouvait pas aller sans conséquences sérieuses pour ces petites structures. Pour limiter les risques pesant sur la trésorerie de ces entreprises par une réduction brutale des délais de paiement, et comme l'autorise la loi de modernisation de l'économie, un accord dérogatoire a été conclu dans le secteur, entre les organisations représentatives de la construction et de la distribution. Par cet accord, la filière a pu mettre en place un échéancier permettant de réduire progressivement les délais pratiqués jusqu'alors dans la branche, en vue de s'aligner sur les délais légaux au 1er janvier 2012 au plus tard. Cependant, plus l'échéancier avance, plus les petites entreprises de la distribution se trouvent confrontées à la fragilisation de leur trésorerie, a fortiori en période de crise économique et agricole. Compte tenu, par ailleurs, des difficultés de recours au crédit bancaire, il est à craindre que certaines entreprises de la distribution, particulièrement les plus petites, ne fassent faillite, faute de liquidités pour leurs besoins en fond de roulement. Pour préserver au mieux leur trésorerie, les entreprises sont donc tentées de réduire leurs commandes de pré-saison, de sorte qu'elles ne représentent plus que 20 % du chiffre d'affaires du secteur, contre 60 % avant la LME, ou de se tourner vers d'autres fournisseurs européens offrant des délais de paiement plus avantageux. Pour ces raisons, ce secteur d'activité, souhaite soit revenir sur la réduction des délais de paiement pour les commandes de pré-saison, soit permettre, à l'image de ce qui a été introduit par l'Assemblée nationale pour le secteur du livre, que les délais de paiement des opérations de ventes de matériels en pré-saison puissent à nouveau être fixés contractuellement entre les parties. En conséquence, il souhaite connaître les dispositions que le Gouvernement entend mettre en oeuvre afin de tenir compte de l'impact, pour ces entreprises artisanales implantées en milieu rural, de la réduction des délais de paiement par la loi de modernisation de l'économie.
L'ampleur des délais de paiement en France par rapport à la moyenne européenne est une préoccupation majeure du Gouvernement qui s'attache à redresser cette situation en concertation avec les milieux professionnels concernés. La loi a ainsi limité à 60 jours calendaires ou 45 jours fin de mois le délai maximal de paiement et a fixé des intérêts de retard dissuasifs en cas de dépassement, tout en prévoyant des aménagements temporaires dans les secteurs dans lesquels cela était justifié. L'effet de la loi est positif pour la moitié des PME du secteur de l'industrie manufacturière (hors IAA) et des services aux entreprises. Dans le secteur de la mécanique et de la sous-traitance automobile, l'effet est positif pour 55 % des entreprises. Et si l'on restreint le champ aux entreprises de la sous-traitance automobile, la perception de l'effet de la loi est encore plus favorable : pour 67 % des entreprises de ce secteur, la loi a eu un effet globalement positif. Pour 70 % des entreprises fournisseuses, les clients respectent déjà les délais imposés par la loi. La proportion est légèrement inférieure pour les fournisseurs employant moins de 10 salariés. Pour les trois quarts des entreprises de la sous-traitance aéronautique et de la plasturgie, les clients respectent les délais imposés par la loi. L'accord dérogatoire relatif au secteur de l'agroéquipement a répondu au souhait de certains secteurs spécifiques de bénéficier d'un délai pour réorganiser leur modèle économique. Ce délai n'avait donc pas pour objet de repousser la date d'application de la loi : il a été accordé pour que les secteurs concernés revoient l'organisation de leur modèle économique afin que leurs fournisseurs n'encaissent plus le produit de leurs ventes au-delà d'une période moyenne de deux mois. Il convient de rappeler que le Gouvernement est informé de la situation des entreprises qui connaissent un renforcement de leur besoin en fonds de roulement consécutivement à la mise en oeuvre de la LME et que des mesures appropriées en leur faveur ont été prononcées dès 2009 dans le cadre du plan de relance PME. Parmi les mesures édictées figurent notamment celles visant à la création d'un fonds de garantie qui a depuis été renforcé et à la mise en place d'une garantie Oséo ciblée sur les financements bancaires à court terme. Le Gouvernement n'entend toutefois pas remettre cette réforme en cause en autorisant la mise en oeuvre d'exceptions pérennes. La seule exemption à ce jour concerne un secteur tout à fait spécifique, parce que culturel, qui est celui du livre. Il s'agissait notamment d'éviter une remise en cause des fondements de la loi du 10 août 1981 relative au prix du livre et des mesures prises par l'État et les collectivités territoriales en faveur de la librairie. Il appartient donc aux entreprises adhérentes de la Fédération des artisans ruraux de réexaminer le modèle économique qui préside à leurs relations commerciales. Il est ainsi possible de repousser la date de l'opération de vente, sans modifier la date de livraison, afin que le délai de paiement puisse être légalement retardé.
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