M. Gaëtan Gorce alerte M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur la question du prix des aliments peu transformés. L'UFC-Que choisir de la Nièvre vient de mener une enquête sur les prix d'aliments peu transformés, dont la matière première agricole constitue une part prépondérante, et le résultat est sans appel. Alors qu'en septembre, le prix agricole de la volaille était de 2,11 €, celui du porc de 1,34 € et celui du lait de 0,29 €, dans la zone Nevers, Decize, Clamecy et La Charité-sur-Loire, le prix moyen en rayon de l'escalope de poulet était de 11,78 €, 6,58 € pour la côte de porc et 0,82 € pour la brique de lait. Une étude plus approfondie permet de mettre en lumière ces marges injustifiées. En effet, pour de nombreux produits (lait, porc, volaille), les industriels et les distributeurs profitent des variations de prix agricoles, plus particulièrement des baisses, pour accroître fortement leurs marges. S'agissant du lait, entre septembre 2007 et septembre 2009, le prix payé a l'éleveur a baissé de 7 %, alors que pour le consommateur, le prix de la brique de lait Candia a augmenté de 5 %. Pire, la brique de lait à marque distributeur a augmenté de 11 % ! En l'absence de données publiques et en raison de la baisse significative du prix agricole depuis la mi-2008, le maintien de prix élevés laisser apparaître des marges injustifiées dont souffrent les Nivernais. Il est donc nécessaire de développer, lors des périodes de forte variation des prix agricoles, un système de nature réglementaire permettant d'encadrer les marges, si leur progression paraît injustifiée. Un coefficient multiplicateur semble être le seul outil efficace pour limiter la progression des marges pour les produits alimentaires de première nécessité peu ou pas transformés, et au minimum pour les viandes fraîches de boeuf et de porc. En effet, un tel dispositif qui existe depuis 2005 pour les fruits et légumes a fait ses preuves. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre pour lutter contre les marges injustifiées, et notamment sa position sur l'extension aux produits alimentaires peu transformés du coefficient multiplicateur.
La question de l'impact des prix agricoles dans la formation des prix alimentaires est sensible et complexe. Les efforts spectaculaires de productivité tant de l'agriculture que de l'industrie ont permis une baisse importante des prix agricoles et alimentaires depuis des décennies. Puisque, d'une manière générale, les produits alimentaires consommés sont de plus en plus transformés, avec une valeur ajoutée croissante, l'impact du prix de la matière première agricole dans celui du produit consommé est donc plus faible. Toutefois, le poids des produits agricoles est encore très significatif dans l'ensemble des filières des produits frais et certaines variations de prix méritent des explications. Les filières alimentaires sont nombreuses et diversifiées : elles font intervenir plusieurs intermédiaires et possèdent chacune leurs spécificités. Cette situation justifie des études spécifiques sur les mécanismes de formation des prix au sein de la chaîne alimentaire. L'Observatoire des prix et des marges a mis en place depuis plus d'un an des outils opérationnels de suivi des prix et des marges sur l'ensemble des maillons des filières alimentaires. Ces méthodes d'analyse permettent de comparer valablement les prix constatés à chaque stade des filières étudiées. Les premiers travaux de l'observatoire ont été publiés tout au long de l'année 2009 sur la viande de porc, les produits laitiers et les fruits et légumes frais. Accessibles à tous sur Internet, ils sont régulièrement mis à jour. Chacun peut constater que les courbes d'évolution des prix à chaque stade de la filière considérée suivent, avec certains écarts et retards à la hausse comme à la baisse, les variations des prix des matières premières agricoles, pour autant que le coût de cette matière première ait un poids significatif dans le prix du produit final. Le Gouvernement a prévu, dans le cadre du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche actuellement en discussion au Parlement, de renforcer l'action de l'Observatoire des prix et des marges. Celui-ci étudiera tous les produits agricoles et analysera aussi les coûts de production. Il rendra un rapport au Parlement et son président aura la responsabilité d'analyser les données et d'en faire les interprétations nécessaires. À travers le projet de loi, le Gouvernement encourage également la contractualisation des relations commerciales, notamment entre les producteurs agricoles et leurs clients, de façon à poursuivre le processus de rééquilibrage entre les parties prenantes. Ces dispositions, complétées par une action déterminée au niveau européen, permettront à terme d'améliorer le revenu agricole, sans pénaliser le consommateur. Par ailleurs, sous l'égide de l'État, un dispositif d'accord de modération des marges de distribution applicable à l'ensemble des fruits et légumes frais pendant les situations de crise conjoncturelle a été signé par les principales enseignes de la distribution, afin de répercuter au consommateur la baisse des prix au producteur alors constatée. Enfin, l'article L. 611-4-2 du code rural introduit, en périodes de crise conjoncturelle, la possibilité d'instaurer un coefficient multiplicateur encadrant les marges des fruits et légumes périssables, par la limitation du rapport entre le prix d'achat et le prix de vente. Ce mécanisme ne garantit pas le relèvement mécanique des prix à la production, mais peut conduire à une meilleure répercussion de la baisse des prix à la production auprès du consommateur final et favoriser ainsi l'écoulement des marchandises et la régulation des marchés. L'extension du coefficient multiplicateur à l'ensemble des produits agricoles n'a pas été prévue jusqu'à ce jour par la loi.
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