M. Alain Bocquet attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des transports sur la situation dramatique à laquelle sont confrontés les artisans bateliers mobilisés ces dernières semaines pour défendre la profession et revendiquer les moyens de vivre. Les motifs de leurs conflit trouvent leur origine dans la crise économique que nous subissons depuis plusieurs mois. En effet, le manque de fret fluvial au niveau européen pendant la crise a engendré une concurrence des bateaux belges et néerlandais, faisant chuter le prix de la tonne transportée de 7,50 € à 4,80 €, ce qui ne permet pas aux bateliers de vivre décemment, à peine de survivre. En effet, leur chiffre d'affaires a baissé de 50 % impliquant des difficultés importantes pour payer leurs charges, notamment le carburant, premier poste de dépenses qui ne cesse d'augmenter, et engendrant une impossibilité d'investir. Aujourd'hui, même si la reprise du fret fluvial est engagée, les courtiers maintiennent le prix de la tonne transportée au plus bas. Les conséquences sont graves et à court terme (un à deux mois). Beaucoup d'entre eux, ne pouvant plus faire face aux difficultés financières, devront céder leur bateau aux banques, engendrant un véritable drame humain puisque le bateau est à la fois leur outil de travail et la résidence familiale. Par ailleurs, l'avenir du transport fluvial est fortement compromis avec notamment la perte des savoir-faire. Se basant sur les articles 101 et 102 du traité de Lisbonne qui interdisent de travailler à perte, ils exigent du Gouvernement de définir un seuil pour le prix de la tonne transportée qui leur permette d'assurer leur travail et de faire vivre leur famille. Cette situation des bateliers et sa non-prise en compte par le Gouvernement montrent une nouvelle fois les limites du Grenelle de l'environnement, faute d'un engagement réel de l'État. Cela va en effet à contre-courant de ce que le ministère a lui-même fixé comme objectif, soit 25 % de non-routier dans le transport de marchandises d'ici à 2012 alors qu'aujourd'hui les trains et les péniches ne transportent respectivement que 10 % et 5 % des marchandises en France. Tenant compte de ces éléments, il lui demande quelles dispositions le Gouvernement entend prendre d'urgence pour permettre aux artisans bateliers et à la profession de passer le cap très difficile auquel ils sont confrontés et d'avoir les moyens de vivre dignement de leur métier. Il lui demande également de lui faire connaître quelles mesures l'État compte mettre en oeuvre pour concrétiser les engagements pris officiellement en faveur du fret fluvial, dans le cadre du Grenelle de l'environnement.
Le transport fluvial a globalement mieux résisté à la crise que les autres modes de transport. Néanmoins, la baisse des taux de fret et des prix pratiqués a fragilisé bon nombre d'entreprises. Cette situation est connue des services de I'État et la mobilisation est à la hauteur de la crise que traverse actuellement le transport fluvial. Au plan national, comme au plan international, un certain nombre d'initiatives ont été mises en oeuvre afin d'accompagner et de soutenir le transport fluvial. Dans le cadre de la Commission centrale de la navigation du Rhin, a été arrêté, depuis la fin de l'année dernière, le principe d'une application allégée de la clause de sauvegarde prévue au chapitre 24.04 du règlement de visite des bateaux du Rhin. Le dispositif mis en place permet d'écarter, de manière provisoire, l'application de certaines prescriptions techniques, comme les exigences particulières relatives aux dispositifs de commande, ou les règles relatives à la configuration des salles de machines, si elles sont de nature à entraîner des dépenses déraisonnables. Cette mesure, en vigueur depuis le 27 octobre 2009, s'applique dès que le montant des travaux à réaliser dépasse 2 500 EUR. De même, des discussions pour permettre l'adoption d'un tel dispositif au niveau européen sont également en cours dans le cadre communautaire et devraient prochainement aboutir. Au plan national, la définition d'un seuil de prix à la tonne transportée n'a pas été retenue, la réglementation communautaire et française prévoyant la liberté des prix. Un protocole de sortie de crise, signé le 5 mai, par les prestataires de transport public de marchandises par voie fluviale et par les courtiers et commissionnaires de fret fluvial, a permis de rappeler la nécessité, pour l'ensemble de la profession, de respecter la législation sur les prix anormalement bas conformément à l'article 209 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure. Celle-ci interdit la vente à perte et vise à éviter la dérive des prix du marché. L'État s'est engagé à cet égard à renforcer les contrôles sur les entreprises du secteur afin de s'assurer de la mise en oeuvre de cette disposition. La chambre nationale de la batellerie artisanale, pour sa part, a mis à disposition des bateliers un module comptable leur permettant d'évaluer le coût de revient de leurs prestations. Par ailleurs, le Gouvernement a mis en place, sur la période 2008-2012, un plan d'aide doté de 16,5 MEUR, qui doit permettre la modernisation de la flotte par des mesures visant à favoriser la réduction d'émissions de polluants et les économies d'énergie, à encourager l'émergence de nouvelles lignes de transport fluvial et à rajeunir la profession, notamment par l'appui à la transmission de bateaux du parc français à des jeunes repreneurs. Enfin, l'action de modernisation du réseau de voies navigables de France, qui a bénéficié d'une dotation complémentaire de 120 MEUR dans le cadre du plan de relance de l'économie, doit contribuer à moderniser les infrastructures au service des transporteurs fluviaux. L'objectif est de soutenir le développement de ce mode de transport dans le cadre des objectifs fixés par la loi de mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. La forte reprise de l'activité du transport de marchandises par voies navigables les quatre premiers mois de l'année 2010 est encourageante.
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