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Jean Grenet
Question N° 79853 au Ministère de la Santé


Question soumise le 1er juin 2010

M. Jean Grenet interroge Mme la ministre de la santé et des sports sur la politique de prévention des risques liés au tabac. En effet, l'Institut de veille sanitaire vient de révéler que la mortalité par cancer du poumon a été divisée par deux en dix ans chez les hommes de 40 ans, alors qu'elle était multipliée par quatre en quinze ans chez les femmes du même âge. Cette tendance s'explique par un phénomène clairement observable : les hommes ont réduit leur consommation de tabac durant cette période, tandis que les femmes l'ont accrue. Alors que, chez les hommes, la consommation a commencé à diminuer en 1980 grâce aux politiques de prévention, la mortalité des femmes s'est accélérée dans les années récentes, la mortalité par cancer du poumon ayant connue une forte augmentation chez les femmes de 35 à 54 ans en 2000-2007. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'elle envisage face à cette situation.

Réponse émise le 1er mars 2011

Le tabac est aujourd'hui la substance psychoactive pour laquelle la différence de genre est la moins marquée, le niveau de consommation des femmes s'étant progressivement rapproché de celui des hommes au cours du XXe siècle. Les écarts entre hommes et femmes sont plus faibles dans les jeunes générations et ne sont plus significatifs pour les 12-25 ans. Du fait de ce tabagisme accru, les femmes, venues plus tardivement à la consommation de tabac, sont aujourd'hui de plus en plus nombreuses à être victimes du cancer broncho-pulmonaire, alors que son incidence diminue depuis les années 1990 chez les hommes. Chez les femmes françaises, l'épidémie liée au tabagisme en est encore à ses débuts. La mortalité attribuable au tabac est encore faible par rapport à celle des hommes. Néanmoins, on peut s'attendre à observer, avec trente ans de décalage, une épidémie similaire à celle observée au États-Unis où la mortalité par cancer bronchique a dépassé la mortalité par cancer du sein. En effet, d'après le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), le risque relatif d'avoir un cancer du poumon pour une fumeuse, par rapport à une non fumeuse, est de 7,6. De plus, au-delà de ses conséquences en termes de cancers du poumon, la consommation de tabac favorise également le cancer du col de l'utérus (en synergie avec le papillomavirus humain), le cancer des ovaires et le cancer du sein. Les années 2000 ont été marquées par une offensive contre le tabac conduite dans le double cadre stratégique du plan cancer 2003-2008 et de la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004. Dans ce cadre, la politique de renforcement de l'offre de soins a été poursuivie et le soutien du ministère de la santé et de ses opérateurs aux associations s'est fortement accru, aussi bien au niveau national qu'en région. Des mesures réglementaires à l'ampleur inconnue depuis la loi Evin ont été prises : vigoureuse action sur la fiscalité du tabac de l'année 2003-2004 ; mesures spécifiques pour une prévention plus efficace auprès des jeunes avec la loi du 31 juillet 2003, et celles de la loi de santé publique de 2004 ; décret du 15 novembre 2006 qui a renforcé l'interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif. Cette politique complète a porté ses fruits et a eu, sur les plus jeunes et les femmes, cibles prioritaires, des effets durables. Ainsi, d'après l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES), chez les femmes, la prévalence a diminué de 12,5 % chez les 25-35 ans entre 2000 et 2005, et chuté de 37,5 % sur la même période pour les femmes enceintes de la même tranche d'âge. Malheureusement cette tendance n'est pas confirmée par le baromètre santé 2010. La prévalence du tabagisme féminin au quotidien accuse une hausse particulièrement forte, de 7 points, chez les femmes âgées de 45 à 64 ans : elle passe ainsi de 16,0 % en 2005, à 22,5 % en 2010. Par conséquent, des actions d'ordre général (les femmes, enceintes ou non, sont particulièrement sensibles aux actions de prévention destinées à la population générale) et d'autres plus spécifiques doivent être élaborées afin de réduire le tabagisme chez les femmes, avec un objectif « zéro tabac » chez les femmes enceintes. Au-delà des nouvelles mesures visant à renforcer l'efficacité de la lutte contre le tabac, particulièrement chez les jeunes, prises dans le cadre de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (interdiction des « cigarettes-bonbons », qui visent à attirer un public jeune et notamment féminin ; interdiction de vente de tabac portée à 18 ans), la lutte contre le tabac constitue donc un axe fort du plan cancer 2009-2013. Sont ainsi prévus, entre autres, la réduction de l'attractivité des produits du tabac (avec la mise en place, par l'arrêté du 15 avril 2010, des avertissements sanitaires graphiques, dont celui qui rappelle que « Fumer pendant la grossesse nuit gravement à la santé de votre enfant ») et le renforcement de la politique d'aide au sevrage tabagique, avec le développement de l'accès aux substituts nicotiniques notamment pour les femmes enceintes. Enfin, le 26 janvier 2011, le Gouvernement s'est opposé à une proposition de loi qui aurait conduit à assouplir la loi Évin. Cette proposition de loi aurait rendu possible, de façon explicite, la valorisation de l'image du tabac par l'intermédiaire d'oeuvres artistiques. Or, il a été scientifiquement démontré que cette forme de valorisation conduit de nombreux jeunes, et notamment des jeunes filles, vers le tabagisme. Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé reste très mobilisé sur ce point. En complément des mesures législatives et réglementaires, il est indispensable de maintenir un niveau important de sensibilisation de la population et des femmes, au travers de campagnes d'information et d'actions de formation destinées aux professionnels de santé intervenant notamment auprès des femmes enceintes. À cette fin, l'INPES élabore des actions de communication spécifiques afin de poursuivre la mobilisation en direction des femmes : affichette à destination des femmes enceintes : « 0 alcool 0 tabac pendant la grossesse » ; dépliant « grossesse et tabac » ; profils spécifiquement féminins (deux profils 19-35 ans et un profil femme enceinte) au sein du nouveau dispositif personnalisé d'aide à l'arrêt accessible sur le site www.tabac-info-service.fr ; soutien à l'étude SNIPP (Study of Nicotine Patch in Pregnancy) qui a pour objet de s'assurer de l'intérêt du timbre nicotinique chez la femme enceinte fumeuse... En mai et juin 2010, reprenant le thème de la journée mondiale sans tabac (JMST), qui concernait les femmes et le tabagisme, l'INPES a lancé une campagne afin de sensibiliser les femmes de 19-35 ans, en âge de procréer, sur les principaux risques du tabagisme féminin. Trois annonces ont été publiées dans la presse féminine visant à rappeler les risques du tabagisme actif pour les femmes (ménopause précoce, baisse de la fertilité, cancer) et inciter à l'arrêt avec le message : « Arrêtez avant qu'il ne soit trop tard » ; une affichette « Même bien habillée, la cigarette reste un poison » a été diffusée et le spot télévisuel rappelant les risques du tabagisme a été décliné en version masculine et version féminine. L'ensemble de ces mesures, passées, récentes ou à venir, soulignent la volonté constante et réitérée du Gouvernement de mettre en oeuvre une politique complète et toujours renforcée de lutte contre le tabagisme, première cause de mortalité évitable dans notre pays, et particulièrement contre le tabagisme des femmes.

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