M. Daniel Goldberg interroge M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur les emplois soumis à la condition de nationalité. L'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE, ex-article 39 CE) abolit "toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail". L'article 5 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 vient préciser que les emplois publics "dont les attributions soit sont séparables de l'exercice de la souveraineté, soit ne comportent aucune participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique de l'État ou des autres collectivités publiques" sont ouverts aux ressortissants des autres États membres de l'Union européenne. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser les emplois encore soumis à la condition de nationalité.
L'article 45 (ancien article 39), paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit que « la libre circulation implique l'abolition de toute discrimination fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail ». L'article 45, paragraphe 4 de ce même traité indique que « les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux emplois dans l'administration publique ». La Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a interprété de manière restrictive cette dérogation. En premier lieu, la CJCE a jugé que les emplois dans l'administration publique étaient entendus comme ceux qui « comportent une participation, directe ou indirecte, à l'exercice de la puissance publique et aux fonctions qui ont pour objet la sauvegarde des intérêts généraux de l'État ou des autres collectivités publiques » (voir, notamment, arrêts du 2 juillet 1996, Commission/Luxembourg, C-473/93, Rec. p. l-3207, point 2, Commission/Belgique, C-173/94, Rec. p. I-3265, point 2, Commission/Grèce, C- 290/94, Rec. p. I-3285, point 2). En second lieu, la CJCE a précisé que la dérogation à la libre circulation des travailleurs ne saurait être justifiée par le seul fait que des prérogatives de puissance publique sont attribuées par le droit national aux titulaires de l'emploi en cause. Ces prérogatives doivent être effectivement exercées de façon habituelle par lesdits titulaires, et ne doivent pas représenter une part très réduite de leur activité (voir, notamment, arrêts du 30 septembre 2003, Colegio de Oficiales de la Marina Mercante Espanola, C-405/01, Rec. p. I-10391, point 44, Anker e.a., C-47/02, Rec. p. I-10447, point 63). Sous l'influence conjuguée des dispositions du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'interprétation donnée par la jurisprudence de la CJCE, la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires a été modifiée. Un article 5 bisa été inséré par la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique. Cet article dispose que « les ressortissants des États membres de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen autres que la France ont accès, dans les conditions prévues au statut général, aux corps, cadres d'emplois et emplois. Toutefois, ils n'ont pas accès aux emplois dont les attributions soit ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice des prérogatives de puissance publique de l'État ou des autres collectivités publiques ». Cette disposition pose le principe de l'accès des ressortissants communautaires aux corps, cadres d'emplois et emplois publics sans que les statuts particuliers aient à le préciser. L'accès aux emplois publics leur est, en revanche, interdit si les fonctions sont inséparables de l'exercice de la souveraineté ou comportent l'exercice de prérogatives de puissance publique (au sens où l'entend la jurisprudence communautaire précitée). Il convient de remarquer que ces principes sont appliqués tant aux fonctionnaires qu'aux contractuels. Dans un avis du 31 janvier 2002, le Conseil d'État apporte la précision suivante : « [...] doivent être regardés comme participant directement ou indirectement à l'exercice de prérogatives de puissance publique la participation, à titre principal, au sein d'une personne publique, à l'élaboration d'actes juridiques, au contrôle de leur application, à la sanction de leur violation, à l'accomplissement de mesures impliquant un recours possible à l'usage de la contrainte [...] ». L'examen mené afin de savoir si un emploi peut être ouvert à un ressortissant communautaire doit avoir un caractère concret, conformément à la circulaire du Premier ministre n° 5095/SG du 19 septembre 2005 relative à l'accès à la fonction publique française des ressortissants des autres États membres de l'Union européenne. Il importe, au-delà des attributions théoriques du titulaire de l'emploi, d'apprécier la réalité des activités qu'il sera conduit à exercer. À cet effet, le domaine d'activité dans lequel s'inscrit l'emploi, les fonctions précises dévolues à son titulaire et le degré de responsabilité inhérente aux fonctions peuvent être pris en compte. Le ministère de l'alimentation de l'agriculture et de la pêche (MAAP) fait application de ces principes, dans l'ensemble de son champ d'intervention, pour déterminer si les emplois sont accessibles aux ressortissants des États membres de l'Union européenne. L'exemple de l'inspection sanitaire est à cet égard particulièrement représentatif, dans la mesure où de nombreuses fonctions exercées par les agents de ce secteur comportent une participation directe à l'exercice de prérogatives de puissance publique. Dès lors, l'examen des possibilités d'affectation de ressortissants communautaires sur les emplois d'inspection sanitaire s'effectue au cas par cas.
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