M. Michel Vauzelle attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur le rapprochement en cours de la Turquie et de la Grèce officialisé par le récent voyage à Athènes de M. Erdogan. Les accords économiques, environnementaux et de sécurité signés entre les deux pays ont accompagné des appels à la réduction des armements des deux côtés de la mer Égée mais aucune solution concrète concernant notamment la délimitation des frontières maritimes et aériennes n'a été trouvée. Aucun accord n'est également intervenu concernant l'île de Chypre. Les dépenses militaires grecques, disproportionnées au regard des autres pays européens, s'expliquent en très grande partie par les tensions entre ces deux pays. La pacification des rivages de la mer Égée est donc l'une des solutions indispensables à la solvabilité de l'État grec et à la pérennité de la zone euro. Il lui demande donc quelles mesures il compte prendre afin de favoriser ce dialogue et permettre à l'espace euroméditerranéen de devenir l'échelon pertinent pour le règlement de ce type de conflits.
La visite du Premier ministre turc à Athènes, les 14 et 15 mai 2010, était la deuxième visite officielle que le Premier ministre turc effectuait en Grèce. La première remontait à 2004. M. Erdogan et M. Papandreou l'ont qualifiée d'historique, l'objectif étant de relancer tous azimuts des relations bilatérales toujours très conflictuelles. Le déplacement de M. Erdogan, accompagné d'une dizaine de ministres et d'une centaine d'hommes d'affaires, s'est conclu par un certain nombre d'annonces importantes : la signature de 21 accords de coopération économique, culturelle, administrative. On relèvera tout particulièrement la conclusion d'un nouvel arrangement devant permettre effectivement la réadmission en Turquie des migrants illégaux ; l'intention de doubler le volume des échanges commerciaux pour les faire passer à 5 MdEUR annuels ; la création d'un Haut Conseil de coopération gréco-turc. Appelé à se réunir deux fois pas an au niveau ministériel et une fois par an au niveau des Premiers ministres, cette instance pilotera la relation bilatérale et le dialogue stratégique, y compris sur les grands contentieux. Ce sommet est la conséquence de la politique d'ouverture de M. Papandreou envers Ankara, menée dès le lendemain de son élection en octobre dernier. Mais il ne constitue qu'une première étape. Au-delà des déclarations d'intention, il est vrai que les litiges sur le fond demeurent entiers : problème de la délimitation des eaux territoriales, de l'espace aérien et du plateau continental, sort de la minorité grecque orthodoxe en Turquie, question chypriote notamment. Toutefois, l'objectif recherché a été atteint par les deux parties. M. Papandreou, qui fut l'artisan de la détente gréco-turque de 1999, aura réussi à relancer un dialogue bilatéral très essoufflé ces dernières années en lui donnant un cadre institutionnel ambitieux (un sommet gréco-turc par an), qui devra contribuer au règlement des différends. De leur côté, les autorités turques ont proposé, dans le contexte de la crise financière, une baisse réciproque des dépenses militaires (actuellement 2,5 % du PIB en Grèce ; 1,8 en Turquie) pour réduire la tension entre les deux pays. Pour leur part, les autorités françaises, dans le cadre de leurs nombreux entretiens bilatéraux avec les autorités grecques et turques, s'efforcent de rappeler l'importance d'un dialogue grécoturc constructif, afin de résoudre les principaux différends bilatéraux entre Athènes et Ankara. À ce titre, la création d'un Haut Conseil de coopération va certainement dans le bon sens. Sur la question chypriote, nous menons avec les Turcs un dialogue régulier et intense, tant dans le cadre des négociations Turquie-UE (la Commission européenne exige la reconnaissance par Ankara de la République de Chypre) qu'au sein du Conseil de sécurité des Nations unies qui encadre les négociations interchypriotes en vue d'un règlement global et durable.
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