M. Jean-Paul Dupré expose à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi que, selon une étude du Crédoc parue en 2007, un Français sur quatre se priverait de fruits et légumes en raison de leur prix élevé. Force est en effet de constater que le prix de ces produits est de plus en plus cher. Dans le même temps, le revenu des agriculteurs est, lui, en chute libre. L'année 2009 a en effet été particulièrement éprouvante pour la profession puisqu'elle a été marquée par une baisse moyenne des revenus de l'ordre de 34 %, cette diminution considérable faisant elle-même suite à une baisse déjà significative de 20 % en 2008. Cette situation est intolérable pour les producteurs ; elle l'est aussi pour les consommateurs. Il convient donc de prendre des mesures visant à permettre aux producteurs d'avoir une juste rétribution de leur travail et aux consommateurs de payer le juste prix. Une précédente tentative en ce sens en 2004 n'avait pas amélioré durablement la situation et aucune progression significative n'a été constatée depuis. Pire, la loi de modernisation de l'économie de 2008 a renforcé le pouvoir des distributeurs en leur permettant d'exercer davantage de pression sur les producteurs, sans contrepartie pour le consommateur. Un meilleur partage des marges est un enjeu majeur pour assurer le revenu des producteurs et défendre le pouvoir d'achat des consommateurs. Modifier les règles de ce partage nécessite l'intervention de l'État arbitre dans un cadre légal clairement établi et contraignant. Il lui demande quelles mesures elle compte prendre en ce sens.
Les prix et les cours des fruits et légumes sont soumis à une forte volatilité d'une saison à l'autre, du fait des aléas climatiques qui pèsent sur la production, de la périssabilité des produits et de leur caractère peu stockable. Ces spécificités fragilisent l'activité des producteurs. Très soucieux de soutenir cette filière, le Gouvernement a, à plusieurs reprises, saisi le Parlement de projets de lois contenant des dispositions protectrices adaptées en particulier au secteur des fruits et légumes. C'est ainsi que la loi sur le développement des territoires ruraux (LDTR) adoptée le 23 février 2005 et plus récemment la loi Chatel n° 2008-3 du 3 janvier 2008 ont modifié le code de commerce en encadrant les relations entre producteurs et distributeurs. S'agissant plus généralement des relations industrie-commerce, la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 (LME) a permis une diminution des marges arrière et ouvert la porte à la négociabilité. En outre, la loi permet de mieux appréhender les avantages financiers abusifs que la distribution peut être amenée à solliciter des producteurs et qui sont de nature à les fragiliser économiquement. Ces mesures ont été accompagnées par la création d'une brigade de contrôle spécifique de la LME au sein de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) permettant de mettre en oeuvre une politique contentieuse dynamique afin d'utiliser pleinement les dispositions nouvelles issues de la LME en cette matière. Attaché, en outre, à la transparence en matière de prix et de marges, le Gouvernement a mis en place un observatoire des prix et des marges qui publie régulièrement, depuis mars 2008, l'évolution des prix des produits de grande consommation sur le site Internet de la DGCCRF. Un comité de pilotage dédié au secteur agricole et agroalimentaire réunit, depuis la fin de l'année 2008, les représentants de la profession agricole, des industriels, des distributeurs et des consommateurs. Les travaux décidés par ce comité de pilotage font l'objet de publications mensuelles détaillées sur le site de l'observatoire des prix et des marges et ont notamment concerné les fruits et légumes. Se substituant à l'observatoire en place, un observatoire de la formation des prix et des marges a été créé par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) qui vient d'être votée par le Parlement. Ce nouvel observatoire étudiera les coûts de production au stade de la production agricole, les coûts de transformation et les coûts de distribution dans l'ensemble de la chaîne de commercialisation des produits agricoles. Il transmettra chaque année un rapport au Parlement pour faire le point de ses travaux et disposera de moyens renforcés par la désignation d'experts indépendants et le lancement d'études complémentaires. La même loi, dans le souci de garantir un meilleur revenu aux producteurs agricoles vient d'interdire toute forme de remises, rabais et ristournes lors de l'achat de fruits et légumes frais. Enfin, cette loi introduit un dispositif incitatif permettant de conclure un accord de modération de marges entre une entreprise de distribution et l'État. Le texte soumet les distributeurs, dont le chiffre d'affaires en fruits et légumes dépasse 100 MEUR, à une taxe additionnelle à la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) dont ces distributeurs peuvent s'exonérer en signant des accords de modération des marges concernant les fruits et légumes frais en période de crise conjoncturelle. Le non-respect de ces accords ou le retard dans leur mise en oeuvre expose le distributeur concerné à une amende civile pouvant atteindre 2 MEUR. Dans l'attente de l'entrée en vigueur de ce dispositif, le Président de la République a réuni, le 17 mai 2010, les représentants de 7 grandes enseignes de distribution qui ont signé, avec l'État, pour l'année en cours, des accords de modération des marges de distribution applicables aux fruits et légumes frais en période de crise conjoncturelle.
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