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Philippe Duron
Question N° 78550 au Ministère du Travail


Question soumise le 11 mai 2010

M. Philippe Duron attire l'attention de M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur la situation des salariés de l'entreprise Tréfimétaux de Dives-sur-Mer dans le Calvados. Durant leur activité professionnelle, nombre de salariés ont été contaminés par l'amiante, dans une région, la Normandie, particulièrement touchée par ce fléau sanitaire. Un arrêté de classement avait, déjà, été pris après enquête des services de l'État. Malheureusement cet arrêté a été annulé en 2007 par la cour d'appel de Nantes pour non-défense de l'État. Par ailleurs, il s'étonne que la directive européenne n° 83/477/CE du 19 septembre 1983, relative à la protection des travailleurs contre les risques liés à une exposition à l'amiante pendant le travail, ne soit pas appliquée dans le Calvados. De plus, les personnels de l'usine Tréfimétaux, constitués en collectif des victimes de l'amiante, soulèvent l'incompatibilité avec la directive précédemment citée du taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 25 % qui leur est applicable. En effet, les demandes d'indemnisation ne sont prises en compte qu'au-delà de ce seuil, au détriment de nombreuses victimes et familles de victimes. Ce dispositif d'indemnisation semble inéquitable comme l'a souligné Monsieur le Médiateur de la République. Il lui demande quelles mesures ses services pensent pouvoir prendre afin de garantir le respect du droit national sur l'ensemble du territoire et de le mettre en conformité avec les normes européennes.

Réponse émise le 19 juillet 2011

Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux revendications du collectif amiante de l'établissement Tréfimétaux situé à Dives-sur-Mer dans le Calvados. Le 23 décembre 2010, le Conseil d'État s'est prononcé sur le pourvoi en cassation formé par M. Jean-Pierre Rocard et le collectif des victimes de l'amiante Tréfimétaux, à l'encontre de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 30 octobre 2008, qui a annulé l'arrêté d'inscription de cet établissement du 7 mars 2007 ainsi que le jugement du 5 février 2008 du tribunal administratif de Caen censurant le refus d'inscription de l'établissement Tréfimétaux sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (CAATA). Le Conseil d'État a confirmé que les opérations de calorifugeage à l'amiante au sein de l'établissement Tréfimétaux n'ont pas été suffisamment significatives pour justifier son inscription sur la liste de ceux susceptibles d'ouvrir droit à la CAATA. En effet, le faible nombre de salariés employés pour effectuer de telles opérations, chiffre qui n'a pas été sérieusement contesté par M. Rocard et le collectif des victimes de l'amiante, n'a pas permis de regarder l'établissement Tréfimétaux comme ayant eu une part significative de ses activités consacrée au calorifugeage à l'amiante, sachant que l'inscription d'un établissement ouvre le bénéfice de l'allocation de CAATA à l'ensemble des salariés quel que soit le niveau d'exposition. Par ailleurs, le Conseil d'État a considéré que le degré d'exposition des salariés aux poussières d'amiante et l'existence de maladies professionnelles liées à l'amiante recensées dans un établissement ne sont pas, par eux-mêmes, de nature à justifier légalement l'inscription d'un établissement sur ladite liste. En conséquence, les voies de recours de M. Rocard et du collectif des victimes de l'amiante, visant à obtenir l'inscription de l'établissement Tréfimétaux, sur la liste de ceux susceptibles d'ouvrir droit à la CAATA, sont désormais épuisées. L'arrêt du Conseil d'État ne remet pas en cause l'avantage individuel acquis au maintien de l'allocation de CAATA des anciens salariés de Tréfimétaux qui en bénéficient déjà. Toutefois, ceux qui n'ont pas obtenu à la date du 23 décembre 2010 une décision favorable au versement de cette allocation par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie (CARSAT ex-CRAM) ne pourront pas se prévaloir, afin de bénéficier d'une telle allocation, de droits acquis au titre de l'arrêté d'inscription de l'établissement Tréfimétaux qui a été en vigueur avant son annulation par le juge. En outre, l'attention du Gouvernement a été appelée sur les conditions d'application de la directive 83/477/CEE et sur l'inscription de nouveaux cancers (colon, prostate et vessie) au sein des tableaux de maladies professionnelles n° 30 et n° 30 bis relatifs aux affections liées à l'amiante. La directive 83/477/CEE du 19 septembre 1983, modifiée à plusieurs reprises et codifiée par la directive 2009/148/CE du 30 novembre 2009 relative à la protection des travailleurs contre les risques liés à une exposition à l'amiante pendant le travail, concerne exclusivement les règles de prévention des expositions à l'amiante et non la réparation des maladies professionnelles liées à l'amiante. Cette directive a été intégralement transposée en droit français. Sur le plan de la réparation, une recommandation européenne (recommandation R. 2003-670 CE) et une recommandation internationale établie par l'Organisation internationale du travail (recommandation n° 194-2002) proposent, à titre indicatif, une liste de maladies professionnelles reconnues. Les cancers du colon, de la prostate, de la vessie ainsi que le cancer gastro-intestinal ne figurent actuellement dans aucune de ces deux listes. Bien que ces recommandations n'aient pas de valeur obligatoire pour les États, le gouvernement français s'attache à les prendre en compte. En effet, il convient de souligner que le système français de reconnaissance des maladies professionnelles permet la prise en charge de l'ensemble des cancers dus à l'amiante. D'une part, les personnes, ayant été exposées à l'amiante, victimes de cancers broncho-pulmonaires et de mésothéliomes bénéficient de l'application du principe d'origine professionnelle en application des tableaux n°s 30 et 30 bis de maladies professionnelles. D'autre part, les cancers qui ne sont pas inscrits dans les tableaux n° 30 et n° 30 bis (cancers du larynx, du colon, de la prostate, de la vessie et cancer gastro-intestinal notamment) peuvent être pris en charge au titre du système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles créé en 1993. Ce système, fondé sur un examen individuel de la demande du salarié devant un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles permet d'indemniser des maladies qui ne sont pas mentionnées dans les tableaux s'il est établi qu'elles sont directement et essentiellement causées par le travail habituel de la victime et qu'elles entraînent un taux d'incapacité permanente d'au moins 25 % - ce qui est systématiquement le cas pour les cancers (alinéa 4 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale). Enfin, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, afin de prendre en compte les difficultés auxquelles sont confrontées les personnes sur lesquelles le président du collectif a attiré son attention, a personnellement écrit à chacun d'eux. À cette occasion, il leur a fait part des pistes possibles à examiner avec la CARSAT de Normandie sur le volet droit à la retraite et avec les responsables de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) et de Pôle emploi du Calvados, en vue de rechercher la solution la mieux adaptée à la situation individuelle de chacun d'entre eux.

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