M. Jean Grenet alerte Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nécessité de réformer les mises sous tutelle ou curatelle des personnes majeures. En effet, chacun s'accorde sur le diagnostic : la refonte des dispositions de la législation, datant de près de quarante ans, s'avère indispensable en raison de leur inadaptation. En avril 2000, le rapport de la commission Favard avait souligné les insuffisances de la loi du 3 janvier 1968, notamment un certain nombre de disparités entre les associations tutélaires et les tutelles privées quant à la nature de la protection exercée, ainsi que le mode de financement. Les mesures de protection sont prononcées par des juges de tutelle qui sont peu nombreux et qui, de ce fait, ont à gérer un nombre considérable de dossiers et doivent souvent statuer dans l'urgence. Les familles, les associations, les gestionnaires de tutelle sont dans l'attente d'une évolution juridique qui irait dans le sens d'un plus grand respect des libertés individuelles, souvent malmenées par des mesures incapacitantes mises en place sans constatation d'une altération des facultés personnelles. Il est nécessaire de distinguer ce qui relève de l'accompagnement juridique et ce qui relève de l'accompagnement social. En outre, les associations tutélaires espèrent l'adoption de mesures de reconnaissance de la profession, qu'il s'agisse de leurs délégués ou des gérants de tutelles privées. Un statut pour l'ensemble des tuteurs professionnels est donc particulièrement attendu. Aussi, il lui demande si elle envisage une modernisation du dispositif de mise sous tutelle ou curatelle.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2009, rénove l'ensemble du dispositif de protection des personnes vulnérables. Elle consacre les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité des mesures judiciaires de protection. En conséquence, le régime des tutelles et curatelles est recentré sur les personnes réellement atteintes d'une altération de leurs facultés personnelles. Seule une personne atteinte d'une altération de ses facultés mentales ou d'une altération corporelle de nature à entraver l'expression. de la volonté pourra bénéficier d'une mesure de protection juridique. Cette altération devra être constatée par un médecin agréé qui rédigera un certificat circonstancié et précis. Si la nécessité d'une protection est médicalement établie, elle ne sera prononcée que s'il ne peut être pourvu aux intérêts de la personne par d'autres dispositifs de protection moins restrictifs de droits, tels que ceux résultant du droit commun de la représentation, des règles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux ou des régimes matrimoniaux. Si une mesure de protection judiciaire s'impose, elle devra être proportionnée et individualisée en fonction de l'altération des facultés. Dans cette optique, la réforme consacre la protection de la personne elle-même et non plus seulement celle de son patrimoine. Elle impose ainsi une meilleure prise en compte de la volonté de la personne à protéger et de ses droits et libertés individuelles, notamment à travers l'affirmation du principe de l'audition de la personne protégée. La réforme donne une place plus importante dans le processus judiciaire à la famille et aux proches qui ont qualité pour saisir le juge d'une demande de protection d'un des leurs. Ils doivent être systématiquement entendus avant toute décision, - même s'ils ne sont pas auteurs de la requête auprès du juge -, ils doivent être désignés en priorité comme curateur ou comme tuteur par le juge et celui-ci doit prendre en considération leurs recommandations lors du choix du curateur ou du tuteur. Dés lors que le juge aura connaissance de leur existence, les enfants d'une personne seront informés de la procédure de protection la concernant. La loi du 5 mars 2007 renforce l'obligation des personnes en charge d'une mesure de protection de rendre compte de leur activité. Elle maintient l'exigence d'établir un compte de gestion périodique et prévoit désormais celle d'établir un rapport sur les actes concernant la protection de la personne. Le compte de gestion est soumis à la vérification et à l'approbation du greffier en chef, et en cas de difficulté, au contrôle du juge des tutelles. La loi du 5 mars 2007 unifie l'activité des curateurs et tuteurs professionnels désormais appelés « mandataires judiciaires à la protection des majeurs ». Ils obéiront ainsi à des règles communes, organisant leur formation et leur compétence, leur évaluation et leur contrôle, leur responsabilité et leur rémunération. La réforme inclut l'ensemble de l'activité tutélaire dans le droit commun de l'action sociale et médico-sociale, et soumet en conséquence ces professionnels à des procédures d'agrément ou d'autorisation selon qu'ils exercent à titre individuel ou dans un cadre associatif ou institutionnel. Elle instaure des conditions précises et strictes d'accès à l'activité des « mandataires judiciaires à la protection des majeurs » (exigences de qualification, de formation, d'expérience professionnelle, de moralité, de garantie de responsabilité) : ces conditions doivent être remplies pour permettre l'agrément et l'inscription des personnes sur la liste établie par le préfet en concertation avec le procureur de la République. La réforme instaure, en outre, un contrôle de leur activité sous l'autorité du préfet et du procureur de la République, et prévoit des sanctions. Le financement de l'activité de ces professionnels est également harmonisé et défini selon des critères plus équitables, plus précis et plus clairs. Il est ainsi mis un terme aux disparités souvent dénoncées. Enfin, la réforme instaure au bénéfice des personnes en grande difficulté sociale mais dont l'état de santé ne justifie pas de mesures de protection juridique, une mesure d'accompagnement social personnalisé mise en oeuvre par les départements. Cette mesure sociale qui doit permettre à la personne de retrouver son autonomie, peut être suivie, en cas d'échec, d'une mesure d'accompagnement judiciaire, ouverte sur saisine du procureur de la République après transmission par les services sociaux d'un rapport circonstancié sur la situation de la personne.
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