M. Philippe Tourtelier appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la question du rapatriement d'enfants haïtiens en instance d'adoption. En effet, les familles d'adoptants françaises en attente de leurs enfants sont de plus en plus angoissées et se sentent totalement impuissantes face au danger que courent leurs enfants restés en Haïti. Le récent décès d'un jeune enfant de trois ans, d'une infection pulmonaire, dans un hôpital de Pétionville, sur les hauteurs de Port-au-Prince, faute de soins appropriés, ne fait qu'aggraver leur angoisse. Avec la saison des pluies, l'état sanitaire se dégrade de jour en jour et d'autres drames sont à craindre. C'est pourquoi il lui demande de tout mettre en oeuvre pour évacuer en urgence tous les enfants pourvus d'un jugement et, d'autre part, face à cette situation exceptionnelle, mettre en place, en accord avec les autorités haïtiennes, des mesures exceptionnelles afin d'accélérer les procédures en cours et permettre ainsi aux enfants de rejoindre leur famille dans les plus brefs délais.
Les autorités françaises s'attachent à traiter au mieux les procédures d'adoption en cours avant le séisme survenu le 12 janvier en Haïti, ce dans le plus grand souci de l'intérêt de l'enfant. L'adoption dans ce pays revêt un caractère particulier. Les enfants ne sont, pour la plupart, pas orphelins mais confiés par les parents biologiques aux crèches en vue de leur adoption. Ils ne sont pas abandonnés au sens où nous l'entendons. Il s'agit la plupart du temps d'un « laisser-partir », sans rupture totale des liens, vers une opportunité de vie meilleure, ailleurs. Haïti ne reconnaît que l'adoption simple, aussi les parents biologiques rencontrent-ils les parents adoptifs quand ceux-ci viennent chercher l'enfant et demandent à recevoir des nouvelles, le plus souvent par l'intermédiaire des crèches. Il a d'abord été procédé à un transfert accéléré directement vers la France métropolitaine des enfants ayant bénéficié d'un jugement d'adoption à partir du 22 janvier, dans le cadre du dispositif d'urgence. Le constat des difficultés en résultant pour les enfants a conduit à modifier le dispositif. Les acheminements se poursuivent ainsi, depuis le 12 mars, au rythme d'une vingtaine par semaine, via un centre d'accueil situé à la Guadeloupe, où les familles se rendent pour prendre en charge leurs enfants. Ce centre leur fournit un accompagnement médical et psychologique, afin de préparer la rencontre dans la perspective du rapprochement avec la démarche normale d'adoption. Au total, 522 enfants ont été acheminés à la date du 12 avril 2010. Concernant les enfants qui se trouvaient en voie d'adoption, mais pour lesquels la procédure n'a pas encore atteint le stade du jugement, il convient de rappeler que ceux-ci ne sont pas encore adoptés, au regard de la loi haïtienne, même si des liens affectifs ont pu se créer avec les familles lorsqu'elles les ont rencontrés. Ces enfants ne pourraient, en France, disposer d'un statut et être adoptés légalement par leurs familles françaises. Les autorités haïtiennes ont, en outre, montré leur volonté de rétablir le fonctionnement de leurs institutions afin de poursuivre les procédures, et il nous appartient de respecter cette volonté. L'IBESR (Institut du bien-être social et de la recherche), chargé de valider les apparentements, a repris ses activités et certains tribunaux fonctionnent à nouveau. Les autorités françaises souhaitent que les procédures d'adoption en cours puissent se poursuivre, dans un cadre légal et dans l'intérêt supérieur des enfants. Elles maintiennent un contact étroit avec les autorités haïtiennes et suivent avec la plus grande attention l'évolution des dossiers d'adoption dont les procédures ont été engagées en Haïti avant le séisme, les familles concernées en étant régulièrement informées. Le service de l'adoption internationale (SAI) du ministère des affaires étrangères et européennes s'est attaché à remédier aux problèmes dus à la perte, lors du séisme, des documents relatifs aux procédures d'adoption, dont se préoccupe l'honorable parlementaire. Ainsi, il a entrepris de reconstituer les dossiers à partir des pièces fournies par les familles ou les organismes autorisés pour l'adoption (OAA). Or, la proportion très importante (70 %) des adoptions menées à titre individuel s'est révélée source de graves difficultés, non seulement pour le SAI, qui a dû reconstituer des dossiers dont il n'avait habituellement connaissance qu'en fin de procédure, mais aussi pour les familles confrontées à la nécessité d'apporter la preuve de l'état d'avancement de leur demande d'adoption. S'agissant des conditions sanitaires des crèches, celles-ci sont régulièrement visitées par des équipes de notre ambassade, de sorte qu'il soit pourvu aux besoins des enfants, en liaison avec l'UNICEF et le programme alimentaire mondial. Concernant l'enfant Jephté Simon Rosener, évoqué par l'honorable parlementaire, notre ambassade à Port-au-Prince a procédé à des vérifications. Il apparaît que nombre d'éléments restent à élucider sur les circonstances de sa disparition. Des investigations sont aussi menées afin de vérifier les déclarations faites par la directrice de la crèche et les membres de la famille de Jephté Simon. À ce stade, le mystère s'épaissit autour de la disparition de cet enfant, confié à une crèche qui se révèle présenter de sérieuses défaillances dans la prise en charge des enfants. L'enquête de police, qui a été ordonnée, est toujours en cours.
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