Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud interroge Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les activités professionnelles en détention. En effet, la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 prévoit une "obligation d'activité" en prison : "toute personne condamnée est tenue d'exercer au moins une des activités" proposées, dès lors que cette dernière a "pour finalité la réinsertion" et lui est adaptée. Or, comme le souligne le deuxième rapport annuel du contrôleur général des lieux de privation de liberté, l'offre de travail est "insuffisante" car touchée de plein fouet par la crise économique tandis que sont constituées des listes d'attente pour les activités sportives. En somme, seule une minorité de détenus ont accès à des activités. Le contrôleur général préconise notamment de laisser "davantage d'initiatives et de responsabilités aux détenus" et d'autoriser davantage leurs regroupements, "faute de quoi, elle risque de conduire à beaucoup de faux-semblants et d'amener des condamnés à avoir des activités qui n'en sont pas ou qui ne sont d'aucune utilité pour leur retour à la vie sociale". Elle l'interroge sur les moyens concrets mis en oeuvre afin de lutter contre l'oisiveté en milieu carcéral afin de donner des gages à la réinsertion des détenus.
Les actions de réinsertion en milieu carcéral constituent une priorité pour l'administration pénitentiaire. Elles permettent d'occuper utilement le temps passé en détention et préparent les personnes incarcérées à revenir dans la société civile dans les meilleures conditions possibles. Ces activités de réinsertion sont diverses. Certaines d'entre elles sont rémunérées : il s'agit de la formation professionnelle et du travail. En 2009, 22 367 personnes détenues ont eu, en moyenne mensuelle, une activité rémunérée. La formation professionnelle a, en 2009, concerné 20 455 personnes détenues. Au total, 3 601 661 heures stagiaires ont été dispensées. 2 960 200 ont été rémunérées. La rémunération horaire est fixée par décret à 2,26 EUR, quelle que soit la formation. Les formations suivies en 2009 étaient en majorité des actions qualifiantes et préqualifiantes, notamment dans les secteurs du bâtiment, de l'informatique, de la restauration, de la mécanique. La formation professionnelle est le plus souvent orientée vers les métiers en tension ou porteurs. Il convient de souligner que les formations professionnelles mises en place dans les établissements se sont largement diversifiées au cours des dernières années. Ainsi, des opérations de sensibilisation sur des métiers novateurs touchant, par exemple, à l'environnement au développement durable sont menées dans les établissements pénitentiaires pour permettre aux personnes détenues de développer des compétences désormais recherchées à l'extérieur. Il est difficile de prévoir un accroissement du nombre de personnes détenues bénéficiant de formations professionnelles, en raison du caractère contraint des enveloppes allouées par le ministère en charge de l'emploi à l'administration pénitentiaire. Il importe d'ailleurs de souligner que des efforts financiers significatifs ont été fournis par les directions interrégionales des services pénitentiaires pour maintenir et même développer des actions de formation. Pour ce qui concerne le travail en détention, 15 947 personnes détenues ont exercé en 2009, en moyenne mensuelle, une telle activité (ce chiffre n'inclut donc pas les personnes écrouées sous aménagements de peine tels que le bracelet électronique ou la semi-liberté), selon des modalités diverses : 52 % d'entre elles étaient employées en production et 48 % au service général. Le travail en production est réalisé pour partie dans les ateliers du service de l'emploi pénitentiaire (SEP). Le SEP gère 48 ateliers de production, implantés dans 27 établissements pénitentiaires recevant majoritairement des détenus condamnés à de longues peines. Il intervient dans des secteurs d'activités très variés (confection, menuiserie, informatique, numérisation d'archives audiovisuelles). La rémunération mensuelle moyenne par poste de travail au SEP est de 525 EUR. L'autre partie du travail en production est gérée par des entreprises privées, concessionnaires de l'administration pénitentiaire ou titulaires des marchés de fonctionnement des établissements à gestion déléguée. Elles font réaliser différents types de travaux à la population carcérale, notamment des tâches techniques de montage ou d'assemblage, du conditionnement ou du façonnage. La rémunération mensuelle moyenne par poste de travail est de 370 EUR. Dans les activités de service général, les personnes détenues sont employées par l'administration pénitentiaire pour les besoins de fonctionnement des établissements. Elles effectuent des tâches dans le domaine de l'hôtellerie (restauration, blanchisserie, nettoyage, cantine) ou de la maintenance (peinture, maçonnerie, plomberie). La rémunération mensuelle moyenne nette par poste de travail est de 233 EUR. Afin d'augmenter le pourcentage de personnes détenues exerçant une activité professionnelle, un programme dénommé « Entreprendre » a été élaboré en début d'année 2008. Ce programme concerne l'ensemble des établissements pénitentiaires ; il comporte plusieurs axes d'intervention, qui ont trait à l'organisation du travail, à l'amélioration des infrastructures dédiées à ces activités, à la formation du personnel en relation avec les ateliers, à la mise en place d'une alternance travail-formation au service général et à l'établissement de relations plus soutenues avec les partenaires économiques. Il s'agit donc d'un plan destiné à améliorer les perspectives du travail en détention en intervenant sur les aspects structurants du fonctionnement des établissements pénitentiaires. Les bilans quantitatif et qualitatif effectués en 2008 et 2009 montrent un déploiement progressif des différents axes de ce plan au sein des directions interrégionales pénitentiaires. Selon les partenaires économiques avec lesquels l'administration pénitentiaire est en relation suivie, le plan « Entreprendre » a bien permis d'améliorer l'offre de service faite aux entreprises, grâce à une meilleure prise en compte de la dimension travail par les établissements pénitentiaires. Pour autant, la progression souhaitée du nombre d'emplois a été contrariée par la crise économique, qui a affecté les activités de production dès le troisième trimestre de l'année 2008, ainsi qu'en 2009. La poursuite des efforts déjà entrepris dans le cadre de ce plan, alliée à une conjoncture économique légèrement plus favorable en 2010, devrait permettre un accroissement du nombre de personnes incarcérées exerçant une activité professionnelle. La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 tend également à améliorer la situation à ce titre : tout d'abord, elle dispose que toute personne condamnée est tenue d'exercer au moins l'une des activités qui lui sont proposées par le chef d'établissement et le directeur du service d'insertion. En outre, elle impose la généralisation de l'acte d'engagement, document qui permet aux personnes détenues d'être sujet de droit, de fixer les éléments relatifs à l'organisation et aux conditions de travail. Par ailleurs, elle prévoit, pour les personnes détenues exerçant un travail pénitentiaire, une rémunération minimale prévue par décret et indexée sur le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). Enfin, la loi pénitentiaire prévoit une expérimentation de décentralisation des crédits de la formation professionnelle, pour laquelle plusieurs régions se sont portées volontaires. Il importe de préciser également que le nouveau programme immobilier, en cours d'élaboration, tient compte des exigences de la loi pénitentiaire et prévoit à ce titre une augmentation du nombre de locaux destinés aux activités dans les futurs établissements.
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