M. François Grosdidier appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'indignation créée en Moselle par l'annonce d'un projet de suppression de la cour d'appel de Metz. Les Mosellans n'ignorent pas la nécessité d'une refonte de la carte judiciaire nécessaire après un demi-siècle d'exode rural. Ils savent que, parmi les pistes avancées, il y avait certes celle d'une cour d'appel par région et d'un TGI par département, mais aussi qu'il était précisé que rien ne se ferait avant concertation avec les professionnels de justice et les collectivités territoriales, que les principes ne seraient pas appliqués mécaniquement et que le principe d'une seule juridiction ne le serait pas nécessairement dans les collectivités les plus peuplées. Non seulement la Lorraine est une région à la démographie forte, mais elle est la seule de France où coexistent deux régimes juridiques distincts, le droit commun et le droit local alsacien-mosellan. Cette situation particulière justifierait le maintien des cours d'appel de Metz et de Nancy. Cependant, si dans sa volonté de rationalisation, le gouvernement décidait de fusionner les deux cours d'appel de Lorraine, il paraîtrait aussi rationnel de regrouper les moyens des deux cours d'appel sur la plus importante, celle de Metz. Elle est en effet la 16e par le nombre d'affaires traitées alors que Nancy n'est que la 22e. De surcroît, celle de Metz fonctionne bien mieux. Or il apparaît dans des comptes rendus de réunion entre des hauts fonctionnaires du ministère et des syndicats professionnels des personnels de la justice, que l'on travaillait déjà sur l'accompagnement des mutations résultant de la suppression de la juridiction messine. Le 23 juin 2007, un grand quotidien national confirmait le projet de suppression. Ce choix a priori de supprimer la 16e cour d'appel au bénéfice de la 22e ne peut pas relever d'une approche rationnelle et objective. Il ne peut donc s'expliquer que par un racisme antimosellan et une hostilité idéologique à notre spécificité locale. Le Parlement de Metz, fondé en 1633, fut transformé en tribunal d'appel en l'an VII puis en cour d'appel en l'an XII. Lors de l'annexion par l'Empire allemand, ses magistrats refusèrent de prêter serment au Kaiser, qui décida alors de dissoudre la juridiction. Ce n'est qu'en 1973 que le président Georges Pompidou et le Premier ministre Pierre Messmer rétablirent la cour d'appel de Metz, effaçant ainsi le dernier affront de l'annexion. Ces éléments historiques ne suffiraient peut-être pas à justifier le maintien de la juridiction messine si son activité était restée faible. Mais celle-ci étant devenue plus importante que celle de Nancy, ils rendent d'autant plus inacceptable la suppression envisagée. Il demande donc d'arbitrer en tout état de cause pour le maintien de la cour d'appel de Metz, soit par le maintien des deux cours d'appel de Lorraine, comme le voudrait le contexte régional, soit par leur regroupement à Metz, comme le voudrait l'application de critères objectifs sur l'ensemble du territoire national.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que, dès l'engagement de la réforme de la carte judiciaire en juin 2007, elle a souhaité que cette réforme soit conduite de manière pragmatique et non dogmatique. C'est la raison pour laquelle une vaste consultation des acteurs judiciaires et des élus a été conduite dans le courant de l'été 2007, tant au niveau national qu'au sein de chaque ressort de cour d'appel et département, préalablement à l'adoption de la réforme. La concertation conduite dans le ressort de la cour d'appel de Metz a mis en évidence l'attachement, non seulement des acteurs judiciaires de Moselle, mais plus largement de l'ensemble des personnes consultées, à leur cour d'appel, et ceci pour des raisons tant historiques que liées à la spécificité du droit local toujours en usage en Alsace-Moselle. Cette réalité a conduit la garde des sceaux, quand elle a présenté, à la cour d'appel de Nancy le 26 octobre 2007, le projet de schéma d'organisation judiciaire pour le ressort de la cour d'appel de Metz, à proposer le maintien de cette cour d'appel, maintien confirmé depuis par le décret n° 2008-145 du 15 février 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux d'instance, des juridictions de proximité et des tribunaux de grande instance.
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