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Michel Terrot
Question N° 74877 au Ministère de l'Alimentation


Question soumise le 30 mars 2010

M. Michel Terrot attire l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur la revente des quotas de pêche des pays qui ne les utilisent pas aux autres États. Cette revente des droits de pêche se fait au profit des États qui dépassent le plus souvent leur quota autorisé mais aux dépens des pays les moins industrialisés c'est-à-dire sans flotte de pêche importante. Cette vente est faite à un prix dérisoire ce qui affecte et n'améliore pas le niveau de vie des États les plus pauvres. Paradoxalement, ces États pauvres disposent d'une richesse importante (leurs ressources maritimes) mais ne peuvent en profiter. Il lui demande son sentiment sur cette question.

Réponse émise le 1er juin 2010

La Convention des Nations unies sur le droit de la mer signée le 10 mars 1982, complétée par l'accord des Nations unies de 1995 relatif à la conservation et la gestion des stocks chevauchants de poissons et des stocks de poissons grands migrateurs, a institué des règles internationales de gestion des ressources halieutiques et de coopération entre États déclinées différemment suivant les espaces maritimes auxquels il est fait référence. En haute mer, le principe de la liberté de déplacement et d'exploitation des ressources prévaut : il ne s'agit toutefois pas d'un principe de liberté totale puisque les instruments internationaux précités instituent une obligation entre États (États côtiers et États pêchant dans la zone hauturière) de coopérer entre eux, si nécessaire dans le cadre d'organisations régionales de gestion des pêches instituées dans cet objectif. À l'heure actuelle, une très grande partie des zones océaniques est couverte par de telles organisations qui ont soit une approche purement régionale (gestion de l'ensemble des ressources dans une zone déterminée) soit une approche thématique (gestion des ressources des thonidés et autres grands migrateurs au niveau d'un océan). Ces organisations, auxquelles la France participe activement soit en tant qu'Etat membre de l'Union européenne soit au titre des ses territoires d'outre-mer, sont amenées à instituer des mesures de conservation et de gestion des ressources lorsque cela s'avère nécessaire, sur la base des recommandations émises par les autorités scientifiques compétentes. Parmi ces mesures figure la fixation de limites de captures ou de totaux admissibles de captures (TAC) déclinés en quotas entre les États parties à ces organisations. Ces quotas peuvent faire l'objet d'échanges encadrés entre les États par type d'espèces mais ne donnent en aucun cas lieu à des transactions monétaires. La seule possibilité complémentaire offerte par certaines organisations est de permettre aux États dont la flotte de pêche nationale n'utilise pas l'ensemble de ses possibilités de pêche d'avoir recours à des navires étrangers par le biais d'accords d'affrètement : dans ces cas, ces accords sont le plus souvent notifiés à l'organisation compétente. Dans les zones économiques exclusives (ZEE), qui peuvent s'étendre jusqu'à 200 milles marins des côtes d'un État, les États côtiers possèdent des droits souverains aux fins d'exploration et d'exploitation, de conservation et de gestion des ressources naturelles biologiques : ce sont dans ces ZEE que se concentre et se développe une grande partie des ressources halieutiques (90 % des richesses présentes dans les océans selon les chiffres de la FAO). L'État côtier a la possibilité, s'il n'exploite pas toutes les ressources disponibles de sa ZEE, d'autoriser d'autres États à exploiter le reliquat des ressources, étant entendu que ces États doivent respecter les mesures de conservations arrêtées par l'État côtier. La France dispose d'une flotte de pêche dite « externe », c'est-à-dire opérant hors des eaux de l'Union européenne, principalement au large de l'Afrique de l'Ouest et dans la partie occidentale de l'océan Indien. À ce titre, elle participe dans le cadre de l'Union européenne à la négociation et à la mise en oeuvre d'accords de pêche bilatéraux conclus entre l'UE et les pays tiers : ces accords sont des composantes essentielles de la politique commune de la pêche (PCP) et ils visent à encourager le développement d'une pêche responsable et durable dans les eaux des pays tiers en limitant l'accès des flottes européennes aux ressources halieutiques uniquement excédentaires et en soutenant la politique sectorielle de ces pays. Les conditions particulières des accords (aspects techniques et financiers, types de ressources, etc.) sont spécifiées dans des protocoles portant chacun sur plusieurs années. Les accords de pêche sont extrêmement importants tant pour l'Union européenne, que pour ses partenaires. Grâce à eux, l'industrie européenne peut compter sur un apport supplémentaire substantiel en poisson. Ils fournissent en outre un emploi à de nombreux européens. Dans les pays partenaires de l'UE, le versement d'une contrepartie financière a des effets importants sur les recettes budgétaires et sur l'économie nationale, notamment en matière de création d'emplois. La nature des accords de pêche varie selon le pays partenaire. Les accords conclus avec les pays ayant les moyens d'exploiter leurs propres ressources, c'est-à-dire principalement les pays d'Europe du Nord, prennent généralement la forme d'un simple échange de quotas. Avec d'autres, essentiellement les pays en développement d'Afrique et du Pacifique, mais aussi avec le Groenland, qui n'exploitent pas totalement leurs ressources halieutiques, l'UE conclut des accords de partenariat prévoyant le versement d'une contrepartie financière en échange de l'accès à leurs zones de pêche. Depuis la réforme de la PCP en 2002, les accords conclus avec ces pays se sont transformés en véritables partenariats en faveur de l'instauration d'une pêche responsable et durable. Leur but est d'aider les pays tiers à définir leur propre politique sectorielle afin de remplir leur objectif de développement économique tout en protégeant leurs ressources halieutiques. Ces accords de partenariat mettent donc davantage l'accent sur le dialogue politique bilatéral et les contreparties financières versées portent sur des montants très conséquents complétant de manière substantielle le fonds européen pour le développement. Ils sont susceptibles de continuer à être améliorés dans le cadre de la réforme actuelle de la PCP qui doit aboutir en 2012. Ces types d'accords bilatéraux en matière de pêche peuvent être également conclus par d'autres États pêcheurs que l'UE avec ces mêmes États côtiers : ainsi, pour ces derniers, cela représente une source essentielle de leurs revenus (c'est le cas, par exemple, des petits États insulaires en développement de l'océan Pacifique). Toutefois, ces accords relèvent d'une négociation purement bilatérale entre deux États souverains et il s'avère souvent difficile, pour un État extérieur à cette négociation, d'avoir une connaissance précise des termes de ces accords. Le principe de la compatibilité, prévu par l'accord des Nations unies de 1995 relatif à la conservation et la gestion des stocks chevauchants de poissons et des stocks de poissons grands migrateurs, permet toutefois de pallier partiellement cette situation : il prévoit ainsi que les États côtiers et les États pêchant en haute mer doivent s'assurer de la compatibilité entre les mesures adoptées et les actions menées en haute mer et à l'intérieur des ZEE. Pour cela, une certaine transparence est donc requise, ce qui offre une possibilité de vérifier que ces mesures ou ces actions ne portent pas atteinte à la conservation de la ressource halieutique et au droit au développement des États les moins avancés. De la même manière, cet accord pose également comme principe fondamental la reconnaissance des besoins particuliers des États en développement, en prenant en compte leur vulnérabilité par rapport à l'exploitation des ressources biologiques marines, la nécessité d'éviter de nuire à la pêche de subsistance et aux petites pêches commerciales et la nécessité de ne pas faire supporter aux États en développement une part disproportionnée de l'effort de conservation. Les principes de compatibilité et de reconnaissance des besoins particuliers des États en développement sont très régulièrement rappelés, notamment par la France et l'UE, au sein des organisations régionales de gestion des pêches.

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