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Jean-Luc Pérat
Question N° 74669 au Ministère des Affaires étrangères


Question soumise le 23 mars 2010

M. Jean-Luc Pérat attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur les recommandations d'Amnesty international vis-à-vis du projet de nouvelle Constitution actuellement mené au Kenya. Amnesty international appelle le parlement kenyan à faire en sorte que le projet de Constitution actuellement à l'étude impose le respect, la protection et la réalisation de l'ensemble des droits humains. Ce projet de Constitution doit inclure les droits économiques et sociaux en leur conférant force de loi. Par ailleurs, l'organisation exhorte le Parlement à supprimer la disposition stipulant que le droit à la vie commence dès la conception et, si l'article relatif à l'accès à l'avortement est maintenu, à prendre les mesures nécessaires afin que les victimes de viol puissent avoir recours à une interruption de grossesse. Enfin, le projet de constitution doit comporter des dispositions relatives à l'abolition de la peine de mort. Il doit également prévoir le renforcement des dispositions visant à garantir l'égalité. En janvier, la commission de révision de la Constitution a supprimé les dispositions se rapportant aux droits à l'alimentation, au logement, à l'eau, à la santé, à l'éducation et à la protection sociale ; elle a fait de ces droits de simples principes directeurs. En outre, elle a intégralement supprimé les dispositions concernant le droit à des installations sanitaires et celles portant sur l'égalité des droits entre hommes et femmes ainsi que sur les droits des minorités, des personnes handicapées, des personnes âgées, des jeunes et des enfants. Cependant, le comité d'experts chargé d'élaborer le projet de constitution a récemment présenté au parlement un texte modifié qui réintègre les dispositions afférentes aux droits économiques et sociaux ainsi qu'à d'autres droits relatifs à l'égalité, aux minorités, aux personnes handicapées, aux personnes âgées, aux jeunes et aux enfants. Comme le préconise ce texte, le parlement doit veiller à ce que les dispositions conférant force de loi aux droits économiques et sociaux soient maintenues. Toute mesure visant à supprimer ces droits de la constitution serait un retour en arrière car ils ont été inclus dans le projet de constitution dès le début du processus de révision, en 2002. Les droits économiques et sociaux ayant force de loi permettraient, entre autres, aux citoyens de demander des comptes au gouvernement s'ils sont arbitrairement privés d'accès à des soins médicaux ou s'ils ne peuvent bénéficier d'un enseignement primaire. Les personnes expulsées de force de leur domicile pourraient également faire valoir ces droits devant les tribunaux afin d'obtenir justice. Le Kenya a ratifié le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) et la charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, qui consacrent les droits économiques et sociaux. Si cet État exclut de sa constitution les droits économiques et sociaux ayant force de loi, les Kenyans ne disposeront d'aucun recours dans leur pays en cas de violation. Ces droits sont déjà inscrits dans la constitution de nombreux pays du monde, parmi lesquels l'Afrique du sud, le Mozambique, le Sénégal, le Brésil, la Colombie, la Bolivie, l'Indonésie et la Thaïlande. Ils ont changé beaucoup de choses dans la vie des populations. C'est pourquoi il souhaite connaître les actions engagées par la diplomatie française, afin d'inciter le Kenya a mettre son projet de constitution en adéquation avec les règles internationales.

Réponse émise le 17 août 2010

Après les graves incidents consécutifs aux élections présidentielles de décembre 2007 qui avaient vu le président sortant, Mwai Kibaki, donné vainqueur sur fond d'accusations de fraudes massives et de trucage électoral, des négociations, sous l'égide de Kofi Annan avaient abouti, en février 2008, à un partage du pouvoir et à la mise en place d'un gouvernement de grande coalition. Le poste de Premier ministre a ainsi été créé et confié à Raila Odinga. La médiation de Kofi Annan prévoyait également une série de réformes de fond constitutionnelle, institutionnelles (système électoral, justice, police, fonction publique, place du Parlement), foncière. Le remplacement de l'actuelle Constitution, qui date de 1963, constituait une revendication de longue date, et la promesse de rédiger un nouveau texte était une des clés de l'accord de partage du pouvoir de février 2008. Le projet de nouvelle Constitution a été approuvé par le Parlement le 1er avril 2010. Il sera soumis à la population par un référendum le 4 août 2010. Ce projet prévoit, dans son dernier état amendé au 6 mai 2010, le respect, la protection et la mise en oeuvre de l'ensemble des droits de l'homme, dont l'interdiction de toutes formes de discrimination (art. 27 et 28), ainsi que la reconnaissance des droits économiques et sociaux (art. 43). De ce fait, il comprend des dispositions concernant l'égalité des droits entre hommes et femmes, les droits des minorités, ceux des personnes handicapées, des personnes âgées, des jeunes et des enfants. Cependant, deux articles suscitent actuellement controverses et inquiétudes. L'article 26 stipule que la vie commence à la conception et interdit l'avortement (sauf sur avis médical qualifié et si la vie de la mère ou de l'enfant est en danger). Cette disposition a provoqué la colère de certains milieux religieux qui sont favorables à une interdiction totale de l'avortement. L'article 170 maintient le rôle des cadis, limité au droit personnel (mariage, divorce et héritage et dans des cas où les deux parties sont de confession musulmane), ce qui génère également des interrogations. La France suit avec attention la préparation du référendum. En liaison avec ses partenaires, elle encourage les autorités et la société civile kenyanes à donner aux droits de l'homme la place qui leur revient dans la nouvelle Constitution. La campagne d'inscription sur le nouveau registre électoral a été un succès, la commission électorale intérimaire a réussi à enregistrer en quelques semaines 12,3 millions d'électeurs, dépassant ainsi son objectif initial de 10 millions. La communauté internationale s'est elle-même largement mobilisée. 4,7 M$ ont été alloués au comité d'experts constitutionnels (COE) chargé de l'élaboration du projet et 8,9 M$ sont consacrés au soutien de la commission électorale indépendante intérimaire (IIEC). L'Union européenne a, ainsi, contribué au financement du processus électoral pour un montant de 650 000 dollars.

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