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Bruno Le Roux
Question N° 7451 au Ministère de la Justice


Question soumise le 16 octobre 2007

M. Bruno Le Roux attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur un projet de décret relatif au temps que les conseillers prud'hommes doivent consacrer à l'étude d'un dossier et à la rédaction d'une décision de justice. Décider à l'avance du temps nécessaire pour étudier les dossiers et rédiger une décision de justice est une disposition qui n'est en vigueur dans aucune juridiction, ni imposée à quelque juge que ce soit. Or, cela semble prévu pour les conseillers prud'hommes dont personne n'ignore l'engagement et la compétence pour rendre la justice dans les conflits individuels du travail. Les conseillers prud'hommes ne sont pas des juges professionnels. L'expertise, l'expérience, la formation initiale et les qualités rédactionnelles diffèrent d'un conseiller à l'autre, d'autant que les affaires sont très diverses, de plus en plus complexes et nécessitent de nombreuses heures de recherche et de motivation. La plupart des conseillers salariés sont des ouvriers, des employés à qui l'État n'accordent que six semaines de formation juridique par mandat de cinq ans. Malgré cette formation insuffisante, la qualité des décisions des conseils de prud'hommes est reconnue dans le monde judiciaire et les jugements sont confirmés par la cour d'appel dans la majorité des cas. Si une telle disposition était imposée, cela aurait de graves conséquences sur la qualité des décisions, mais surtout sur la durée des procédures. Enfin, un arrêt de la cour d'appel de Chambéry, en date du 12 septembre 2007, stipule : « Enfin, même s'il apparaît au vu des pièces produites aux débats que le temps invoqué par les prévenus pour se consacrer à leurs activités prud'hommales est manifestement très important eu égard au nombre de dossiers qu'ils ont eu à traiter et aux audiences auxquelles ils ont participé, il n'est pas possible, en l'absence de tout moyen de contrôle sur la réalité de leur activité juridictionnelle d'en déduire que ce temps a été utilisé de manière significative à d'autres fins qu'à celles relatives au bon fonctionnement de la juridiction qu'ils composent. Á cet égard, il convient de retenir que nulle autorité ne saurait être comptable du temps que le juge consacre à son activité juridictionnelle. Il est seul face à sa conscience pour apprécier les conditions strictement nécessaires à l'élaboration de sa décision. » Dès lors, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si elle entend préserver leur autonomie de travail.

Réponse émise le 8 janvier 2008

La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le régime juridique de l'indemnisation des conseillers prud'hommes reposait sur des textes anciens dont l'interprétation a conduit à des pratiques hétérogènes sur l'ensemble du territoire et à une évolution des dépenses difficilement maîtrisable. Le procureur général honoraire Henri Desclaux a rendu sur cette question un rapport, le 5 octobre 2005, qui a été bien accueilli par les organisations syndicales. C'est pourquoi, le projet de réforme a entendu suivre en tout point les conclusions de ce rapport. Ainsi, la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 a été adoptée par les deux assemblées et validée par le Conseil constitutionnel. De plus, les projets de décret en Conseil d'État et décret simple soumis au Conseil supérieur de la prud'homie ont, depuis l'origine, exclu toute indemnisation forfaitaire des conseillers prud'hommes et consacré le principe d'une indemnisation au réel. Après un large travail de concertation au sein du Conseil supérieur de la prud'homie qui s'est réuni les 5 mai, 13 octobre 2006 puis les 26 février et 22 juin 2007, le dernier état des textes prévoit deux modes d'indemnisation se superposant selon le temps de rédaction nécessaire : un mode déclaratif reposant sur le seul conseiller rédacteur jusqu'à trois heures ; un mode délibératif reposant sur la formation de jugement jusqu'à cinq heures, puis sur le président, au-delà. Par ailleurs, les durées maximales indemnisables des activités administratives des présidents et vice-présidents des conseils de prud'hommes et de sections dans les juridictions de taille importante (Paris, Bobigny, Lyon, Marseille et Nanterre) ont été augmentées, selon les cas, d'une, deux et trois heures mensuelles. Elles ont été triplées pour les sections des conseils de prud'hommes de Bobigny, Lyon, Marseille et Nanterre, passant de 16 heures annuelles à 52 heures par an. À la suite du rapport conjoint du directeur des services judiciaires et du directeur général du travail, déposé le 20 septembre 2007 et faisant le point de l'état des négociations, la ministre de la justice et le ministre du travail, ont décidé d'augmenter le taux de vacation à 7,10 euros (soit 17 % d'augmentation) et de permettre que l'étude des dossiers après audience soit toujours effectuée par deux conseillers, pour respecter le paritarisme. Le projet de décret en Conseil d'État sur l'indemnisation des conseillers prud'hommes est en cours d'examen au Conseil d'État. Enfin, la Cour de cassation ne s'étant pas encore prononcée sur cette question, l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Chambéry le 12 septembre 2007 ne peut être considéré comme faisant jurisprudence. C'est pourquoi la ministre de la justice a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt.

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