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Jacques Remiller
Question N° 73953 au Ministère de l'Écologie


Question soumise le 16 mars 2010

M. Jacques Remiller appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur l'utilisation des huiles végétales usagées (HVU) sous la forme de biocarburant. Certes, cet usage, qui a été longtemps totalement interdit en France (article 265 ter du code des douanes), a été quelque peu desserré à la faveur du « plan biocarburants » lancé par le Gouvernement en septembre 2005. Ainsi des dispositions ont été prises à destination des agriculteurs, des marins-pêcheurs, voire des collectivités locales pour leurs flottes captives. Mais la règle fondamentale d'interdiction d'usage et de vente demeure pour les autres publics (particuliers, entreprises...). Pourtant, la directive européenne n° 2003/30/CE, relative à la promotion des biocarburants dans l'Union européenne, fait référence aux huiles végétales pures parmi les biocarburants autorisés, sans toutefois faire une référence explicite aux huiles végétales usagées. Elle établit cependant, à son alinéa 3, qu'il « existe néanmoins tout un éventail de biomasse apte à produire des biocarburants à partir de produits d'origine agricole et sylvicole, ainsi qu'à partir de résidus et de déchets de la sylviculture et de l'industrie sylvicole et agroalimentaire » : or les HVU sont, d'évidence, des déchets agroalimentaires. Dès lors, comment comprendre que le Gouvernement français n'ait pas encore pris acte de cette directive, tant l'évolution en ce sens de notre consommation d'énergie serait à la fois économe des énergies fossiles, et en matière d'émission de gaz à effet de serre ? L'utilisation d'HVU comme biocarburant apporte plus d'avantages que les huiles végétales brutes : elles évitent la pollution des égouts et des stations d'épuration de par leur collecte auprès des restaurateurs (diminution des rejets sauvages) ; elles annulent le conflit existant avec les cultures d'oléagineux à vocation alimentaire ; elles sont plus adaptées aux zones urbaines. Enfin, comment ne pas rappeler que la réglementation générale en matière de déchets non dangereux (articles R. 541-7 et R. 541-11 du code de l'environnement) oblige les détenteurs d'huiles alimentaires usagées à les éliminer par un procédé spécifique ? Construire un système de récupération apporterait donc un service réel à leurs utilisateurs. Dès lors, au vu de ce cadre européen et des incontestables avantages de ce procédé énergétique, il n'est pas compréhensible que le Bulletin officiel des douanes du 11 août 2007 (n° 6728) maintienne explicitement que l'utilisation d'HVU comme carburant n'est pas autorisée. Il lui demande donc ce que sont les intentions du Gouvernement en la matière, et quand la France compte se mettre en conformité avec le droit communautaire et les politiques européennes.

Réponse émise le 19 avril 2011

Pour des raisons techniques de compatibilité avec les moteurs actuels, l'utilisation directe des huiles végétales pures ou des huiles alimentaires usagées comme carburant n'est pas autorisée. L'arrêté du 22 décembre 1978 modifié, qui fixe la liste des carburants autorisés en France, ne reprend donc pas ces produits. Les bilans des expérimentations les plus récentes devront être expertisées et permettront, éventuellement, de faire évoluer la réglementation. Les constructeurs automobiles sont défavorables à l'utilisation directe des huiles végétales pures et a fortiori des huiles alimentaires usagées dans les moteurs, celles-ci ne répondant pas aux spécifications qui permettent aux moteurs Diesel de respecter les très bas niveaux d'émissions polluantes imposés par les normes européennes ; ils pourraient par ailleurs ne pas maintenir leurs garanties sur les moteurs si de tels produits étaient utilisés. Plusieurs expérimentations (réalisées avec des carburants composés de 20 à 50 d'huile végétale et un complément de gazole) et un rapport de l'IFP Énergies nouvelles et de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) de 2006, montrent qu'il est techniquement possible d'utiliser ces huiles brutes comme carburants dans des moteurs Diesel mais uniquement dans des conditions spécifiques et avec certaines précautions liées aux inconvénients relevés : agrément de conduite dégradé, encrassement, difficulté de démarrage, claquements liés au faible indice de cétane, craquage de l'huile entraînant des dépôts et une augmentation des émissions polluantes : jusqu'à un doublement des émissions de monoxyde de carbone ; jusqu'à un quadruplement des émissions d'hydrocarbures ; une augmentation de 90 à 140 % des émissions de particules ; une augmentation de 30 à 330 % des émissions d'aldéhydes. Ce même rapport insiste sur la qualité des huiles utilisées. De ce point de vue, l'utilisation d'huiles de friture entraînerait une augmentation notable des inconvénients cités ci-dessus. Toutefois, la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole a introduit une première ouverture. Elle précise que l'utilisation des huiles végétales pures comme carburant agricole est autorisée pour les exploitants ayant produit les plantes dont l'huile est issue. Cette utilisation bénéficie d'une exonération de la taxe intérieure de consommation ; ce dispositif a été étendu à toutes les exploitations agricoles et au secteur de la pêche depuis le 1er janvier 2007. Par ailleurs, afin de répondre aux demandes de certaines collectivités souhaitant utiliser ce carburant et conformément aux engagements pris lors de la table ronde présidée par le ministre de l'agriculture et de la pêche, et le ministre délégué à l'industrie le 30 novembre 2006 en présence de tous les acteurs du monde pétrolier et agricole, la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 autorise, à titre expérimental, l'utilisation des huiles végétales pures par les flottes captives des collectivités locales ayant conclu un protocole avec l'État. De plus, quelques expérimentations, notamment avec des huiles alimentaires usagées, sont acceptées dans la mesure où elles sont réalisées suivant un protocole expérimental précis et encadré. Le bilan gaz à effet de serre des huiles de friture usagées valorisées énergétiquement est d'autant plus favorable que les huiles alimentaires usagées sont considérées comme des déchets. La recherche d'une valorisation énergétique de ces produits mérite donc d'être encouragée. Cependant, en dehors des expérimentations, la seule utilisation possible et recommandée des huiles de friture comme carburant est leur incorporation sous forme d'ester méthylique dans le gazole jusqu'à un taux de 7 % en volume ou à un taux de 30 % en volume dans le gazole B30. Depuis le 1er janvier 2011, ces biodiesels issus d'huiles usagées (EMHU) bénéficient d'un double comptage pour l'atteinte des objectifs d'incorporation, tel que prévu par la directive 2009/28/CE relative aux énergies renouvelables qui annule et remplace la directive 2003/30/CE.

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